Le département de l'Orne est formé de la partie méridionale de la ci-devant province de Normandie, du Perche septentrional et de l'ex-duché d'Alençon. Son nom lui vient de la rivière de l'Orne, qui y prend sa source presque au centre, le traverse de l'est au nord-ouest, et va se jeter dans l'Océan dans le département du Calvados. Ses bornes sont : au nord, le département du Calvados ; au nord-ouest, celui de l'Eure ; à l'est, celui d'Eure-et-Loir ; au sud-est, celui de la Sarthe ; au sud-ouest, celui de la Mayenne ; à l'ouest, celui de la Manche. Le département de l'Orne est traversé dans toute sa longueur, de l'est à l'ouest, par une . chaîne de petites montagnes, pour la plupart couronnées de forêts et de bois épais, dont les points culminants n'ont pas plus de 600 mètres au-dessus du niveau de l'Océan. Partout son territoire est entrecoupé par des chaînes de petits coteaux qui donnent naissance à une multitude de vallées verdoyantes que sillonnent de grandes rivières ou leurs affluents.
En suivant la Touque, on trouve la vallée d'Orville; la Rille forme la vallée de l'Aigle; l'Ure, celles du Merlerault, de Nonant et du Pin ; le Don, celles qui vont de Godisson à Médavy ; la Thouanne, celle de Tauville à Mortrée ; l'Orne enfin, qui reçoit toutes ces rivières, offre les vallées où l'on trouve Aunou , Séez, Médavy, Argentan, la Courbe,-Ménil-Glaise et Putange. Quelques ruisseaux tombant dans la Sarthe passent aussi par de riches vallées ; une des plus remarquables, le long de cette rivière, est la vallée du Blesle-sur-Sarthe. Une autre rivière, l'Hume, offre aussi dans son cours et ses affluents de belles vallées, telles que celles de Mauves et de Regmalard. L'herbe des vallées ] du Merlerault et de Nonant fournit la plus grande partie des nombreux bestiaux qu'on y élève et qu'on, y engraisse sous la désignation de bœufs ou chevaux du Merlerault et de la plaine d'Alençon.
Note : ce site officiel
du ministère de la culture vous donne toutes
les informations relatives à tous les lieux
et objets inscrits au patrimoine de chaque commune
d'un département.
Superficie :610
300 ha
Population: 290 891 hab.(2009)
Dénsité :48 hab./km²
Nb de communes : 505
Le territoire du département
de l'Orne faisait partie de la Gaule celtique.
Les
peuples qui l'habitaient portaient le nom générique
à Aulerci.
C'est, semble-t-il, à Alençon que se
réunissaient les députés des trois tribus dont se composaient
leur fédération, et qui étaient les Aulerces Eburons,
capitale, Ebroïcum, Evreux ; les Aulerces Cénomans,
capitale, Sudinum, Le Mans ; les Aulerces Diablintes
; ceux-ci occupaient la plus grande partie du territoire
qui a formé le département de l'Orne.
A l'époque
où César vint asservir les Gaules, Crassus, son lieutenant,
pénétra dans le pays avec la 1ère légion,
et le soumit facilement.
Mais, plus tard, sous la
conduite de Viridovix, ces peuples et leurs voisins
se soulevèrent et mirent en péril le lieutenant de César,
Titurius Sabinus, qui était entré dans leur pays à la
première nouvelle de l'insurrection.
César raconte,
dans ses Commentaires, que l'armée de Viridovix s'était
grossie d'une foule de brigands, venus de tous les points
de la Gaule : c'est l'insulte ordinaire des oppresseurs,
qui ne se contentent pas d'écraser les opprimés, mais
veulent encore les déshonorer.
Sabinus, se trouvant
dans une position critique, fut obligé de se retrancher
dans un lieu fortifié. Entouré par l'armée de Viridovix,
qui lui offrit vainement la bataille, il encouragea
à dessein l'audace des assaillants, leur envoya même
un des Gaulois qui servaient dans ses troupes pour leur
dépeindre le découragement des Romains el les engager
à en profiler.
Les confédérés se décident à attaquer
Sabinus dans ses retranchements.
« Les Romains,
dit César, étaient campés sur une hauteur, d'une pente
douce et aisée, d'environ mille pas. Ces barbares la
montent en courant de toutes leurs forces, pour ne point
leur laisser le temps de se réunir et de s'armer, el
arrivent hors d'haleine au pied des retranchements.
Sabinus, après avoir par ses discours excité l'ardeur
de ses soldats, donne le signal.
