Histoire de l'ille-et-vilaine
Le chef-lieu du département d'Ille-et-Vilaine
a été autrefois la capitale de la Bretagne. Nous allons, à son
occasion, tracer une rapide esquisse de l'histoire de cette
province ; ce sera évidemment faire en même temps l'histoire
du département.
La Bretagne jouit d'une grande renommée.
C'est un pays qui attire l'attention, qui impose, qui saisit
par le caractère original du sol et des habitants, par sa destinée
singulière, Presqu'île poussée au milieu de l'Atlantique par
les dernières ramifications des montagnes européennes; éloignée
de tous les foyers de la civilisation antique; noyée au milieu
des brumes de l'Océan aussi bien que cette Cornouailles d'Angleterre,
sa sœur, qui lui envoya tant de fois des habitants ; sol de
granit qui ne soutient le choc éternel des flots de l'Océan,
à son extrémité, que par un indestructible entassement de rochers
fertile seulement sur ses bords, tout autour, le long de la
mer, tandis que le milieu traversé dans sa longueur par la double
chaîne des montagnes Noires et des monts d'Arrée, l'échine de
la Bretagne, comme les appellent les paysans bretons, ne renferme
guère que ces landes couvertes de genêts et d'ajoncs, qui sont,
dans la province, aux terres cultivées comme 27 est à 100.
Un moine comparait la Bretagne à la couronne de sa tonsure.
Une population celtique l'occupait avant l'invasion romaine.
Elle l'avait nommée, dans sa langue,
Armorique, c'est-à-dire pays de la mer. Elle se divisait elle-même
en plusieurs peuplades ou cités Curiosolites, dans le pays où
s'élève Dinan Diablintes, sur le territoire d'Aleth et Dol,
avec une portion de la Normandie Rhedones, au confluent de l'Ille
et de la Vilaine ; Namnètes, sur la Loire, là où est Nantes
Lexobiens, dans le pays qu'on appelait Dumnonie (Tréguier et
Saint-Brieuc) ; Osismiens, dans le Finistère, où ils avaient
fondé Kemper et Léon; Vénètes, enfin, dans le Morbihan, la cité
la plus puissante
. Les cités armoricaines, suivant l'usage
celtique, se divisaient en tribus, semblables aux clans d'Écosse,
et en familles, dont les chefs étaient comme autant de petits
souverains. C'étaient les mactierns et les tierns, dont les
dignités subsistèrent jusqu'au XIème siècle. Une
assemblée et un tribunal, composé des principaux membres de
la tribu décidaient les affaires et les causes importantes,
Dans les circonstances difficiles, seulement, les cités armoricaines,
comme les peuples de la Grande-Bretagne, élisaient un penteyrn
ou brenkin.
L'Armorique avait une grande importance dans
le monde celtique. Elle était pour la Gaule le sanctuaire sombre
et redouté du druidisme, dont les monuments mystérieux et étranges
couvrent son sol encore aujourd'hui. Des relations fréquentes
la rattachaient à la Grande-Bretagne, métropole, en quelque
sorte, du druidisme. César ne soumit pas sans difficulté l'Armorique.
Elle fournit 36 000 combattants à l'armée de 266 000 hommes
que la Gaule opposa au conquérant. Elle parut d'abord se soumettre
dès la simple apparition du lieutenant Crassus. Mais, l'hiver
suivant, tandis que César était en Italie les cités armoricaines
se coalisèrent, refusèrent les vivres sur lesquels comptaient
les légions et se révoltèrent. César accourut et triompha par
son génie malgré les efforts des Vénètes, réfugiés sur leurs
énormes vaisseaux. Les Romains occupèrent fortement l'Armorique,
en établissant des garnisons à Léon, à Kemper, à Carhaix, et
même dans les solitudes des monts d'Arrée. Ils la firent entrer
dans la IIIème Lyonnaise, et ne cessèrent point de
lutter contre l'esprit d'indépendance des habitants, surtout
contre la religion druidique, qui était l'âme de la résistance.
Jamais ils n'en purent triompher complètement, et aussitôt que
l'ébranlement de leur empire offrit à l'Armorique quelque espoir
de reconquérir cette indépendance, elle le saisit. Dès l'année
284, elle reçoit dans son sein une émigration venue de la Bretagne
une autre en 364 ; une troisième en 383, lorsque Maxime se fit
proclamer empereur dans la Grande-Bretagne. Maxime nomma gouverneur
de l'Armorique un de ses lieutenants, Mériadec, qui prit part
à ses victoires, et qui, après sa chute, attira sur le continent
les Bretons qui avaient servi la cause malheureuse de l'usurpateur.
