La Seine
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L'ile étroite qui fut le berceau de Paris
n'a dû paraitre au-dessus des eaux du fleuve qu'après les révolutions
géologiques dont la contrée fut le théâtre vers la fin de la
période tertiaire et lorsque notre continent eut reçu à peu
près sa configuration actuelle; la série des siècles qui constituent
la période quaternaire dessina ensuite, par la retraite des
glaces et des eaux, les vallées et les plaines qui constituent
le vaste bassin dont cette ile, qui sortit de l'abaissement
de la mer, occupe la partie centrale et forme aujourd'hui la
Cité.
Elle faisait originairement partie d'un groupe de cinq
îles dont trois ont été successivement supprimées par des travaux
d'utilité générale. Une seule reste, près de la première, c'est
l'île Saint-Louis ou Notre- Dame.
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La surface du bassin de Paris est limitée
sur une partie considérable de son contour par des collines
plus ou moins élevées qui lui font une enceinte ; la Seine,
qui coule au milieu, reçoit les eaux de la Bièvre, faible rivière
qui a creusé une étroite vallée, et à l'est, en amont, la Marne
vient joindre son cours à celui du fleuve. Les observations
géologiques faites dans le sol de ce bassin ainsi déterminé
ont démontré que les eaux de l'Océan y séjournèrent à une époque
inconnue les huitres, les coquilles, les oursins, les squelettes
de poissons, les os de baleines, les dents de squales, les empreintes
de plantes marines, etc., qu'on y a découverts démontrent d'une
manière indubitable la présence et l'action prolongée des eaux
de la mer en ces parages.
Quand celle-ci se retira, le fleuve
dut s'étendre sur une surface considérable et y former des dépôts
fluviomarins; puis les alluvions s'entassèrent; le dessèchement
progressif créa des marais enfin la Seine et la Marne tracèrent
leurs lits tels à peu près qu'on les voit aujourd'hui. Une végétation
abondante, étrangère aux essences qui s'y trouvent maintenant,
envahit le sol ; des animaux purent y vivre. Notre grand Cuvier,
à l'aide des ossements qu'ils ont laissés dans les carrières
du bassin de Paris, a pu faire reparaitre une quinzaine de quadrupèdes
et d'oiseaux qui durent habiter cette contrée à cette époque
reculée.
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L'homme y vint alors, et, pour défendre
sa misérable existence, il dut disputer aux animaux féroces,
lions, tigres, etc., dont on a retrouvé les restes, les cavernes
qui leur servaient de retraites. C'est à ce moment qu'apparaissent
les premières traces d'industrie. L'exploitation des sables
voisins du Champ-de-Mars a décelé la présence d'instruments
de chasse en silex grossièrement taillé. Bientôt une industrie
un peu plus avancée permit aux sauvages habitants des rives
de la Seine de creuser des barques dans le tronc d'un arbre
(on a retrouvé un de ces bateaux monoxyles dans les alluvions
de l'ile des Cygnes) le fleuve fut traversé et des cabanes de
terre et de branchages établies dans l'ile. Des fouilles opérées
dans l'ancien sol, en mettant à découvert des instruments de
silex d'un travail plus perfectionné que ceux de l'époque antérieure,
montrent que l'habitation de l'ile de la Seine date d'une haute
antiquité.
Les monuments mégalithiques et les sépultures
datant des époques antéhistoriques découvertes de nos jours
au bois de Vincennes, à La Varenne- Saint-Hilaire, sur les bords
de la Marne, sur ceux de la Seine à Paris, à Meudon, à Marly,
auprès de Saint-Germain-en-Laye, à Argenteuil et jusqu'à l'embouchure
de l'Oise, à Conflans-Sainte-Honorine, démontrent combien les
hommes qui occupèrent alors le territoire qui devint plus tard
celui des Parisii surent profiter des avantages que leur offrait
la situation de la région qu'ils habitaient. Des conquérants
galls, celtes ou kymris se rendirent maîtres de cette région
plus civilisée que celle dont elle était héritière, cette population
nouvelle construisit des ponts qui rendirent faciles les communications
entre l'île et les deux rives du fleuve, elle cultivait le froment,
l'orge et l'avoine et menait paître de nombreux troupeaux d'animaux
domestiques dans les terrains de la rive gauche
Quand César
vint à l'assemblée des peuples de la Gaule convoqués par lui
à Lutèce (tel était le nom de l'île de la Seine et de la bourgade
qu'on y avait élevée), les habitants, descendus des Celtes,
des Galls ou des Kyrnris, arrivés successivement d'Asie, faisaient
partie d'un clan ou tribu dont (1) l'auteur des Commentaires
nomme les membres parisii.