Pendant que les
ennemis étaient embarrassés des fascines qu'ils portaient
pour combler les fossés, il ordonne une double sortie
par deux portes du camp. L'avantage de la position,
l'inexpérience et l'épuisement des barbares, la bravoure
de nos soldats et leur habitude de la guerre, furent
cause que l'ennemi ne soutint pas même le premier choc,
et prit aussitôt la fuite. »
Le carnage fut effroyable.
A l'époque de l'insurrection générale des Gaulois
excitée par Vercingétorix, nous retrouvons encore dans
les Commentaires de César les Aulerces payant bravement
leur dette à la patrie commune. Sous la conduite de
Camulogène, réunis aux Parisii, ils viennent offrir
la bataille à Sabinus, près de Lutèce. L'aile gauche
des Gaulois plia ; mais la droite, où se trouvait Camulogène,
résista intrépidement et succomba jusqu'au dernier homme.
Les Essui ou Sessui, habitants des environs de Sées,
étaient seuls restés tranquilles pendant ces insurrections.
César les favorisa aux dépens des populations moins
patientes et plus patriotiques des environs. Leur puissance
grandit rapidement sous la domination romaine.
Mais,
pendant IVème siècle de l'Ère chrétienne,
les Saxons, après avoir formé divers établissements
sur la côte, remontent l'Orne, ravagent et détruisent
tout sur le territoire des Essuins, et bâtissent, à
deux lieues d'Essoi, une nouvelle ville, Saxia ou Sées,
qui acquit bien- tôt une grande importance.
Les
Saxons ne lardèrent pas à se convertir au Christianisme,
et, parmi les évoques de Sées, on trouve les noms de
Sigisbold, de Saxobod, qui révèlent une origine saxonne.
Pendant l'effroyable désordre auquel les invasions
des Barbares livrèrent la Gaule, l'Armorique elles cités
voisines de la Manche formèrent, sous le nom de République
des cités armoricaines, une vaste confédération qui
maintint quelque temps son indépendance.
Ravagé
par les Alains et par une nouvelle invasion des Saxons,
le pays se soumit à Clovis.
Pendant la période suivante,
l'histoire de cette contrée reste fort obscure.
Nous trouvons que la plus grande partie de la région
dépend alors d'un archidiaconat nommé Hiesmois ou Oximisum,
dont le chef-lieu était Oximum ou Hiesme, maintenant
Exmes, bourg voisin d'Argentan.
Pendant cette période,
nous voyons grandir la puissance de Sées, à laquelle
succédera, vers le Xèmesiècle, celle d'Alençon.
Mais les Normands ont envahi le pays.
Le faible
Charles-le-Simple a été obligé de le céder à Rollon,
leur duc.
En 943, Richard Ier donne à
Yves de Creil ou de Bellême, dont il veut récompenser
les services, l'Alençonnais, le Passais normand et les
territoires de Sées et d'Argentan.
Yves de Creil
possédait déjà le Bellêmois, le Corbonnais, et la puissance
de sa famille se fonde définitivement sous son fils
Guillaume Ierde Bellême, qui, le premier,
prit le nom de Talvas, d'une sorte de bouclier qu'il
avait adopté.
C'est Guillaume Ier de
Bellême qui éleva les Châteaux de Sées, d'Alençon, de
Domfront.
Robert Ier, duc de Normandie,
voulant le punir de s'être déclaré contre lui dans la
guerre qu'il avait entreprise contre son frère et son
prédécesseur, Richard III, vint l'assiéger dans Alençon.
Le vieux Talvas fut obligé de capituler, et, une
selle mise sur le dos, de demander grâce au duc irrité.
Le Roman de Bon dit à ce sujet:
Son dos
offrit à chevaucher,
Ne se peut plus humilier.
Au prix de celte humiliation, le vieillard garda
ses possessions.
Ses quatre fils jurèrent de le
venger, mais furent défaits dans la Forêt de Blavon.
Guillaume perdit deux de ses fils dans cette guerre;
déjà malade, il mourut en recevant la nouvelle de leur
mort. L'aîné des deux fils de Guillaume Ier, Robert,
lui succéda; mais, fait prisonnier par le comte du Maine,
il fut tué à coups de hache dans sa prison. Son frère,
Guillaume II Talvas, le remplaça. Celui-ci reçut le
surnom de Talvas-le-Cruel, et le justifia. Il fait étrangler
sa femme Hildeburge, se remarie et invite à son banquet
de noces Guil- laume Giroie, chevalier loyal, qui avait
eu jadis des différends avec la famille de Talvas. Malgré
les représentations de son frère Raoul, Giroie se confie
à Talvas-le-Cruel et se .rend à ses noces. Au milieu
du festin, Talvas le fait saisir et part pour la chasse,
pendant que ses bourreaux ont, par son ordre, crevé
les yeux, coupé le nez-et les oreilles du malheureux
Giroie, qui est jeté en prison. La Tour où il fut renfermé,
et qui se voyait encore un peu avant la Révolution de
1789, à l'entrée du Château d'Alençon, avait gardé le
nom de Tour de Giroie. Mais la vengeance s'appesantit
bientôt sur cette horrible famille des Talvas. Le fils
de Guillaume II, Arnould, chasse son père de ses domaines.
