Annecy - Préfecture de la Haute-Savoie
Retour au DépartementAnnecy (Annesiacum novum). La rive nord du lac d'Annecy
est occupée au moins dès 3100 av. J.-C. Les tribus gauloises
des Allobroges atteignent très tôt les Préalpes de Savoie
et les rives des grands lacs, certainement dès le début
du IVème siècle av. J.-C. En 121 av. J.-C.,
les Allobroges sont vaincus par le consul Quintus Fabius
Maximus « allobrogique ». Puis, malgré une forte résistance
et des rébellions contre les lourds impôts romains,
les Allobroges sont définitivement battus par les légions
romaines en 62 av. J.-C., ce qui ouvre leur territoire
à la romanisation.
Avec l'affaiblissement de l'Empire
romain, de nombreux peuples barbares déferlent sur la
Gaule. En 259, le vicus subit une importante attaque,
il est rasé et sa population massacrée. Les survivants
se réfugient dans les grottes du mont Veyrier. Reconstruit,
Boutae connait un nouvel essor au siècle suivant, mais,
lors des grandes invasions du début du Vème
siècle, le vicus est définitivement détruit. Les Burgondes
occupent la région qui est annexée par les Francs au
VIème siècle. L'insécurité grandissante contraint
les habitants à abandonner la plaine pour les collines
voisines, comme l'atteste le domaine agricole de la
villa « Anniciaca » (colline d'Annecy-le-Vieux) au VIIIème
siècle, qui devient un domaine royal au siècle suivant.
Il faut attendre le XIème siècle pour voir
la ville renaitre au pied d'une tour de défense édifiée
sur le dernier contrefort du Semnoz. Un texte de 1107
confirme la naissance d'Annecy-le-Neuf sur les rives
du Thiou et fait une première mention d'une église Saint-Maurice
sous le château. Ce dernier et la bourgade d'Annecy-le-Neuf
se développent sous le comte Amédée Ier (de
Genève). Elle a alors l'apparence d'un gros village
avec de nombreuses étables. En 1132, une maison forte
est édifiée sur l'ile au milieu du Thiou. En lutte permanente
avec les évêques de Genève, les comtes de Genève finissent,
à la fin du XIIème siècle, par se réfugier
à Annecy où ils occupent le manoir de Novel au fond
de la plaine des Fins, puis le château qu'ils agrandissent
au XIIIème siècle. La ville devient donc
capitale du comté.
Le XIVème siècle est
marqué par le long règne du comte Amédée III de Genève
de 1320 à 1367, date à laquelle les franchises d'Annecy
sont confirmées. La comtesse Mahaut de Boulogne, épouse
du comte, donne naissance au dernier des comtes de Genève,
Robert, au château d'Annecy. Celui-ci provoque le Grand
Schisme d'Occident en devenant le pape Clément VII,
en résidence à Avignon.
En 1394, Robert de Genève
fait ériger l'église Notre-Dame-de-Liesse, nécropole
des comtes de Genève, en une collégiale qui, devenant
le centre d'un pèlerinage très populaire, confère à
Annecy un immense prestige.
Après le décès de Clément
VII en 1394, le comté de Genève est acquis en 1401 par
le comte de Savoie Amédée VIII. Le comté de Genève se
trouve démembré en un comté de Genève proprement dit
et un comté de Genevois avec Annecy pour capitale. Pour
rallier les habitants, qui ne voient pas d'un bon œil
leur rattachement à la maison de Savoie, le duc crée
en 1434 l'apanage de Genevois et Faucigny qu'il confie
à son fils cadet, Philippe de Savoie.
Cet apanage disparait à la mort
sans postérité de ce dernier en 1444, mais il est reconstitué
de 1460 à 1491 au profit de Janus de Savoie, fils de
Louis Ier de Savoie, qui fait d'Annecy sa
résidence officielle alors qu'il est comte de Genevois,
baron de Faucigny, seigneur de Beaufort-Ugine-Faverges-Gourdans.