Théodose, pour se concilier les chefs de l'Armorique confirma
la distribution de terres faites par lui aux Bretons fugitifs,
qui furent appelés Bretons Lètes : et ce nom a été transporté
à la Bretagne par certains auteurs, qui l'ont surnommée pays
de Létanie.
L'invasion barbare du commencement du Vème
siècle servit de signal à l'Armorique et à la Bretagne pour
se révolter de concert, vers 409, et pour reprendre leur ancienne
organisation, ce que Zosime exprime par ces mots « S'érigèrent
en république ». Il Un peu plus tard, en 418, les Bretons, incapables
de défendre seuls cette indépendance reconquise, et forcés de
fuir devant les incursions des Pictes et des Scots, émigrèrent
chez les Armoricains. Ceux-ci accueillirent avec bienveillance
cette invasion amie, et c'est de ce moment que leur pays prit
le nom de Bretagne, tandis ,que l'île qui l'avait porté jusque-là
reçut bientôt après celui d'Angleterre, d'une des populations
nouvelles, les Angles, qui s'y établirent. L'empire romain n'avait
pu déraciner la religion druidique quand il tomba, des collèges
de druides existaient encore en Bretagne.
Mais là, comme
partout ailleurs il avait servi d'introducteur au christianisme,
qui allait triompher de ce qui avait résisté aux efforts du
polythéisme romain. Dès la fin du IIIèmesiècle après
J.-C., saint Clair prêchait en Armorique. L'Évangile trouvait
alors plus d'obstacles chez les magistrats romains que chez
les 64, druides; la chutede l'empire, au lieu d'arrêter ses
progrès, ne fit donc que les aider dans la Bretagne, Des collèges
druidiques devinrent des couvents, et des archidruides devinrent
des évêques. L'Église, au reste, avait l'habileté de faire les
plus larges concessions à l'opiniâtreté religieuse des peuples
conquis, et ce ne fut que longtemps après qu'elle se montra
sévère contre les superstitions introduites par eux dans son
dogme ou dans ses pratiques au VIIème siècle le concile
de Nantes ordonna de briser les pierres et d'arracher les arbres
autour desquels les paysans se rassemblaient encore dans un
but d'idolâtrie, Délivrée de l'empire romain, l'Armorique, que
nous appellerons désormais Bretagne eut à se défendre contre
les barbares Alains, Wisigoths, Francs, l'attaquèrent tour à
tour; tantôt elle fut envahie, tantôt elle repoussa les agresseurs
et les poursuivit jusque sur leur territoire. Les principaux
défenseurs du pays sortirent, de la Cornouailles, sans que cette
partie de la Bretagne établit pourtant sa supériorité sur les
autres. La péninsule était une sorte d'heptarchie formée des
pays d'Aleth, de Tréguier de Goëllo, de Léon, de Cornouailles,
de Vannes. Le grand choc de l'invasion barbare avait porté aussi
bien sur les Bretons de l'île que sur ceux de la péninsule.
Ceux qui n'avaient pas émigré auparavant, devant les attaques
des Pictes et des Scots, émigrèrent cette fois devant les Saxons,
après avoir longtemps résisté.
Le héros de cette résistance
nationale fut Arthur, que la tradition fait sortir de son île
et voyager dans la Bretagne continentale Arthur toujours attendu
par les Bretons et si célèbre au moyen âge avec la Table ronde.
L'est de la Bretagne fut seul soumis par les Francs. Clotaire
1er occupait Rennes, Nantes, Aleth, et imposait sa
suzeraineté même au comte de Léon. Chilpéric, son successeur,
recevait un tribut du comte de Vannes.
La diversion produite
par les guerres de la Neustrie et de l'Austrasie délivra la
Bretagne, et Charlemagne eut à la reconquérir. Ce n'est que
par trois expéditions, dont la dernière surtout fut considérable,
qu'il y réussit ; conquête fort imparfaite, puisqu'il n'inscrivit
pas la Bretagne dans son dernier testament. A peine fut-il mort,
que les Bretons proclamèrent de nouveau leur indépendance, et
tentèrent de se donner de l'unité en nommant roi un de leurs
mactierns, Jarnithin. Jarnithin n'eut point de successeur immédiat
quoiqu'il eût deux fils, ce qui prouve le peu de consistance
de cette royauté non héréditaire. Morvan, comte de Léon et de
Cornouailles, qui fut élu roi en 818, est resté populaire à
cause de sa lutte contre Louis le Débonnaire, il tomba sous
la fraancisque, comme dit le poète chroniqueur de l'époque,
et les Francs pénétrèrent dans les épaisses forêts de la Bretagne.