Il est lui-même étranglé dans son lit. Talvas-le-Cruel
meurt à Domfront en 1052.
Quatre années auparavant,
profitant de l'horreur qu'inspirait cet homme, le comte
d'Anjou s'était emparé d'Alençon.
Guillaume-le-Conquérant,
duc de Normandie, vint lui-même pour reprendre la ville.
Quand il s'approcha des Murs, les Angevins, qui les
défendaient, se mirent à railler le jeune duc, criant
à la manière des pelletiers : « A la pel ! à la pel
! » allusion au métier que faisait le grand-père de
Guillaume, un pelletier de Falaise dont Robert de Normandie
avait séduit la fille. Guillaume le Bâtard jura « par
la resplendeur de Dieu » qu'il se vengerait, et il tint
parole. Les trentre premiers Angevins qu'il put saisir
eurent les mains et tes pieds coupés : la ville, effrayée,
se rendit.
Mabille de Bellême, fille de Talvas-le-Cruel
et héritière de son duché, avait épousé Robert de Montgomery.
Robert étant parti pour l'Angleterre, sa femme,
atroce comme toute sa famille, régna par le fer et le
poison. Elle tenta d'empoisonner Ernauld, le chef de
la maison rivale de Giroie. Celui-ci ayant refusé le
verre de vin qu'on lui présentait, un de ses compagnons,
le frère de Montgomery, Gilbert, le prit sans défiance
et mourut, trois jours après, du poison qui ne lui était
pas destiné. Mabille réussit pourtant à faire empoisonner
Ernauld par son chambellan.
Mabille périt au Château
de Barre-sur-Dive, propriété de l'un de ses fils. Elle
s'était endormie après avoir pris un bain. On la trouva
la tête coupée.
On soumit un gentilhomme que l'on
soupçonnait, Pantol, à l'épreuve du feu : il la subit
victorieusement.
On sut depuis que l'auteur du meurtre
était Hugues de Sangey, que Mabille avait dépossédé
; celui-ci s'était introduit furtivement dans le Château
de Barre pendant son sommeil, s'était vengé et était
parti aussitôt pour l'Italie, refuge ordinaire, à cette
époque, de tous les aventuriers et de tous ceux qu'un
meurtre éloignait de leur pays.
Les Montgomery,
en héritant de la seigneurie des Talvas, semblaient
avoir hérité de leur cruauté.
Leur histoire est
aussi monotone que sanglante, et ce que nous en avons
dit plus haut suffit pour donner une idée des misères
et des crimes de cette époque.
Quelques-uns des
Montgomery prirent part aux Croisades ; leur absence
laissa un peu de répit aux malheureux habitants de leur
contrée.
Le dernier des comtes d'Alençon de la maison
de Montgomery, Robert III, qui avait accompagné Philippe-Auguste
en Palestine, mourut sans, enfants.
- Philippe-Auguste,
qui s'était emparé à cette époque de la Normandie, acheta
le comté d'Alencon des héritiers de Robert.
Le comté
fit alors partie du domaine de la Couronne.
Saint
Louis le donna à son fils Pierre avec quelques villes
et territoires voisins.
Après la mort de Pierre,
le comté revint au roi de France, Philippe-le-Hardi,
qui en disposa en faveur de Charles, son troisième fils.
Le fils et le successeur de ce dernier fut ce duc
d'Alençon qui, en compromettant l'avant garde française
qu'il commandait à la bataille de Crécy, entraîna une
défaite complète dans laquelle il se fit tuer.
Son
fils Charles III, dégoûté du monde, entra dans l'Ordre
des Dominicains.
Jean Ier, sous lequel
le comté d'Alençon fut érigé en duché-pairie, périt
à la bataille d'Azincourt, expiation bien due par lui
à la France dont il avait formenté les troubles et envenimé
les blessures. Son fils, Jean II, fut pris au combat
de Verneuil par les Anglais, qui s'étaient emparés de
son duché et avaient donné à Bedford le titre de duc
d'Alençon. Le duc légitime honora sa captivité par sa
constance, par son refus de se soumettre aux conquérants
de sa patrie, et ne fut rendu à la liberté qu'après
avoir payé une rançon considérable, 300,000 écus d'or
en 1429.