De nouveau capitale d'apanage, Annecy bénéficie de la
sage administration de Janus de Savoie et des fastes
de sa cour. C'est à ce moment-là que sont établis les
principaux organes du gouvernement du comté : conseil
comtal, chambre des comptes, procureur fiscal, juge
mage. À la mort de Janus, Annecy est de nouveau rattaché
à la Savoie de 1491 à 1514. En 1514, Charles III de
Savoie inféode le Genevois et les baronnies de Faucigny
et de Beaufort à son frère Philippe. Annecy est alors
de nouveau le centre d'un apanage allant du Genevois
à Ugine.
Philippe, duc de Nemours en France en 1528
est le premier prince de la dynastie des Genevois-Nemours
qui se prolonge jusqu'en 1659 (à la mort d'Henri II,
dernier duc de Genevois-Nemours, le 14 janvier). En
fait, c'est Jacques de Savoie-Nemours qui devient le
premier duc de Genevois, le comté ayant été érigé en
duché en 1564 par Emmanuel-Philibert qui entend s'attacher
et surveiller ce prince trop français à son gré qu'est
Jacques de Nemours, fleur de toute la chevalerie selon
Brantôme. L'administration du bourg d'Annecy est alors
de la responsabilité d'un conseil général, assemblée
des bourgeois de la ville, qui élisent des syndics pour
trois ans. À partir de 1491, un conseil étroit dit des
Douze, comprenant quatre syndics et des conseillers,
prend en charge les affaires de la ville
À partir de 1536, lors du triomphe de la réforme calviniste à Genève, les chanoines de la cathédrale Saint-Pierre s'installent à Annecy ainsi que des ordres religieux catholiques comme les clarisses. L'évêque y séjourne habituellement à partir de 1568. À cette époque, une série de beaux monuments sont construits comme le logis de Nemours au château, la cathédrale Saint-Pierre, la maison Lambert et le clocher de la collégiale Notre-Dame-de-Liesse. À partir de 1560, la Savoie du Nord et Annecy, placés en un point stratégique sur la ligne de partage des confessions, deviennent une citadelle avancée de la Contreréforme. Si le premier évêque de Genève à résider de façon permanente à Annecy est Ange Giustiniani (1568-1578), les débuts de la Réforme catholique datent effectivement de son successeur, Claude de Granier (1578-1602). Cependant, c'est François de Sales, un enfant du pays, évêque de Genève en résidence à Annecy de 1602 à 1622, qui, après avoir lui-même prêché, jette les bases d'une solide réforme du clergé et d'une transformation des mœurs et des mentalités dans son diocèse. Il marque de façon durable la ville et toute la région grâce à son prestige intellectuel et spirituel. Bien plus, son rayonnement s'étend à toute l'Europe catholique avec l'immense succès de l'un de ses deux plus célèbres ouvrages, L'introduction à la vie dévote. Ainsi Annecy devient la « Rome des Alpes ». Le 5 octobre 1600, lors de la Guerre franco-savoyarde, Henri IV fait une entrée triomphale à Annecy accompagné d'Henri Ier de Savoie-Nemours de la Cornette Blanche et du régiment de Nérestang et passe la nuit au château. Il quitte la ville le 8 en direction de Faverges. Dès 1606, vingt-huit ans avant la fondation de l'Académie française, François de Sales, canonisé en 1666 et le président Antoine Favre (du Sénat de Savoie) créent, à la mode italienne, l'Académie florimontane (« fleurs et montagnes »).
En 1610, François de Sales et
Jeanne de Chantal fondent l'ordre de la Visitation.
Dans le cadre d'un vaste mouvement des ordres nouveaux,
nés de la Réforme catholique, Annecy accueille les capucins
en 1592, les visitandines en 1610, les barnabites en
1614, les annonciades de Saint-Claude en 1638, les bernardines
réformées en 1639, les lazaristes en 1641, les cisterciennes
de Bonlieu en 1648. La présence religieuse est donc
très importante à Annecy qui compte treize maisons religieuses
pour 5 000 habitants. La moitié de la ville appartient
à différents ordres religieux qui possèdent non seulement
les églises et les couvents, mais aussi des ateliers,
des moulins et de vastes terres et forêts Ces ordres
religieux, qui ont la charge de l'éducation et des hôpitaux
pour les malades et les pauvres, font travailler les
artisans et les commerçants locaux.