Nouvelle révolte sous Wiemarch, successeur de Morvan, et comblé
en vain des présents de l'empereur. Enfin Louis le Débonnaire
donna le gouvernement de la Bretagne à Noménoë, qu'il avait
précédemment nommé comte de Vannes, et ce Noménoë servit avec
plus d'habileté que les Bretons eux-mêmes la cause de l'indépendance
bretonne, en faisant de sa vie deux parts tant que vécut Louis
le Débonnaire il lui resta fidèle et ne se servit de l'autorité
qu'il avait reçue que pour donner force et unité au pays par
une bonne administration ; puis, Louis mort, il se considéra
comme dégagé du serment qu'il lui avait prêté, et, prenant le
titre de roi, il affranchit de la domination de Charles le Chauve
la Bretagne devenue redoutable.
Le petit-fils de Charlemagne,
battu sur les bords de la Vilaine, se retira en 845. Ses successeurs
ne furent pas sans faire de nouvelles tentatives elles n'eurent
point de succès, et, ce qu'ils purent faire de mieux, ce fut-de
ramener indirectement la Bretagne sous leur dépendance. Charles
le Simple, en effet, donna la suzeraineté des terres bretonnes
à Rollon, devenu son vassal comme duc de Normandie, en 912.
Les patriotes bretons ne veulent point, il est vrai, que ce
mot terres bretonnes désigne, dans le traité de Saint-Clair-sur-Epte,
la Bretagne, mais seulement le pays d'Avranches, de Coutances,
et quelques districts des- comtés de Rennes et de Nantes, conquis
par les rois francs. Cette opinion, appuyée sur de graves autorités,
est très probable. Mais ce qui est aussi très certain, c'est
que cette extension du mot terres bretonnes à toute la Bretagne
eut lieu de fort bonne heure, puisque les rois d'Angleterre
et les rois de France se considérèrent successivement comme
suzerains de la Bretagne, par l'intermédiaire du duché de Normandie.
Arrière-fief de la France, la Bretagne le devint de l'Angleterre
après la conquête de ce pays par les Normands, et le redevint
de la France après la conquête de la Normandie par Philippe-Auguste.
L'hommage que prêtaient les ducs de Bretagne n'était point lige,
comme le fit si bien entendre le duc François II à Louis XI
« Monseigneur, tel hommage que mes prédécesseurs vous ont fait
je vous le fais, mais ne l'entends et ne vous le fais point
lige. » Les descendants de Noménoë régnèrent jusqu'en 874. Le
dernier fut Salomon III. Ils avaient été sans cesse inquiétés
par les Normands, contre lesquels plusieurs d'entre eux avaient
lutté avec énergie.
Alain Barbe-Torte, héritier, par les
femmes, des souverains précédents, donna naissance à une dynastie
nouvelle. Constance, fille de Conan IV, porta ensuite le duché
aux Plantagenets, par son mariage avec Geoffroy, troisième fils
de Henri II (1164); puis, les Plantagenets s'étant éteints en
Bretagne avec Arthur, que son oncle Jean sans Terre fit périr,
l'héritière Alix épousa Pierre de Dreux, petit-fils de Louis
le Gros par une branche cadette en1212, et de Pierre de Dreux
sortit la dynastie qui eut pour derniers représentants les derniers
souverains de Bretagne, François II et Anne qui épousa Charles
VIII. Dans cet intervalle prit place la rivalité de Charles
de Blois et de Jean de Montfort, épisode considérable de la
guerre de Cent ans. Ce sanglant débat, qui livra longtemps la
Bretagne à l'influence anglaise, eut pour cause une question
de succession en ligne collatérale. Jeanne de Penthièvre avait
des droits supérieurs à ceux de Monfort ; mais celui-ci prétendait
la précéder en sa qualité de mâle, en quoi il méconnaissait
le caractère féodal du duché de Bretagne, où les femmes ont
toujours succédé. La plupart des grands seigneurs féodaux ont
réussi, au moyen âge, aussi bien que les rois, à réduire leurs
vassaux. Les ducs de Bretagne commencèrent leur tâche de très
bonne heure et y travaillèrent avec beaucoup d'énergie et d'habileté.
Alain Barbe-Torte et ses successeurs agrandirent le domaine
ducal des comtés de Rennes, de Nantes, de Cornouailles, de Léon,
de Vannes ; Pierre de Dreux entra en lutte ouverte avec le clergé
et la noblesse de Bretagne et remporta une victoire signalée.