Il combattit vaillamment pour la délivrance
du pays et commanda l'année française à la bataille
de Patay. Toutefois, il ne rentra en possession de son
duché qu'en 1449.
Ce prince brillant et chevaleresque,
ami du faste, de la musique et de la chasse, fut accusé
plus tard, par Charles Y1I, de connivence avec les Anglais.
Condamné à mort en 1458 par la cour des pairs pour crime
de haute trahison, il vit sa peine commuée.
Délivré
par le dauphin, devenu roi sous le nom de Louis XI,
dont l'amitié avait contribué à éveiller les défiances
de Charles Y1I, il se jeta néanmoins dans la Ligue du
Bien public et se lia avec les ennemis du royaume.
Condamné à mort une seconde fois, il eut encore
sa peine commuée, mais mourut en prison, en 1476.
Son fils René ne reçut du roi, indisposé contre
sa race, qu'une partie des domaines de son père; il
fut bientôt, à tort ou à raison, soupçonné d'intrigues
contre Louis XI, condamné à une prison perpétuelle et
enfermé dans une cage de fer d'où il ne sortit qu'à
l'avènement de Charles VIII, qui lui rendit les biens
de son père.
Son fils Charles devint l'époux de
Marguerite de Valois, sœur du roi François Ier,
«la Marguerite des Marguerites », comme l'appelait son
frère. Il fut une des causes de la défection du connétable
de Bourbon, que François Ier; avait privé
du commandement de l'avant-garde française pour le donner
à son beau-frère.
Plus tard, la lâche conduite du
duc d'Alençon à la bataille de Pavie le couvrit de honte,
et il vint mourir à Lyon en 1524.
Sa veuve, Marguerite,
séjourna souvent dans ses domaines, puis épousa en secondes
noces Henri II, roi de Navarre, et c'est sous le nom
de Reine de Navarre qu'elle est demeurée célèbre par
sa protection aux poètes, aux savants et aux Protestants.
« Ce fut, dit Brantôme, une princesse de très grand
esprit et fort habile, tant de son naturel que de son
acquisitif : car elle s'adonna fort aux lettres en son
jeune âge, et les continua, tant qu'elle vécut, aimant
et conversant, du temps de sa grandeur, ordinairement
à la cour avec des gens les plus savants du royaume
de son frère : aussi tous l'honoroient tellement qu'ils
l'appeloient leur Mécénas, et la plupart de leurs livres
qui se composoient alors s'adressoient au roi son frère,
qui estoit bien savant, ou à elle... On la soupçonnoil
de la religion de Luther; mais, pour le respect et l'amour
qu'elle portoit au roi son frère, qui l'aimoit uniquement
et ll'appeloit toujours sa mignonne, elle n'en fit jamais
aucune profession ni semblant, et, si elle la croyoit,
elle la lenoit toujours dans son âme fort secrète, d'autant
que le roi la haïssoit fort, disant qu'elle et toute
autre nouvelle secte tendoient plus à la destruction
des royaumes, des monarchies et dominations qu'à l'édification
des âmes. »
Marguerite, devenue mère de Jeanne d'Albret,
mourut au Château d'Odos, en Bigorre, en 1549.
Après
sa mort, le duché d'Alençon retourna à la Couronne.
Charles IX le donna à son frère François, alors
âgé de douze ans.
Un des seigneurs du pays, Montgomery,
qui avait eu le malheur de tuer dans un tournoi le père
de Charles IX, Henri II, fut poursuivi avec une haine
aveugle par la veuve du roi, Catherine de Médicis. Protestant
et soldat intrépide, Montgomery propagea avec ardeur
la religion nouvelle dans le pays et devint la terreur
des Catholiques. Il s'empara d'Alençon, qu'il fut plus
lard obligé d'abandonner pour aller rejoindre à La Rochelle
le prince de Condé.
A l'époque de la Saint-Barthélemy,
les Catholiques voulurent prendre leur revanche : mais
Matignon, lieutenant du roi en Basse-Normandie, interdit
ces représailles et maintint l'ordre dans son gouvernement.
Le duc d'Alençon était mal vu de la cour, à cause
de sa modération etde son goût pour les opinions nouvelles;
il s'échappa et se réfugia à Alençon, où le roi de Navarre,
depuis Henri IV, vint le trouver.