Les idées germes
de la Révolution sont connues et répandues parmi les
bourgeois d'Annecy grâce aux nombreux Savoyards qui
vivent à Paris, sans oublier l'Encyclopédie, les écrits
de Voltaire et du genevois Jean-Jacques Rousseau que
l'on trouve dans les bibliothèques privées des notables
annéciens. Dans la nuit du 21 au 22 septembre 1792,
les troupes françaises du général Montesquiou envahissent
par surprise le duché de Savoie, obligeant l'armée sarde
du vieux général Lazary ainsi que de nombreux fonctionnaires
et membres du clergé à se réfugier au Piémont à Turin,
capitale des États de Savoie depuis 1562.
Fin octobre, l'Assemblée des Allobroges, réunie dans la cathédrale de Chambéry, déclare la fin du despotisme, la suppression des droits souverains de la maison de Savoie, de la noblesse, des redevances et droits seigneuriaux, de la milice et la création du département du Mont-Blanc où Annecy n'est que chef-lieu de district. Une municipalité républicaine, avec à sa tête l'avocat Jean-François Favre, est élue, mais le véritable pouvoir demeure entre les mains de la société jacobine des Amis de la liberté et de l'égalité qui compte 110 membres, toute la bourgeoisie de la ville. L'accueil fait aux troupes françaises a été de prime abord plutôt enthousiaste, car les hauts fonctionnaires ont pris la fuite et les habitants ont le réel sentiment d'être libérés. Cependant, la mobilisation en masse des hommes, les réquisitions militaires payées en assignats dévalorisés, l'augmentation des impôts, la crise économique consécutive à l'exil des nobles et des religieux car 90 % des prêtres sont réfractaires, la politique antireligieuse des représentants de la Révolution, la répression du représentant en mission Albitte qui pratique emprisonnement des suspects, déchristianisation : interdiction du culte catholique, fermeture et saccage des églises, destruction des insignes et des objets du culte, clochers, cloches, croix, etc.. finissent par exaspérer la population et la poussent à se révolter (près d'Annecy, émeutes de Faverges, de Thorens, révolte de Thônes : 86 morts...).
En 1797, sous le Directoire, les colonnes mobiles du général Pouget pourchassent les déserteurs et les prêtres insermentés (70 sont déportés en Guyane). En revanche, durant cette période, les importants marchés de France sont accessibles, les capitaux genevois disponibles et ainsi de nombreuses fabriques s'installent au bord du Thiou (notamment à Cran, au bas de la colline de Gevrier) pour profiter de la force hydraulique et du savoir-faire industriel des Annéciens. En effet, dès la fin du XVe siècle, à l'intérieur d'un enclos fortifié d'une douzaine d'hectares, la ville (qui avait déjà près de deux mille habitants) avait affirmé son importance administrative, commerciale et artisanale (surtout dans le textile et la métallurgie grâce aux "artifices" hydrauliques sur le Thiou). À partir de 1795, l'industrie textile se développe fortement grâce à des Genevois comme Jean-Samuel Farzy qui charge son compatriote Poncet d'établir une fabrique d'indiennes à Annecy. En 1811, la manufacture de coton emploie un millier d'ouvriers. En 1815, une grande fête célèbre la réintégration d'Annecy au sein du royaume de Piémont-Sardaigne (les ducs de Savoie étant devenus rois de Sardaigne vers 1720). En 1822, la ville, capitale de la province du Genevois, recouvre son siège épiscopal avec un diocèse en son nom propre : Annecy et non plus Genève-Annecy. En 1842, Annecy accueille l'une des deux intendances générales du duché de Savoie. En 1860, juste avant l'annexion de la Savoie à la France, la ville compte environ dix mille habitants. La période sarde de 1815 à 1860 est marquée par de grands travaux d'urbanisme (assainissement, percement et pavage de rues, de places, construction de ponts, de quais et d'immeubles, notamment l'hôtel de ville en 1848, aménagement de la rive du lac : création du Jardin public, de l'ile des Cygnes, du pont des Amours, de l'avenue d'Albigny et du champ de Mars...), par une modernisation certaine (eau potable, éclairage au gaz...) et par un important essor économique (en 1850, institution de la Banque de Savoie ; en 1858, la manufacture de coton emploie deux mille personnes...) : Annecy devient un des plus grands centres manufacturiers du royaume...