Le moyen âge inventa une origine
troyenne à ce nom devenu si célèbre Francus, fils d'Hector,
vint fonder Troyes en Champagne et une ville dans une ile de
la Seine à laquelle il appliqua pieusement le nom de son oncle
Pâris; l'imparfaite et puérile érudition de nos pères en fait
d'étymologie était frappée d'une concordance de nom comme d'une
preuve historique irréfragable. Troyes en Champagne et Paris
en France devaient nécessairement dériver de la Troie de l'Iliade
et du Pâris qui ravit Hélène. Au XVIème siècle, une
érudition grecque un peu plus avancée et le désir de trouver
dans une étymologie la consécration d'un droit déjà bien cher
à nos compatriotes firent imaginer que Paris venait du grec
Parrhisia, qui signifie le franc parler « chose autant propre
aux Parisiens qu'à nation quelconque, » comme dit le vieux moine
octogénaire Du Breul, qui s'intitule avec tant de soin Parisien
sur le titre de ses Antiquités de Paris, ainsi que l'avaient
fait d'ailleurs Gilles Corrozet et Nicolas Bonfons, les premiers
historiens de la grande cité.
L'opinion qui fait dériver
le nom de notre capitale du celtique par ou bar,
frontière, offre, à défaut de certitude, plus de vraisemblance.
On suppose que les Parisii, originaires de la Belgique, vinrent
se fixer sur les bords de la Seine après en avoir obtenu la
permission des Senones ; ils se soumirent même, pour s'assurer
la protection de cette nation puissante, à une certaine dépendance.
Leur territoire, borné à une circonférence de dix à douze lieues,
était enclavé entre les Silvanectes au nord, les Metdi
à l'est, les Senones au sud-est, les Carnutes au sud-ouest.
Telle était la situation où César trouva les Parisii en l'an
54 avant Jésus-Christ.
Lui-même raconte dans ses Commentaires
qu'il convoqua dans leur ville une assemblée de chefs gaulois,
desquels il obtint une levée de cavalerie. L'année suivante,
une insurrection générale ayant éclaté, Labiénus se vit arrêter
au confluent de la Seine et de la Marne par l'armée confédérée,
sous les ordres du vieux Camulogène, chef des Aulerci. Après
avoir remonté le cours du fleuve pour s'emparer de Melun, il
le redescendit, mais par la rive gauche, et vint camper sur
le mont Leucotitius (montagne Sainte- Geneviève). C'est là que
les Parisiens, après avoir mis le feu à leur ville, vinrent
se réunir à l'armée gauloise que la marche du général romain
avait forcée de se replier.
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Les Gaulois furent vaincus dans une bataille
livrée dans les terrains qui se trouvent compris aujourd'hui
entre lssy et Vaugirard. Camulogène fut tué dans l'action. Quoique
César présente les Parisii comme un peuple dont l'alliance lui
est acquise, il est permis d'en douter lorsqu'on les voit fournir
ensuite leur contingent à la grande armée de Vercingétorix ;
faible contingent, à la vérité, et qui démontre leur peu d'importance.
Réunis aux Pictaves, aux Turones et aux Suessiones, ils ne fournirent
que huit mille hommes. La conquête des Gaules achevée, il ne
fut plus question des Parisii, si ce n'est dans la distribution
en provinces qui les rangea dans la Lyonnaise. L'excellente
position des Parisii, déjà remarquée par César, leur valut l'honneur
de voir plusieurs empereurs habiter parmi eux, comme nous aurons
occasion de le dire en parlant de Paris. L'importance que leur
ville acquit se conserva sous les Francs vainqueurs, qui en
firent une de leurs capitales. L'invasion austrasienne dépouilla
les Parisii de cet honneur.