Pendant les guerres
de la Ligue, le duché devint le théâtre de la lutte.
A la mort de Henri III, Henri IV s'empara d'Alençon.
Mais, pour acquitter les dettes qu'il avait contractées,
il vendit le duché au duc de Wurtemberg, en 1605.
Marie de Médicis, devenue régente, le racheta en
1613 ; c'est là qu'elle se réfugia après s'être brouillée
avec son fils Louis XIII, en 1620, et qu'elle chercha
à rallier ses partisans.
Mais le duc de Créqui,
à la tête de dix compagnies des gardes, occupa la ville
pour le roi, qui établit une généralité ou intendance
à Alençon.
En 1646, Gaston, duc d'Orléans, obtint
le duché d'Alençon, qui passa après lui successivement
entre les mains de sa femme et de sa fille, Mme de Guise.
Celle-ci en fit le centre d'une petite cour, assez brillante,
qui contribua à la prospérité de la ville.
Après
sa mort, le duché retourna au domaine de la Couronne.
Quand il en fut distrait plus tard, pour entrer
dans l'apanage d'un des petits-fils de Louis XIV, le
duc de Berry, el enfin dans celui du comte de Provence,
depuis Louis XVIII, ces princes n'en tirèrent qu'un
simple revenu et un titre honorifique; le duché continua
à être administré par les gens du roi.
Pendant la
Révolution de 1789, le pays, après avoir incliné vers
les idées nouvelles et s'être attaché un moment au parti
girondin, auquel il avait donné un de ses plus énergiques
représentants, Valazé, fut dévasté à plusieurs reprises
par la Chouannerie.
Le chef des Chouans, de Frotté,
eut une destinée malheureuse. Après avoir énergique-
ment soutenu, avec Georges Cadoudal, une cause désespérée,
il fut, en janvier 1800, battu par le général Gardanne,
près de La Motte-Fouquet. « Enfin le général Chambarlhac
enveloppa dans les environs de Saint-Christophe, non
loin d'Alençon, quelques compagnies de Chouans, dit
Thiers, et les fit passer par les armes.
« Cependant
voyant, comme les autres, mais malheureusement trop
lard, que toute résistance était impossible devant ces
nombreuses colonnes qui avaient assailli le pays, M.
de Frotté pensa qu'il était temps de se rendre. Il écrivit,
pour demander la paix, au général Hédouville, qui, dans
le moment, était à Angers, et, en attendant la réponse,
il proposa une suspension d'armes au général Chambarlhac.
Celui-ci répondit que, n'ayant pas de pou- voirs pour
traiter, il allait s'adresser au gouvernement pour en
obtenir, mais que, dans l'intervalle, il ne pouvait
prendre sur lui de suspendre les hostilités, à moins
que M. de Frotté ne consentît à livrer immédiatement
les armes de ses soldats. « C'était justement ce que
M. de Frotté redoutait le plus. Il consentait bien à
se soumettre et à signer une pacification momentanée,
mais à condition de rester armé, afin de saisir plus
lard la première occasion favorable de recommencer la
guerre. Il écrivit même à ses lieutenants des lettres
dans lesquelles, en leur prescrivant de se rendre, il
leur recommandait de garder leurs fusils.
« Pendant
ce temps, le premier consul, irrité contre l'obstination
de M. de Frotté, avait ordonné de ne lui point accorder
de quartier, et de faire sur sa personne un exemple.
« M. de Frotté, inquiet de ne pas recevoir de réponse
à ses propositions, voulut se mettre en communication
avec le général Guidai, commandant le département de
l'Orne, el fut arrêté avec six des siens, tandis qu'il
cherchait à le voir. Les lettres qu'on trouva sur lui,
lesquelles contenaient l'ordre à ses gens de se rendre,
mais en gardant leurs armes, passèrent pour une trahison.
Il fut conduit à Verneuil et livré à une commission
militaire.
« La nouvelle de son arrestation étant
venue à Paris, une foule de solliciteurs entourèrent
le premier consul et obtinrent une suspension de procédure,
qui équivalait à une grâce. Mais le courrier qui apportait
l'ordre du gouvernement arriva trop tard.
« La Constitution
étant suspendue dans les départements insurgés, M. de
Frotté avait été jugé sommairement, el, quand le sursis
arriva, ce jeune et vaillant chef avait déjà subi la
peine de son obstination.
« La duplicité de sa conduite,
bien que démontrée, n'était cependant point assez condamnable
pour qu'on ne dût pas regretter beaucoup une telle exécution,
la seule, au reste, qui ensanglanta cette heureuse fin
de la guerre civile.