L'autorité des ducs fut depuis ce temps presque absolue, réserve
faite toutefois de la large part d'indépendance revendiquée
et retenue sans cesse par les illustres familles bretonnes.
Contre celles-ci, les ducs s'appuyèrent quelquefois sur la bourgeoisie.
Conan III affranchit plusieurs communes. Cependant, si l'on
excepte Morlaix et Saint-Malo, les municipalités bretonnes eurent
rarement le caractère démocratique et révolutionnaire des communes
du nord-est de la France.
Le tiers état fut admis dans l'assemblée
des états de la province, à peu près dans le même temps qu'en
France dans l'assemblée des états généraux; ce qui montre avec
quel ensemble ce progrès s'accomplissait dans toutes les parties
de notre pays. C'est à l'assemblée, de Ploërmel, en 1309, que
parurent pour la première fois les députés du tiers état breton.
Les législateurs de la Bretagne sont Hoël le Grand à qui remonte
le droit coutumier de la province, Jean II et Jean III, qui
fit réunir toutes les coutumes du pays avec des emprunts aux
établissements de saint Louis.
Divers pays avaient, en outre,
leurs usances particulières.
Aujourd'hui, la Bretagne est
complètement entrée dans la grande unité française. Quoique
peu de provinces aient autant résisté par les armes, par l'esprit,
par les mœurs et par le langage à cette incorporation, elle
a fini par céder et par consentir à ne plus s'appeler province
pour porter les noms des cinq départements du Finistère, des
Côtes-du- Nord, du Morbihan, de la Loire-Inférieure et d'Ille-et-Vilaine.
Ce dernier, qui nous occupe, est le plus oriental des cinq départements
bretons, et il s'étend au nord jusqu'è la mer, où il comprend
le littoral depuis le Couesnon jusqu'au delà de Saint-Malo.
Depuis plus d'un quart de siècle, sa vie intérieure n'a été
troublée par aucun événement important; son éloignement du cœur
du pays l'a préservé des commotions violentes qui ont agité
la France en 1870-1871. Toutefois, ses enfants n'ont pas été
les derniers à verser leur sang pour la patrie en danger, et
les mobiles d'Ille-et-Vilaine ont glorieusement pris part aux
combats livrés, sous les murs de Paris, contre l'ennemi commun.
Un problème identitaire a agité les esprits du conseil général en 1989, qui aurait alors souhaité rebaptiser le département en « Marche-de-Bretagne », ce à quoi la DDE s’est opposé et qui n’a pas fait l’unanimité des habitants. En 2005, après de longues réflexions, un nouveau projet a été proposé à la consultation populaire par questionnaire : « Haute-Bretagne ». Il a été refusé par 75 % des répondants. Devant ce résultat, le conseil général a renoncé à ce projet qu’avait avancé le comité départemental du tourisme.
Rennes
Rennes est une ancienne ville des Gaules,
dont les itinéraires font mention sous le nom de Condate. C'était
autrefois la capitale des Rhedones, peuple de l'Armorique. Ptolémée,
l'Itinéraire d'Autonin et la Table de Peutinger font mention
de Condate, qui fut depuis appelé Rhedones, dont on a fait Rennes.
Une route qui part de Juhonnagus, aujourd’hui Angers, détermine
la position de cette ville à Rennes.
À son apogée au IIème
siècle, lors de la période gallo-romaine, la ville est un centre
urbain important qui s’étend sur 90 ha sur les hauteurs dominant
le confluent de l’Ille et de la Vilaine. Les invasions barbares
vont conduire la ville à se resserrer sur une superficie de
9 ha au sein d’une enceinte longue de 1 200 mètres.
Sous
les Romains elle faisait partie de la troisième Lyonnaise, dont
Tours était la capitale. Après la chute de l'empire romain,
les Bretons s'en emparèrent et formèrent, par la suite, un Etat
indépendant, sous le régime des ducs de Bretagne. Plus tard,
les longues, discussions des évêques, les prétentions ridicules
des rois français de la seconde race sur ce pays, et les droits
de souveraineté que les ducs de Normandie voulurent s'arroger
longtemps sur les ducs de Bretagne, occupent l'histoire pendant
plusieurs siècles. D'erreurs en erreurs, et souvent de crimes
en crimes, ces ducs gouvernèrent depuis 458, à peu près, jusqu'en
1491, où Anne de Bretagne épousa Charles VIII
Pendant les guerres qui agitèrent la
Bretagne avant qu'elle fût devenue province française, Rennes
soutint plusieurs sièges : Charles le Chauve tenta, sans succès,
de prendre cette ville en 843; Pasquiten, compétiteur de Gurvand
à la souveraineté de la Bretagne, l'assiégea en 874, et Conan
le Petit, assisté de troupes anglaises, en 1155. Au commencement
de là guerre qui éclata entre Jean de Montfort et Charles de
Blois, Rennes fut successivement pris et repris par ces deux
rivaux. Les Anglais se présentèrent vainement devant ses murs
eu 1342. Le duc de Lancastre, allié de Montfort, ne fut pas
plus heureux en 1356 : à la suite de plusieurs actions sanglantes
du Guesclin, qui y commandait, l'obligea d'en lever le siège,
neuf mois après l'avoir entrepris. En 1491, Charles VIII assiégea
cette cité, mais le mariage de ce monarque avec la duchesse
Anne rendit à la Bretagne une partie de sa tranquillité.