Ils eurent simplement parmi
eux des comtes, et leur territoire forma un comté qui dépendait
du duché de France. Gérard était comte de Paris en 759. Étienne,
qui lui succéda, figure dans les capitulaires. Son successeur,
Bigon ou Pécopin, épousa une fille de Louis le Débonnaire. Vers
ce temps, les comtes de Paris devinrent héréditaires. C'est
Gérard II, qui se déclara pour Lothaire ; Conrad, que l'abbé
Gozlin entraina dans le parti de Louis le Germanique ; Odo ou
Eudes, qui défendit si bien Paris en 885 et devint roi; Robert,
qui fut roi aussi; Hugues le Grand, qui se contenta du titre
de duc de France, et enfin Hugues Capet, qui fixa définitivement
sur sa tête et sur celles de ses descendants la couronne royale
en 987. Devenus depuis longtemps de grands personnages, les
comtes de Paris se déchargeaient sur des vicomtes de l'administration
particulière de la ville. Dès l'an 900, nous trouvons un vicomte
de Paris, Grimoard.
A partir de la révolution de 987, qui assura à Paris le rang de capitale de la France future, l'histoire du comté de Paris se confond avec celle du royaume entier. Nous arrêtons donc nécessairement ici ce que nous avons à dire en général du département de la Seine, dont l'histoire se retrouvera dans celle de Paris et des localités qui l'entourent, nous bornant à signaler l'héroïque patriotisme dont notre banlieue donna plus d'une fois l'exemple, principalement en 1814 et 1815, à la barrière Clichy et sur les buttes Chaumont. Toutefois, nous ne pouvons-nous dispenser de dire un mot des terribles évènements dont le département de la Seine a été théâtre et victime durant la guerre franco-allemande de 1870-1871. Dès le 5 septembre 1870, à l'approche des troupes ennemies, des commencements de fortifications avaient été ordonnés aux alentours de Paris mais on avait malheureusement négligé le plateau de Châtillon, qui domine le fort d'Issy et où les Prussiens devaient plus tard établir de formidables batteries pour cette œuvre odieuse du bombardement de la capitale, devant laquelle leur haine envieuse ne devait pas reculer. Le 16 septembre, la marche des corps composant les deux armées allemandes chargées des opérations contre Paris se dessinant de plus en plus, un mouvement d'émigration se prononce, en même temps qu'un mouvement en sens inverse se produit. L'investissement, commencé le 18, continue le 19 et est complet le 21. L'implacable blocus devait durer près de cinq mois. On conçoit quel dut être le sort des malheureux habitants de la banlieue parisienne qui n'avaient pas abandonné leurs foyers devant le flot de l'invasion. On sait aussi quelles ruines amoncelèrent les soldats allemands autour de la ville assiégée ; mais il est difficile de raconter les souffrances de tout genre qu'endura la population qui y vécut enfermée durant ce long espace de temps. Pourtant, au cours de l'article que nous consacrons ci-dessous à Paris, nous dirons les douloureuses péripéties de ce siège mémorable, ainsi que les combats qui eurent lieu aux environs de la place. Parmi les départements envahis, le département de la Seine est celui qui eut le plus à souffrir.
Paris
Si ce jour là, on avait prédit à ce guerrier romain qu’en ce lieu même où il avait gagné sa bataille s’élèverait une ville qui dépasserait en splendeur la magnificence de Rome soit il nous aurait ri au nez, soit il nous aurait découpé en lanières pour renforcer le cuir de ses caligæs pour avoir osé railler les noms de Jupiter, Mars et Quirinus, dieux qui veillent à la prospérité de Rome. Et pourtant, il était bien sur le cite de la future Lutèce que plus tard un certain Clovis, roi des Francs rebaptiserait Paris.
Note
L'Histoire de la ville de Paris se trouve dans le chapitre consacré exclusivement à Paris intitulé : Si Paris m'était conté
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