« Dès ce jour, les départements
de l'Ouest furent entièrement pacifiés. »
Pendant
la période qui s'écoula de 1815 à 1870, le département
de l'Orne puisa dans la sage tranquillité de la paix
les précieux aliments d'une prospérité qui fut consacrée
aux pro- grès de son agriculture, de son industrie et
de son commerce.
La désastreuse guerre de 1870-1871
vint l'arrêter dans son essor. S'il n'en supporta pas
le poids sanglant, il dut cependant satisfaire à de
nombreuses réquisitions.
Alençon n'est pas une ville ancienne.
Au IXème siècle, ce n'était encore qu'un
bourg qui fut cédé aux Normands par Charles le Simple.
En1026, Guillaume de Belesme y fit construire un château
au confluent de la Sarthe et de la Briante, où il fut
assiégé l'année suivante par Robert duc de Normandie.
Geoffroi Martel, comte d'Anjou, s'empara de cette ville,
qui fut reprise en 1048 par Guillaume le Conquérant.
Henri II, roi d'Angleterre l’a prit en 1135: c'était
une place forte très-importante qui eut depuis lors
des comtes particuliers, vassaux, comme le reste de
la Normandie d’Angleterre. Un de ces comtes, Robert
II de Belesme, s'est rendu fameux par ses cruautés.
C'était, dit un contemporain pour ses prisonniers, un
Pluton, une Mégère, un Cerbère; il ne se souciait pas
de leur rançon, mais préférait les faire mourir dans
les tourments, condamnant les uns, hommes ou femmes,
à être empalés, infligeant à d'autres différentes tortures,
et faisant quelque fois lui-même le métier de bourreau.
Le dernier de cette race homicide, Robert IV, étant
mort sans postérité, Alix, sa sœur et son héritière,
céda à Philippe Auguste Alençon et ses dépendances qui
firent partie du domaine de la couronne jusqu'en 1268,
que Louis IX le donna pour apanage à Pierre, son cinquième
fils. A la mort de ce prince, Alençon revint à la couronne
et fut donné, par Philippe le Bel à Charles de Valois,
son frère. Le comté d'Alençon fut, à cette époque érigé
en comté-pairie.
Dans le XIVèmesiècle
,Alençon eut beaucoup à souffrir des ravages des grandes
compagnies. On fut obligé de raser les faubourgs, le
prieuré de St-Ysiges et l'Hôtel-Dieu de Montsort, afin
d'empêcher l'ennemi de s'y fortifier, Le pays, gouverné
ensuite par des princes bons et aimés de leurs sujets,
jouit pendant un demi-siècle d'une grande prospérité
et d'un complet repos. Vers la fin du XIVème
siècle, Alençon fut érigé en duché, par Charles VI,
roi de France. Henri V, roi d'Angleterre, s'en empara
en 1417 et en fit don au duc de Bedfort, son frère.
En 1421, les Français reprirent la ville, qui retomba
au pouvoir des Anglais en 1428, puis revint à Charles
VII en 1440; mais les Anglais y rentrèrenten1444; enfin,
en 1450, ils eu furent définitivement chassés.
La commune de Juvigny-sous-Andaine abrite dans ses murs une curieuse tour portant le nom de Bonvouloir et qui ne manque pas d’attiser de nombreux commentaires plus ou moins scabreux. Cette tour faisait partie d’un manoir construit par Hugues, seigneur de Tessé. Elle fut érigé pour symboliser la virilité du seigneur du lieu, qui après avoir été faire trempette dans les sources de Bagnole, aurait retrouvé, malgré son âge, une verdeur dont il gratifia la dame de Bonvouloir qui en remerciement lui donna une nombreuse descendance.
Le duché d'Alençon fut réuni
à la couronn en1525. En1559, la ville devint le douaire
de Catherine de Médicis, mère de Charles IX ; elle renfermait
alors un grand nombre de calvinistes et eut beaucoup
à souffrir des querelles religieuses. Les protestants,
étant en majorité, pillèrent les églises et dévastèrent
les couvents ; néanmoins lorsque arriva la St-Barthélemy,
le brave Matignon, chef des catholiques vint à bout
d'empêcher toute sanglante représailles, et sauva la
vie aux protestants. Les ligueurs s'emparèrent de la
ville d'Alençon en 1589; elle fut reprise en 1590 par
Henri IV lui-même, qui fit alors détruire une partie
du château. En 1605,il engagea cette ville au duc de
Wirtemberg, auquel il devait des sommes considérables;
Marie de Médicis, sa veuve, remboursa cet engagement,
et fut subrogée aux droits du duc. A sa mort, Alençon
échut à Gaston d'Orléans; puis, après avoir formé, en
1660, le douaire de la veuve de ce prince, passa par
mariage au duc de Guise.— Les guerres religieuses avaient
continué à désoler la ville ; pendant le XVIIème
siècle, les prédications des pasteurs protestants et
les réfutations des prêtres catholiques y furent souvent
l’occasion de graves désordres. La révocation de l'édit
de Nantes, en 1681, porta aux calvinistes un coup terrible,
et fut signalée à Alençon par des atrocités épouvantables.
