Laval - Préfecture de la Mayenne
Retour au DépartementLaval (Lavallum, Vallum Guidenis), est, avec
ses voies nouvelles, son château, ses quais, ses ponts, ses promenades,
et malgré ses anciens quartiers assez mal bâtis, une des plus jolies
villes de France. Il est difficile de préciser l'époque de la fondation
de cette ville, et l'on a discuté sur ses premiers seigneurs, sur
le temps où ils ont vécu. Selon les uns, une forteresse y aurait
été bâtie au temps de Charlemagne, pour protéger le pays contre
les invasions des Bretons, et, renversée par les Normands, aurait
été relevée vers la fin du IXème siècle. Selon d'autres,
l'origine de Laval serait postérieure à cette dernière époque.
On trouve, au temps d'Hugues Capet, un seigneur de Laval, nommé
Yves son fils prit le nom de Gui, qui devint celui de tous ses successeurs.
L'un d'eux suit Guillaume le Conquérant à la conquête de l'Angleterre.
Guillaume maria le fils de ce seigneur à sa nièce Denyse, fille
du comte de Mortain. La maison de Laval s'accrut rapidement; ces
seigneurs fondèrent et dotèrent des abbayes, enrichirent en général
le clergé et augmentèrent la puissance de leur famille par des alliances.
En 1170, Gui V, de Laval, épouse Emme, fille de Geoffroy d'Anjou
et de Mathilde d'Angleterre ; leur petite-fille Emme épouse en premières
noces Robert, comte d'Alençon, et, après la mort de son premier
mari, dont elle eut un fils qui mourut jeune ; se remarie, en 1218,
à Matthieu de Montmorency, connétable de Montmorency, tige des Montmorency-Laval.br>
Le connétable avait d'un premier lit un autre fils, Bouchard de
Montmorency, qui épousa Isabeau de Laval, sœur de la seconde femme
de son père. C'est de ce Bouchard que descendit la maison des Montmorency
qui joua un rôle si important dans notre histoire. Tous ces seigneurs
prennent part aux guerres féodales, aux croisades ; mais leur histoire
n'est guère qu'une généalogie sans intérêt et il est difficile,
pendant plusieurs siècles, de trouver un fait qui se rapporte à
la localité dont ils étaient les possesseurs.
En1290, Gui IX
épouse Béatrix de Gavres, comtesse de Falkenberg. Cette femme, élevée
en Flandre, amena avec elle, à Laval, quelques tisserands de Bruges,
qui importèrent dans le bas Maine l'industrie de leur pays et apprirent
aux habitants à tisser et à blanchir le chanvre. C'est là l'origine
de la manufacture de toiles de Laval, qui s'éleva promptement à
un si haut degré de prospérité.
Gui X prit part aux guerres de
Philippe de Valois contre les Flamands. Revenu dans ses domaines,
il soutint contre Jean de Montfort, son beau-frère, la cause de
Charles de Blois, allié de Philippe de Valois. Montfort s'appuyait
sur les Anglais. Après avoir remporté plusieurs avantages, Gui X
fut vaincu et tué à la bataille de La Roche-Derrien, en 1347. Gui
XII marqua sa place parmi les vaillants capitaines de son temps
; il eut pour beau-frère Olivier de Clisson. Il joua un rôle considérable
dans un événement important du XIVème siècle. Le duc
Jean de Montfort avait invité le connétable de Clisson, les sires
de Laval, de Beaumanoir et quelques autres à venir visiter son beau
château de l'Hermine, à Vannes. « Le connétable et les barons, ne
voulant pas témoigner une défiance insultante à leur suzerain, se
rendirent avec lui à l'Hermine le duc attira messire Olivier dans
la maîtresse Tour, sous prétexte de lui demander son avis sur cette
maçonnerie ; mais, à peine le connétable y fut-il entré, que des
soldats apostés se jetèrent sur lui il fut pris et en ferré de trois
paires de fers. Le sire de Beaumanoir fut traité de la même façon.
« Messire Olivier, dit Froissart, se voyant ainsi attrapé, n'estoit
du tout à son aise, et à bonne cause car, par trois fois, il fut
déferré et mis sur les carreaux : une fois vouloit le duc qu'on
lui tranchât la tête, et l'autre fois vouloit qu'on le noyât et,
de l'une de ces morts brièvement il fust fini, si n'eust été le
sire de Laval ». Ce seigneur, contre qui le duc n'avait point de
mal talent, et qu'il avait voulu renvoyer libre du château, ne quitta
pas Jean de Monfort un seul instant de toute la nuit, et ne cessa
de lui représenter l'infamie dont il se couvrirait, les périls dans
lesquels il se précipiterait, s'il assassinait le connétable de
France et le plus illustre des barons de Bretagne. Le duc, ébranlé
par l'éloquence que Laval déployait en faveur de son beau-frère
Clisson, renonça enfin à occire le connétable. (Henri Martin, Histoire
de France.) Jean de Monfort le laissa partir en exigeant de lui
une énorme rançon, (que le roi de France le força plus tard à restituer.