Les Bretons,, réunis à la France, conservèrent plusieurs formes
de leur régime, entre autres les assemblées de leurs états,
à époques fixes. Après l'assassinat du duc et du cardinal de
Guise, ordonné par Henri III, les principales villes de France,
à l'instigation de la Ligue, se soulevèrent contre le roi. La
Bretagne imita cet, exemple, à l'exception de Rennes que lle
parlement retint dans l'obéissance. Le duc de Mercœur se mit
à la tête des ligueurs. Après s'être emparé du château de Nantes,
qui lui fut livré par, trahison, il résolut aussitôt de s'emparer
de Rennes, où, malgré les instances du parlement, il fit entrer,
ses troupes. il.s'imàgina dès lors que Rennes était en son pouvoir
et partit pour s'emparer de Fougères, qui lui fut livré à prix
d'argent. Mais il apprit en-même temps qu'une révolution venait
de lui enlever la capitale du pays de sa plus précieuse conquête.
Guy, de Bréguigny, sénéchal de Rennes, avait parcouru la ville
aux cris de Vive le roi; les ligueurs effrayés se soumirent,
et lè parti royaliste reprit son autorité. Henri IV, voulant
pacifier la Bretagne,' et pensant qu'un voyage en ce pays était
à cet effet indispensable, vint à Rennes en 1598, où sa présence
eut bientôt dissipé le vieux levain de la Ligue.
Durant les tranquilles commencements
du règne de Louis XVI, la Bretagne fut paisible, les troubles
ne commencèrent à l'agiter qu'au moment où les ministres Brienne
et Lamoignion essayèrent de renouveler contre le parlement de
Paris le coup d'Etat exécuté quelques années auparavant par
Maupou. On sait comment le conseiller d'Espréménil parvint à
surprendre et divulguer les édits que le gouvernement préparait
à ce sujet dans le mystère le plus profond. Cette manifestation
d'un projet qui tendait à la ruine, de l'autorité parlementaire,
alors si chère à la nation, excita des troubles dans les provinces,
et surtout en Bretagne , où ils prirent de suite le caractère
le plus alarmant. Le 10 mai 1788, le comte de Thiard, lieutenant
général des armées du roi, commandant en chef dans-la province
de Bretagne, assisté de M. Bertrand de Molleville, intendant
de la province, se présenta au parlement, à huit heures du matin,
à l'effet d'y faire enregistrer plusieurs édits, au nombre desquels
était celui portant rétablissement de la cour plénière. L'entrée
du parlement lui ayant été refusée, il pénétra dans le palais
à la tête d'une compagnie de chasseurs Et menaça d'employer
la force. Pour, éviter une scène dangereuse aux citoyens, déjà
violemment agités, le président-ordonna d'ouvrir les portes.
Malgré les protestations du parlement, de la sénéchaussée, de
la maîtrise des eaux et forêts, de l'ordre des avocats, de la
communauté de la ville, de la faculté de droit, des dignitaires
du chapitre de la cathédrale et des officiers. De là milice
bourgeoise, le commandant, assisté de l'intendant.de la province,
fit son entrée dans l'assemblée , où, malgré la protestation
du président, il força les huissiers à transcrire sur le registre
de la compagnie, les édits dont il était porteur.
Cette nouvelle enceinte est achevée en
1452, mais déjà une autre extension est en cours.En 1449, le
duc François Ier prend la décision d’étendre les
murs de la ville au sud de la Vilaine. La « Nouvelle Ville »
ainsi protégée par les remparts est avant tout un ensemble de
terrains malsains et inondables où s’entasse une population
modeste. L’intérêt est pourtant réel d’assurer une protection
efficace des deux rives du fleuve et de protéger les quartiers
industrieux. En 1473, cette enceinte est à son tour achevée.
La ville s’étend alors sur 62 ha et compte environ 13 000 habitants.