La ville d'Alençon est située dans une grande et
fertile plaine entourée de forêts, au confluent de la
Sarthe et de la Briante elle est grande, bien bâtie,
et entourée de cinq faubourgs très agréables. Les rues
sont généralement larges, bien pavées, propres et assez
bien percées. La principale de ses places publiques
sur laquelle s'élèvent l'hôtel de ville et le palais
de justice, communique à une magnifique promenade plantée
de beaux arbres, qui a beaucoup de ressemblance avec
le bois et la grande allée du jardin du Luxembourg à
Paris.
La voie romaine qui part
de Bayeux, Augustodurus, et dont les vestiges subsistent
encore, aide à retrouver, par la seule distance que
donne la Table de Peutinger pour Aregenuce, la position
de ce lieu, que la Table désigne comme capitale, et
fixe cette position à Argentan. Plus tard, cette ville
fit partie du duché d'Alençon, et avait un château fort
dont il ne reste plus que de faibles ruines. Ce fut,
dit-on, dans ce château que le duc de Normandie, roi
d'Angleterre sous le nom de Henri II, reçut, en1168,
les légats du pape, venus pour terminer les différends
qui existaient entre ce monarque et Thomas Becket, archevêque
de Cantorbéry.
Cette ville est agréablement située
sur une hauteur qui domine une vaste et fertile plaine
bornée à l'est par la forêt d'Argentan elle est traversée
par l'Orne, bien bâtie, propre, bien percée, et entourée
de remparts qui offrent une promenade charmante. L'ancien
château d’Argentant, transformé entribunal et en prison,
est un grand bâtiment ayant trois pavillons sur le devant,
avec fenêtres à nervures et un cordon tracé tout à l'entour
; les fossés étaient profonds, et ont été transformés
en une petite promenade sombre et enfoncée. Des murs
qui enceignaient la ville, il ne reste qu'un pan élevé,
que l'on nomme le Donjon, situé un peu au-dessus du
château, et la Tour-Couronnée dont le crénelage bien
entier et le toit pointu n'ont éprouvé aucun dommage
et rappellent bien le XVème siècle.
Cette ville est bâtie dans, une
forte position, au sommet et sur le penchant oriental
d'un coteau au pied- duquel sont des sources qui donnent
naissance au ruisseau de là Chippe. Dans l'origine,
elle était environnée de doubles fossés, et défendue
par deux châteaux forts, l'un situé au levant sur une
élévation artificielle, l'autre, entouré de hautes murailles,
placé au milieu de la ville; les murs qui la ceignirent
naguère, et dont on voit des restes, n'ont été construits
qu'en 1614. Mortagne a de tout temps prétendu au,titre
de capitale du Perche, que lui disputait Bellesme.
C'était autrefois une place importante, qui fut,
plusieurs, fois prise et ruinée. Robert, roi de France,
s'en empara en 997 ; Charles V la fit démanteler en
1378; elle tomba au pouvoir des Anglais en 1424, mais
Jean II, duc d'Alençon, auquel elle appartenait, la
leur reprit en 1449 et en fit rétablir les fortifications;
les calvinistes la livrèrent aux flammes en 1588.
Cette ville fut le théâtre d'un combat sanglant en 1590,
entre les ligueurs et les troupes de Henri IV ; pendant
les guerres de la Ligue, elle fut, dans l'espace de
trois ans et demi, prise, reprise et pillée vingt-deux
fois par les deux partis.
La position de Mortagne,
sur le sommet et le penchant d'une colline, donne à
cette ville des rues escarpées, d'autres en pente douce,
et d'autres parfaitement horizontales; mais la plupart
d'entre elles, sont larges, assez régulières, bordées
de maisons propres, bien bâties et ornées de beaux magasins.
La grande rue que suit la roule de Brest, s'élève par
des rampes et des tournants fort bien ménagés jusque
sur la partie la plus haute, où elle traverse la place
d'armes, la plus grande et la plus belle de Mortagne.