Gui XII laissa une fille mariée à Jean de Monfort, seigneur de Kergorlay,
qui lui succéda sous le nom de Gui XIII. Son fils, Gui XIV, rendit
à la France de grands services dans la guerre contre les Anglais,
dont le Maine était alors le théâtre ; Charles VII s'en souvint,
et le jour même de son sacre, en 1429, il érigea la seigneurie de
Laval en comté. L'année précédente, Laval avait été pris par Talbot,
puis repris le 25 septembre ; cette journée fut depuis consacrée
chaque année par une procession solennelle.
Cette époque est
celle de la grande puissance de la maison de Laval elle possédait,
outre ses domaines héréditaires, des terres importantes en Bretagne,
en Anjou, en Normandie, en Picardie, en Flandre, dans le Hainaut
et dans l'Artois. Gui XIV obtint du roi de France l'établissement
d'une chambre des comptes de Laval précieuse prérogative qui n'était
accordée qu'à cinq ou six des premières maisons de France : un juge
ordinaire, quatre auditeurs et un greffier composaient cette cour.
Louis XI augmenta encore la puissance de cette maison en détachant
le comté de Laval du Maine pour le faire dépendre directement de
la couronne. Les comtes de Laval se distinguèrent dans les guerres
d'Italie. La femme de Gui XVIII, nommée Guyenne, se sépara de son
mari, se convertit au protestantisme et montra une énergie extraordinaire
pour sa défense et celle de son propre parti. Elle fut condamnée
à mort par le parlement de Paris mais elle se mit en sûreté, et
mourut tranquillement à Laval, laissant ses domaines à son neveu
Paul de Coligny, fils du fameux d'Andelot, qui se distingua dans
les guerres de religion sous le prince de Condé. D'Aubigné, dans
son Histoire Universelle, nous raconte un de ses exploits. Pendant
la guerre de 1586, en Saintonge, « le comte de Laval, arrivé avec
trente salades (cavaliers coiffés d'une salade, espèce de casque),
le reste n'ayant pu suivre, fut commandé par le prince de Condé,
sans loisir de prendre haleine, de charger le gros des piques où
estoit l'enseigne de Tiercelin, comme colonnelle des régiments seule
arborée. Le comte enfonça avec une telle résolution qu'il rompit
tout. La troupe du prince se partagea en deux, l'une partie donne
dans le débris qu'avoit fait le comte, l'autre cogna ceux de Saintes,
sortis au secours à pied et à cheval jusque dans le faubourg de
la Bretonnière. Laval s'attaqua particulièrement au drapeau colonel,
lequel, quoique bien défendu, il emporta à coups d'épée mais la
joie de ce petit heur fut bien éteinte quand il trouva ses deux
frères, Rieux et Suilly, blessés à mort, l'un d'une mousquetade
dans la tête, l'autre d'un coup de pique dans le petit ventre. Ceux
des catholiques, qui mesuroient les choses plus à l'utile qu'à l'honnêteté,
estimèrent à grand heur le dommage que les réformés reçurent en
vainquant, surtout de ce que le comte de Laval, ayant quelques jours
auparavant perdu son frère Tanlai, vit encore fini ! les deux autres
entre ses bras, et en mourut de déplaisir. Ces quatre frères étaient
les vrais enfants d'Andelot, semblables de visage, mais plus encore
en probité, prudence et valeur. »
Le comte de Laval laissait
un fils, Gui XX. Laval avait dans ses murs un assez grand nombre
de protestants en 1589, Henri IV y séjourna après la prise du Mans.
Trois ans plus tard, la ville tomba au pouvoir de Bois-Dauphin,
capitaine ligueur. Le pays était ravagé par les Anglais, alliés
de Henri IV. Une partie des habitants de Laval sortirent pour les
combattre, et furent vaincus. En : 1594, la ville se soumit au maréchal
d'Aumont, qui en prit possession au nom de Henri IV.
Gui XX ne
se montra guère fidèle aux exemples de dévouement à la cause protestante
que lui avait légués sa famille ; il se hâta de se convertir. Il
fut tué en Hongrie en combattant contre les Turcs. Il avait vingt
ans. Sa succession passa à Henri de La Trémouille, prince de Talmont.