C’est au cours de ce siècle que la ville s’embellit en se dotant
en 1467 de son premier monument civil : la tour de l’Horloge,
citée par François Rabelais dans Pantagruel. Après la fin de
l’indépendance bretonne, marquée par l’acte d’union de 1532,
le rôle administratif de Rennes s’accroît. En 1561, le parlement
de Bretagne se fixe dans la ville. Le palais du parlement est
édifié entre 1618 et 1655. En parallèle, la ville se transforme
profondément grâce aux nombreux hôtels particuliers édifiés
pour les « messieurs du parlement », comme les hôtels de La
Noue et Racape de La Feuillée, édifiés sur la place des Lices
en 1658. La ville s’embellit ainsi au cours du XVIIème
siècle mais reste enserrée dans ses remparts et les bâtiments
sont pour l’essentiel construits en bois. Lors de la nuit du
23 décembre 1720, la ville s’embrase. Pendant six jours, l’incendie
va ravager le centre-ville : près de 10 ha sont touchés, 945
bâtiments sont détruits. Au total, on estime que le grand incendie
a coûté 9 millions de livres aux particuliers.
La reconstruction de la ville est l’occasion
de mettre en application les idées des urbanistes de l’époque
; les vues doivent être dégagées et les rues plus larges. Avant
tout, il s’agit à tout prix d’éviter un nouvel incendie. Pour
mener à bien ce chantier, l’intendant de la ville s’adresse
à Isaac Robelin, un ingénieur militaire directeur des fortifications
à Brest. Cependant son projet présenté au Conseil le 27 août
1722 ne convainc pas, notamment en raison de ses vues radicales
qui heurtent les nobles de la ville.
En 1724, c’est l’architecte Jacques V
Gabriel, plus diplomate, qui est finalement chargé de la reconstruction
Dans les grandes lignes, le plan ambitieux de Robelin est
conservé : la partie incendiée de la ville est totalement réorganisée
selon un plan en damier avec des îlots carrés d’environ 65 m
de côté et des voies de 10 m de large. Les immeubles sont construits
en pierre (granit pour le rez-de-chaussée et étages en tuffeau)
et les toits sont couverts d’ardoises. La ville s’organise autour
de deux places disposées en quinconce : la place Royale où trône
le parlement de Bretagne et la place Neuve dominée par la mairie,
moins monumentale et obéissant à des canons moins rigoureux
que sa voisine.
Fougères
La création de Fougères remonte au Moyen
Âge. On retrouve la première mention du château de Fougères
vers la fin du Xème siècle. C'était à l'époque une
simple fortification en bois située sur une crête rocheuse,
dont la position dominait avantageusement la vallée du Nançon
et les marais environnants.
À partir du XIIème
siècle, la population s'éloigne de la rive du Nançon et la ville
se développe plus en hauteur, partagée en deux paroisses : Saint-Sulpice
pour la ville basse et Saint-Léonard pour la ville haute.
Dès le Moyen Âge, l'activité artisanale se développe autour
de la tannerie, des tisserands et des drapiers dans la ville
basse. Bâtie au XIème siècle par les seigneurs de
Fougères, la première fortification, défendue par Raoul II (1130-1194),
est prise par Henri II Plantagenêt en 1166 et détruite.
Raoul II, obstiné, la fera reconstruire
en plus imposante, et elle deviendra une place forte défendant
les frontières de la Bretagne. Cependant, la position géographique
et les intérêts des seigneurs de Fougères les font souvent pencher
en faveur du royaume de France. Quand Raoul III offre sa possession
à saint Louis, le prince breton Pierre Mauclerc s'empare de
la ville en 1231, qui sera ensuite reprise par le roi. La fille
de Raoul III, Jeanne de Fougères, mariée à Hugues XII de Lusignan,
entreprendra de nouveaux travaux de fortification et embellira
la ville.
La fin du XIIIème siècle est une période
de paix et de prospérité pour Fougères. En 1307, Philippe le
Bel rachète le domaine mais le royaume de France ne s'y intéresse
guère et ne l'entretient pas. Après divers combats et retournements
d'alliances, Bertrand Du Guesclin y pénètre en 1373, mais la
situation ne s'améliore pas.
Livrée à elle-même et victime du pillage,
la population de Fougères demande assistance au duché de Bretagne.
Elle rentre dans son giron en 1428, vendue par Jean II d'Alençon.
Mais en 1449, un dénommé François de Surienne, un mercenaire
aragonais au service des Anglais, s'en empare et la met à sac,
et ce, dans le but de forcer la Bretagne à s'allier à l'Angleterre.