Sées existait déjà à l'époque de la conquête romaine.
César fait l'éloge de cette contrée, habitée par les
Essuins, comme étant restée « plus calme » et « plus
pacifique » que toutes les autres.
Mais l'importance
de Sées ne date que des incursions des Saxons.
D'une
bourgade, ils firent une ville importante, bientôt conquise
au Christianisme.
Saint Latrin, au IVème
siècle, fut, croit-on, le premier évêque de Sées.
La place fut prise et brûlée par les Normands au
commencement du Vème siècle, et c'est avec
les débris de ses remparts que l'on construisit la Cathédrale,
deux fois détruite dans le siècle suivant.
Pendant
le Moyen-Age, la ville fut plusieurs saccagée, notamment
par Henri, roi d'Angleterre, par Louis-le-Jeune, roi
de France.
A la fin de la guerre de Cent-Ans, elle
fut reprise sur les Anglais par Dunois.
Pendant
les guerres de la Réforme, Coligny s'en empara et pilla
la Cathédrale.
Cinq ans plus tard, Montgomery, autre
chef protestant, lui fit subir un sort plus funeste
encore ; la ville fut mise à feu et à sang, et ces fureurs
ne contribuèrent pas peu sans doute à déterminer plus
tard les habitants à prendre parti pour la Ligue.
Ils se soumirent néanmoins sans combat à l'autorité
de Henri IV.
Sées n'a guère conservé de ses monuments
antiques que sa Cathédrale, une des plus précieuses
constructions du Moyen-Age. Il ne paraît pas que sa
construction ail été achevée avant le XIIIème
siècle. C'est un édifice élégant, qui marque une période
intéressante dans l'histoire de l'art, le passage de
l'ogive de son premier à son second âge. Le fronton
présente deux rangs d'arcades, construction très rare
dans les monuments du temps, ce qui a excité la curiosité
savante des archéologues. Deux Flèches à jours s'élèvent
de chaque côté à la hauteur de 70 mètres. Le dessus
du portail n'offre plus que les traces des sculptures
et des riches ornementations que les ravages du temps
et des hommes ont fait disparaître. L'inférieur de l'Église,
orné de riches vitraux, produit un admirable effet.
Parmi les évoques de Sées, on cite Bertaud, poète
célèbre de la fin du XVIème siècle, qui contribua
à la conversion de Henri IV, et en reçut cet évêché.
Ses vers galants furent fort à la mode de son temps.
Sa prose est singulière. Dans l'oraison funèbre
de Henri IV qu'il prononça à Saint-Denis, il commençait
ainsi : « Donc la misérable pointe d'un vil et méchant
couteau remué par la main d'une charogne enragée, etc.
»
Ses vers valent mieux que sa prose, et le couplet
suivant, souvent cité depuis par des gens qui en ignorent
l'auteur, est de Bertaud :
Félicité passée,
Qui ne peut revenir,
Tourment de ma pensée,
Que n'ai-jc en te perdant perdu le souvenir ?
Le Perche : berceau
du cheval percheron L’histoire du cheval
percheron remonte à 732, date de l’arrêt
de la progression arabe en France, à Poitiers,
par Charles Martel. Par l’apport de sang
arabe et grâce à des croisements judicieux,
le cheval du Perche acquièrt des caractéristiques
propres, à savoir, une grande taille, une
robe gris pommelé, une charpente osseuse,
forte et musculeuse. Ces critères seront
retenus en 1883 pour constituer le « stud-book
», livre généalogique qui marque ainsi la
naissance de la race percheronne.
Le
XIXème siècle verra le développement
de cette race avec la multiplication des
comices agricoles et concours. La renommée
du percheron sera alors internationale.
Canada, Argentine, mais surtout les Etats-Unis
achètent des chevaux dans le Perche. Ils
participent à la conquête de l’Ouest américain
et permettent la mise en valeur des Grandes
Plaines. L’American Percheron Stud-Book
confère aux percherons une grande popularité
outre Atlantique.
Lors de la première
guerre mondiale, le cheval percheron a tiré
le matériel de guerre et amené l’approvisionnement
aux soldats, se distinguant ainsi par sa
force et son courage.
A partir de la
Première Guerre mondiale, avec la motorisation
de l’agriculture accentuée après la Seconde
Guerre mondiale, l’utilisation du cheval
percheron connaît un inexorable déclin.
Aujourd’hui, les congrès mondiaux regroupant
tous les éleveurs et amateurs de chevaux
percherons, permettent de garder une certaine
renommée à cette race.
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