Ce fut un des descendants de ce dernier qui, dans les guerres de
la Vendée montra une si brillante valeur et périt sur l'échafaud,
à Laval, en 1794, à l'âge de vingt-huit ans. Pendant les deux derniers
siècles, le négoce des Lavalois prit un accroissement considérable.
Leur commerce de toiles s'étendait en Espagne et jusque dans l'Amérique
méridionale ; et l'on attribue à cette circonstance l'esprit d'opposition
que les habitants de Laval, ville très religieuse d'ailleurs, manifestèrent
contre les jésuites, qui jamais ne purent réussir à y fonder un
établissement. Les Lavalois, dit-on, craignaient que les jésuites
ne leur fissent concurrence dans leur commerce avec les pays étrangers,
où ils dominaient. Nous avons raconté dans l'histoire du département
les terribles épreuves que Laval dut subir pendant les guerres de
la Révolution. C'est aujourd'hui une ville industrielle, dont la
principale fabrication est celle des toiles dites de Laval. Nous
emprunterons à l’Annuaire de la Mayenne de 1851 les détails qui
suivent sur cette industrie. Ils sont d'ailleurs extraits d'un remarquable
mémoire publié en 1849 par AI. J.-D. des Cepeaux : « La fabrication
des tissus de Laval a toujours tenu une place importante dans le
commerce de : France ; son origine est fort ancienne. On voit dans
nos chroniques que dès le XIIIème siècle, il se fabriquoit
au pays de Laval des tissus de laine, serges, camelots et draperies,
mais le profit en estoit de petit advantage. Ce que voyant Béatrix,
comtesse de Gavres, qui avoit épousé Gui IX, seigneur de Laval,
en l'année 1290, elle fit venir de son pays de Flandres des maîtres
tisserands qui apprirent aux Lavalois l'art de fabriquer des toiles,
et la manufacture et le commerce en furent establis à Laval en l'année
1298. » Bourjolly nous apprend encore qu'en 1484, Gui, quinzième
du nom, estant seigneur Laval, sous le règne de Louis XI, des marchands
lavalois, qui s'en estoient allés en la ville de Nantes pour leur
négoce, apprirent la manière de blanchir les toiles et, pour ce,
firent construire deux lavanderies auprès de Bootz, sur la rivière
de la Mayenne, et la plus considérable estoit à La Maillanderie.
Alors les marchands espagnols, qui venoient à Nantes pour la vente
des marchandises de leur pays, descendirent jusques en la ville
de Laval et y achetèrent quantité de toiles. Voyant cela, nos marchands
lavalois firent acquisition de jardins, terres et prés sur les bords
de la rivière et y établirent des lavanderies.
Ce fait se
trouve relaté aussi dans la chronique en vers de Guillaume Le Doyen
Trois lavandiers il y avoit
Qui leur toile y blanchissoit
Sur la rivière devers Bootz
Où de toiles avoient beaux lotz.
Les Espagnols y descendoyent
Et leurs toiles cy achetoyent,
Dont il demeuroit grand argent
Qui soutenoit beaucoup de gent.
Le commerce de-Laval le plus riche, disent encore nos chroniques,
est celui des toiles blanches, jaunes et écrues, qui se vendent
dedans et dehors le royaume, dans celui d'Espagne principalement,
et qui sont même portées avec succès par navires jusques aux places
qui bordent la mer du Sud et aux Indes occidentales, d'où il revient
fort souvent quantité de piastres et autre argent au grand profit
des marchands, qui y ont aussi hasardé leur vie et leurs biens à
l'aventure de cet élément.
Jusqu'à l'époque de la Révolution
de 1789, la fabrication, le blanchiment et le commerce des toiles
furent en voie de prospérité dans notre pays. La population entière
prenait part à cette industrie, qui fournissait un emploi avantageux
aux capitaux des riches et un travail lucratif à la classe ouvrière.