Il y a de nombreux massacres, ce qui provoque la réaction de
François Ier de Bretagne, bien décidé à se débarrasser des Anglais.
Le duc de Bretagne s'allie à Charles VII de France, attaque
le sud de la Normandie et met le siège devant Fougères. Surienne
et ses hommes parviennent toutefois à résister et se rendent
sous condition de pouvoir repartir libres.
Cet épisode annonce
la bataille de Formigny. Finalement La Trémoille, général français,
s'empare de Fougères en 1488, lors de la guerre folle.
Redon
Découvrant le confluent de la Vilaine
et de l’Oust du haut d’une colline, l’archidiacre du diocèse
de Vannes, et ses disciples constatent tout l’intérêt du lieu
: un site protégé des invasions et calme, idéal pour la méditation.
Conwoïon obtient de Ratvili, seigneur du lieu, la donation d’un
espace suffisant pour installer le monastère. En 832, un modeste
ermitage fait de planches et de branches voit le jour. Nominoë,
alors gouverneur de Bretagne, soutient cette fondation pour
renforcer son pouvoir. Entre 842 et 853, une première église
en pierres est construite remplaçant ainsi la première bâtisse.
Une population s’installe peu à peu autour des bâtiments
conventuels, le territoire monastique s’agrandit et donne naissance
à une paroisse. Après l’an mil, l’église devient trop petite.
La construction d’un édifice plus grand est envisagée. La ville
va se développer autour de ce centre religieux jusqu'à former
une petite bourgade rurale et industriell
Au Moyen Âge, Redon
va bénéficier du commerce maritime grâce à sa situation sur
la Vilaine.
Au XIVème siècle, est entreprise la
construction de l'enceinte fortifiée de la ville, sous l'égide
de l'abbé Jean de Tréal. Elle comporte 3 portes, 3 poternes
et 13 tours.
Redon est l'une des 42 villes de Bretagne qui
envoyaient des députés au Parlement de Bretagne . Les États
se réunirent d'ailleurs 5 fois à Redon, aux XVème
et XVIIème siècles.
En 1449, le duc François Ier obtint du
pape Eugène IV l'érection de Redon en évêché par bulle pontificale
le 10 juin 1449. Le duc aimait Redon, et le fait qu'il voulait
y être enterré expliquerait qu'il ait voulu récompenser l'abbaye
de ses services. Mais les protestations des évêques voisins
de Rennes, Vannes et Nantes, sur les territoires desquels le
nouveau diocèse devait prendre son assise, firent avorter l'initiative.
La bulle de suppression fut signé le 20 décembre 1449 par le
même souverain pontife.
Pendant la minorité de la duchesse
Anne de Bretagne, la cour ducale s'établit pendant quelque temps
à Redon, à la fin de 1488. En février 1489, le roi d'Angleterre
Henri VII conclut avec la jeune duchesse - elle n'a que 12 ans
- le "traité de Redon" aux termes duquel il s'engage à lui apporter
une aide militaire si un conflit devait l'opposer à la France.
L'histoire évoluera autrement, puisque Anne épousera deux ans
plus tard le roi de France, Charles VIII. Autour de l'abbaye,
les activités artisanales et commerciales se sont développées.
Dès le XVIe siècle, la Vilaine est canalisée, favorisant
ainsi le développement portuaire. En effet, les navires de mer
peuvent remonter jusqu'à Redon, alors avant-port de Rennes.
Accostés au port de Vilaine, soumis alors à la marée, les navires
peuvent décharger leurs cargaisons à terre ou bien transborder
les marchandises sur des barges et bateaux fluviaux qui remontent
ensuite la rivière jusqu'à Rennes.
À la Révolution, trois
couvents fonctionnaient encore à Redon : un de bénédictins,
un de calvairiennes, et un d’ursulines. En février 1791, la
première société populaire est fondée à Redon : elle est la
seule du district, même si plusieurs habitants des communes
du district se sont affiliés à titre individue. Avec la constitution
civile du clergé, les ordres religieux sont supprimés. Les moines
et les moniales sont relevés de leur vœux (13 février 1790),
et peuvent quitter leurs monastères. Sur les 9 bénédictins,
seuls trois choisissent de rester dans les ordres. Les Chouans
menacent Redon en mars 1793 : c’est le général Beysser qui écarte
le danger. Plus tard dans l’année, c’est Hoche qui à nouveau
sauve la ville du pillage.
