Rappelons que l'Aunis fut inventé au XIVème
siècle, en 1373. Ce partage de la Saintonge, par le cours inférieur
de la Charente, est à la base de la division de ses habitants : un siècle
et demi plus tard, au long des luttes fratricides des guerres de religion,
on s'aperçut bien vite que leur virulence, exceptionnelle dans notre
région, était basée moins sur une question de dogme que sur un principe
économique. Le sel (dont l'impôt, la gabelle, fut institué en 1340)
était une des plus grandes ressources du royaume. Cette richesse provenait,
en majeure partie, des marais de Brouage qui appartenaient aux Dames
Abbesses de Saintes. Voilà une précision qui explique bien des choses.
Ce joyau d'architecture militaire, jadis port florissant, surgit aujourd'hui
du marais, irréel, tel un mirage.
« Voyageur, arrête-toi ici,
car le sol que tu foules
et l'air que tu respires,
sont imprégnés
de Gloire
et de Grandeur passées. »
Lorsqu'on suit la route
directe de Marennes à Rochefort à 6 kilomètres environ de Marennes dans
une grande plaine d'anciens marais salants, transformés en pâturages,
apparaissent, soudain, lorsqu'on est arrivé à la crête de la colline
où fût construite la vieille ville forte d'Hiers, des fortifications,
des fossés, des talus couverts de gazon et couronnés d'ormeaux centenaires.
Si on approche, on voit une enceinte de pierres de taille ramponnées
de fer, des portes monumentales à demi- ruinées. L'une d'elles est surmontée
du blason, en relief, du Cardinal de Richelieu.
Aux angles de ces
fortifications, des petites échauguettes quadrangulaires ; derrière
les fortifications, des maisons basses, des rues désertes, qui se coupent
en angles droits, une modeste église, une fontaine, des vergers remplaçant
les quartiers d'autrefois ; au pied des fortifications, une terre grasse
que sillonnent des chenaux desséchés.
Pourquoi cette forteresse
dans cette solitude ? Que gardait-elle ? Que défendait-elle ? Pourquoi
ces ruines et cette mort ? alors qu'on devine que là il y a eu richesses,
mouvements et vie. On dirait qu'une horde d'envahisseurs a passé sur
ville et a tout détruit. On consulte un guide et ou lit ces quelques
lignes : Brouage, à 38 kilomètres de Royan. Restes d'une place forte
du XVIème siècle Richelieu reprenant une idée de Charles
VIII d’y établit un arsenal pour contrebalancer la puissance de La Rochelle.
Colbert transporte cet arsenal à Rochefort. Brouage est la patrie de
Champlain.
Il m'a paru intéressant de ne pas nous contenter de brèves
indications de rechercher pourquoi la forteresse de Brouage avait été
édifiée, de connaître les causes de prospérité, de sa décadence et de
sa ruine ; de savoir aussi pourquoi la nièce de Mazarin. Marie Mancini.
y avait et en fermée.
On a toujours plaisir et quelque fois profit
à animer les vieilles pierres, à repeuplée les rues désertes, à découvrir
comment, dans ces ruines a vécu, travaillé. Souffert et aimé.
Brouage.
dit André Hallays dans un description pittoresque et si exacte que nous
devoir la reproduire, est un admirable le spécimen de l’architecture,
militaire antérieure à Vauban.
Ces remparts, surannés nous émeuvent
par la fierté de leur carrure et par l'énergique dessin de leurs éperons
de pierre ; ils gardent la crâne élégance par où se signalèrent tous
les caractères du génie français dans la première moitié du XVIIème
siècle : art le plus délicat et le plus sobre semble avoir dessiné les
encorbellements des guérites aux angles de la fortification. Tout a
été aménagé pour les besoins de la guerre, rien pour l'agrément et tout,
aujourd’hui nous enchante par sa magnifique perfection. Le temps y ajoute
ses prestiges : les pierres blanches se sont nuancées d'or pâle sous
le soleil ; entre les blocs joints, les fers, qui assuraient la solidité
de l'appareil, ont laissé des traînées de rouille.
Ailleurs, le mur
se fleurit d'une ton touffe de pariétaires, ou disparaît sous une écharpe
de lierre. Mais nous pourrions nous passer ici des charmant et romantique
sortilèges de la ruine, nous serions encore saisis d'admiration à la
vue de cette forteresse nue qui pour tout étalement, porte les armes
du Cardinal, sculptées au fronton de ses défenses.
Brouage n'est
plus qu'un petit village abandonné. Ce fut un port prospère.
Les
ruines nous émeuvent toujours. C'est que bien que la mort se présente
tous les jours à nos yeux tous les jours, nous n'y pouvons croire. Lorsque
nous savons que là où furent des monuments, une ville un port l'agitation
d'une foule en travail sont maintenant des pierres, des rues désertes,
des canaux envasés, des solitudes nous sommes effrayés par de tels changements.
L'homme bâtit des édifices, des temples, des fortifications, il
les croit éternels. Quelques années passent et rien, ne reste, pas même,
quelquefois, le nom de ce qui a, disparu.
Dans les ruines de Brouage,
un grand roi a aimé ; cet amour a fait trembler un Mazarin. Il a failli
bouleverser la destinée d'un peuple. On ne s'en souvient plus.
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