De là l'accroissement successif de la ville qui, dans l'origine,
n'était qu'une bourgade bâtie sous la protection des remparts du
château des seigneurs de Laval. Il y avait, en 1789, seize blanchisseries
au tour de la ville et, de plus, celle de La Mazure à deux lieues
plus loin, qui équivalait à dix autres. Elles pouvaient fournir
au commerce de quinze à seize mille pièces de toile blanche par
année. Château-Gontier, produisant des lins excellents, ne faisait
que des toiles fines. Mayenne fournissait des toiles de doublures
et aussi des mouchoirs de couleur. Laval, suivant le besoin, fabriquait
des qualités diverses et fournissait en écru les blanchisseries
de Beauvais, de Senlis et de Troyes. Lyon, Villefranche, Bordeaux
y faisaient des commandes habituelles. Les toiles blanches étaient
expédiées en immense quantité en Espagne et dans les colonies. Leur
apprêt était, suivant l'occurrence, celui de Fiatidres, de Rouen,
de Pontivy, de Quintin l'apprêt dit de Laval était appliqué aux
qualités inférieures. Cela finit par devenir une cause de défaveur
pour le commerce de cette ville. Les toiles de première qualité
se vendant comme étant de Flandres, de Quintin, etc., on se persuada
que Laval ne fournissait que des produits médiocres et les commandes
se ralentirent successivement. Les secousses politiques aggravèrent
le mal, et bientôt cette industrie fut entièrement ruinée, à ce
point qu'à la halle de Laval on ne présentait au marché que sept
mille pièces de toiles au lieu de quinze, vingt et vingt-cinq mille
qui s'y étaient jadis vendues. Mais, tandis que la fabrique de Laval
éprouvait cette défaveur, l'activité industrielle des Lavalois redoublait
de zèle et tentait des voies nouvelles. Ce fut alors que s'établirent
successivement les tissages de siamoises, de mouchoirs, de calicots,
de coutils et d'autres tissus habilement variés d'après les exigences
de la mode, et c'est ainsi que, malgré les crises politiques et
financières qui sont venues trop souvent entraver l'industrie lavalloise,
elle a toujours su combattre et surmonter les obstacles.
Divisée
en deux parties par la Mayenne, qu'on y passe sur deux ponts, Laval
présente aujourd'hui, grâce à ses voies nouvelles, bordées de belles
constructions, un aspect agréable, la partie vieille de la ville
a conservé son caractère, ses rues tortueuses, étroites, ses maisons
surplombées. Les édifices les plus remarquables sont L'église de
la Trinité, construite, dit-on, sur l'emplacement d'un ancien temple
de Jupiter, érigée en cathédrale en 1855 l'église des Cordeliers,
qui a une voûte en bois et entièrement peinte, trente-six colonnes,
moitié en marbre rouge, moitié en marbre noir, dont douze, plus
grandes que les autres, décorent le maître-autel ; l'église Saint
Vénérand sur la rive gauche ; la préfecture, qui occupe un ancien
couvent de. Terminons cette nomenclature en citant encore les jardins
de Bel-Air et ceux de Sainte Férine ; la halle aux toiles, immense
construction élevée sous les ducs de La Trémouille la place du Champ
de foire, qui est auprès et dont on a fait une agréable promenade
; celle de Hardi, qui se présente au sortir de la porte Beucheresse.
Le quartier environnant est le plus beau et en même temps le mieux
habité de la ville. C'est là que réside la haute bourgeoisie, presque
toute la noblesse de Laval.
L'ancien château, occupé successivement
par les ducs de Laval et les sires de La Trémouille, s'élève sur
les bords de la Mayenne, au milieu d'un triste amas de constructions
; il sert aujourd'hui de prison. Il se compose d'une grande cour
servant de préau, de vastes pièces converties en cachots, d'une
chapelle souterraine, d'une tour remarquable par sa magnifique charpente
et d'une immense salle, jadis consacrée aux délibérations des vassaux
quand il plaisait au seigneur suzerain de les convoquer. Une autre
partie du château, aujourd'hui restaurée, a été convertie en palais
de justice. La ville est ceinte d'un cordon de murailles fortifiées
dont quelques parties sont encore assez bien conservées. Elle possède
de belles et agréables promenades de la place de la Mairie, située
ait centre de la ville, on suit les bords de la Mayenne jusqu'à
Changé. Les bords de la rivière offrent les sites les plus pittoresques
d'un côté sont des rochers et des coteaux en partie couverts de
bois de l'autre, à la suite du quai, le chemin de halage traverse
de magnifiques prairies toujours verdoyantes. Sur l'une des places
de la ville, à l'entrée de la promenade de Changé, on a élevé, en
1840, une statue en bronze à Ambroise Paré, le créateur de la chirurgie,
due à l'habile ciseau de David d'Angers
. A 2 kilomètres au nord
de Laval et sur la route de Changé, la petite église de Price mérite
l'attention des archéologues ; c'est un édifice très curieux que
l'on regarde comme ayant été la première église de Laval et qui
paraît dater XIIème siècle, ainsi que semblent le prouver
les chaînes de briques que l'on remarque dans le gros œuvre. Cette
curieuse église renferme un zodiaque peint sur l'arc de la voûte.
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