La nouvelle du 9-Thermidor et
de la chute de Robespierre est accueillie avec de grandes manifestations
de joie ; peu après, l’ensemble des administrations sont épurées
(vendémiaire an IV)12 et l’église de Redon est rendue au culte
le 8 prairial an III. Mais la commune reste relativement favorable
à la Révolution et à ses avancées, comme le montre la fréquentation
des fêtes : l’anniversaire de la prise de la Bastille est célébré
en 1794 et encore en 1799, à la fin de la Révolution, avec peu
de monde ; l’anniversaire de l’exécution de Louis XVI, une des
fêtes les plus populaires, est instituée en 1795 et bien suivie
dans le département, et notamment à Redon ; une fête rare, la
fête du Malheur, est organisée à Redon le 30 décembre 1794.
Saint-Malo
L'histoire de Saint-Malo remonte à l'époque
gauloise: Les Coriosolites occupent en premier les lieux. Sous
l'influence romaine, la ville de Corseul ce qui signifie dans
les terres se développe aux dépens de la cité d'Alet mais Alet
demeure un port important au point qu' à la fin du IIIème
siècle les Romains choisissent de le fortifier. À cette époque,
face à Alet, l'île de la future Saint-Malo est encore inhabitée.
Le 16 janvier 423, lors du retrait de l'armée romaine , Alet
subit de nombreuses attaques venues du Nord.
C'est ensuite
que saint Maclow, venant de l'actuel Pays de Galles, s'installe
sur le rocher qui prendra le nom de rocher de Saint-Malo en
541.
Alet continue de se développer jusqu'à la fin du premier
millénaire où, après plusieurs attaques des Normands, la ville
est durablement affaiblie. Au milieu de XIIème siècle,
le siège épiscopal d'Alet est déplacé sur le rocher de Saint-Malo,
mais on ne sait si l'arrivée de l'évêque précède ou suit la
première urbanisation de Saint-Malo.
Cet événement marque
néanmoins la fin de la grandeur d'Alet. Désormais, la position
stratégique du port est l'objet de conflits entre la Bretagne
et le royaume de France. Saint-Malo sera ainsi rattachée provisoirement
à la France de 1395 à 1415, restituée au duc de Bretagne de
1415 à 1488, puis à nouveau intégrée à la France en 1488. Entre
le 11/03/1590 et 5/12/1594 elle se proclame La République de
Saint-Malo- revenant à l'issue de cette période dans le giron
des rois de France.
Saint-Malo et Saint-Servan furent reliés,
de 1873 à 1922, par un Pont roulant marin. C'est avec la découverte
des Amériques et le développement des échanges commerciaux avec
les Indes que Saint-Malo prend son envol économique et s'enhardit
considérablement. Les armateurs deviennent plus nombreux et
des personnages de cette époque font la renommée de la ville.
Jacques Cartier découvre et explore le Canada, les corsaires
harcèlent les marines marchandes et militaires ennemies, tels
Duguay-Trouin, puis un peu plus tard Surcouf. D'autres s'illustrent
dans les sciences, tel Maupertuis, ou dans les lettres et la
politique comme Chateaubriand. Modification du style de vie,
les armateurs se font construire de belles demeures particulières
appelées Malouinières.
L'essor de Saint-Malo est affecté
par la Révolution française qui ne l'épargne pas. L'épisode
le plus dramatique fut la fusillade dans les dunes du Talard
de 60 "contre-révolutionnaires" de l'armée vendéenne en décembre
1793. Le plus jeune avait 16 ans, la plus jeune 19.
La pêche
errante , la Grande Pêche, sur les bancs de Terre-Neuve se développe.
Le tourisme balnéaire commence très tôt. C'est en 1838 que s'intalle
le premier établissement de bains ainsi que le tourisme littéraire
et artistique avec la mise en place du tombeau de Chateaubriand
sur l’îlot du Grand Bé, 10 ans avant la mort de l’écrivain.
Durant la Seconde Guerre mondiale, Saint-Malo est particulièrement
touchée lors du débarquement des Alliés. Ces derniers mal renseignés
sur les effectifs de la garnison locale, bombardent massivement
le centre historique de la ville en 1944. La ville est dévastée
à 80 % par des bombes incendiaires. Sa reconstruction se fera
dans un style "historicisant" mais non "à l'identique" : les
remparts n’ayant pas été détruits, la ville est reconstruite
au sein de cet espace. Volonté étant de conserver autant que
possible à la cité historique sa silhouette traditionnelle,
les nouveaux édifices durent adopter le style ancien. Quelques
constructions en nombre limités , mais indispensables, purent
faire l’objet d’une reconstruction « à l’identiques » grâce
aux vieilles pierres récupérées , numérotées et remployées.
Saint-Malo est aujourd'hui un important centre touristique estival,
également port de commerce, de pêche et de plaisance