Histoire de la Seine Maritime


Le territoire que comprend aujourd'hui
le département de la Seine-Inférieure était habité, à l'époque
de.la conquête des Gaules, par deux populations distinctes les
Véliocasses dont la capitale était Rotomagus (Rouen), et les
Calètes, qui occupaient la partie nord-ouest du département
(ancien pays de Caux). Caletum, capitale de ces derniers, prit,
en l'honneur de Jules César, le nom de Juliubona (aujourd'hui
Lillebonne). Colonisé par les Romains, qui y bâtirent des villes
et y creusèrent des ports, compris dans la seconde Lyonnaise,
ce peuple reçut, dès le IIIème siècle, la foi chrétienne
qui lui fut apportée par saint Nicaise, disciple de saint Denis.
Après avoir vécu tranquille sous la domination romaine, il se
révolta, ainsi que l'Armorique (Bretagne), en l'an 408 les contrées
insurgées se constituèrent en république et furent gouvernées
par des magistrats élus jusqu'à la conquête du pays par Clovis.
Pendant cette première période de notre histoire, la Normandie
fait partie de la Neustrie, qui comprenait tout le territoire
occidental de la France, entre la Bretagne, la Bourgogne et
l'Austrasie. Au milieu des querelles sanglantes qui remplissent
l'histoire des successeurs de Clovis, la Neustrie eut sa part
de crimes et de calamités. Sigebert, roi d'Austrasie, excité
par sa femme Brunehaut, enlève à son frère Chilpéric la plus
grande partie de son royaume, Rouen et la Neustrie.

Chilpéric est contraint de se réfugier
dans Tournay ; désespéré, il semble attendre, dans une sorte
d'impassibilité farouche, que sa ruine se consomme mais, moins
prompte à se décourager, sa femme Frédégonde fait venir deux
jeunes guerriers francs elle leur peint les malheurs de la famille
royale, les attendrit, les anime encore en leur faisant boire
des liqueurs enivrantes, et leur fait jurer de tuer Sigebert.
Les deux guerriers partent pour la Neustrie, se présentent devant
Sigebert le poignardent et tombent eux-mêmes percés de coups.
Délivré de son frère, Chilpéric rentre vainqueur à Paris ; il
y trouve la reine Brunehaut, qu'il exile à Rouen. Mais la veuve
de Sigebert avait réussi à inspirer une passion violente au
fils même de Chilpéric, Mérovée. Celui-ci s'échappe, va la rejoindre
à Rouen, l'épouse et fait bénir cette union par l'évêque de
Rouen, Prétextat, qui, parrain du jeune prince, lui portait
une affection paternelle. Furieux, Chilpéric atteint les coupables,
les sépare ; Brunehaut retourne en Austrasie ; quant à Mérovée,
enfermé dans un monastère, il réussit à s'évader et erre quelque
temps d'asile en asile. Enfin, se voyant près de tomber entre
les mains de sa marâtre Frédégonde et de son père animé par
elle, il se fait donner la mort par un de ses amis.
Cependant
l'affection que l'évêque de Rouen avait témoignée à son pupille
avait profondément irrité Chilpéric et Frédégonde. Prétextat
est exilé à Jersey, une des créatures de Frédégonde, Mesantius,
est promu à sa place à la dignité épiscopale ; quelques années
après, Chilpéric meurt, et Prétextat est rétabli. Frédégonde,
outrée de fureur, fait assassiner le vieil évêque au pied des
autels, pendant le service divin, par un serf de l'Église de
Rouen. La mémoire de Prétextat resta chère au peuple de Rouen
et l'Église l'honore comme un saint.
Mésantius remonte sur
le siège épiscopal toujours en butte à la haine et au mépris
des Neustriens. La chaire épiscopale fut, après lui., occupée
par deux saints, saint Romain et saint Ouen, dont l'ardente
piété réussit à détruire, dans ces contrées, les derniers vestiges
du paganisme. Saint Ouen fonda les deux fameuses abbayes de
Saint-Wandrille et de Jumièges et s'efforça de propager l'étude
des lettres chrétiennes ; mais, après lui, la Neustrie, abandonnée
aux exactions des seigneurs, aux invasions des pirates du Nord,
ne respira un moment que sous le règne de Charlemagne.
L'anarchie
sanglante qui désola l'empire des Francs après la mort du grand
empereur allait la livrer de nouveau aux envahissements des
hommes du Nord, aux Northamans ou Normands qui devaient lui
donner sa dénomination définitive. Le sol antique de la Gaule
avait été envahi par des races barbares, d'origine et de mœurs
diverses mais les invasions des Normands eurent, pour la France,
un caractère étrange et inattendu. Les vikings normands faisaient
un genre de guerre tout nouveau et qui aurait déconcerté les
mesures les mieux prises contre une agression ordinaire. Leurs
flottes de bateaux à rames et à voiles entraient par l'embouchure
des fleuves et les remontaient souvent jusqu'à leur source,
jetant alternativement, sur les deux rives, des bandes de pillards
intrépides et disciplinés. Lorsqu'un pont ou quelque autre obstacle
arrêtait cette navigation, les équipages tiraient leurs navires
à sec, les démontaient et les charriaient jusqu'à ce qu'ils
eussent dépassé l'obstacle. Des fleuves, ils passaient dans
les rivières, et puis d'une rivière dans l'autre, s'emparant
de toutes les grandes iles, qu'ils fortifiaient pour en faire
leurs quartiers d'hiver et y déposer, sous des cabanes rangées
en files, leur butin et leurs captifs. Attaquant ainsi à l'improviste
et lorsqu'ils étaient prévenus, faisant retraite avec une extrême
facilité, ils parvinrent à dévaster des contrées entières, au
point que, selon l'expression des contemporains, on n'y entendait
plus un chien aboyer. Les châteaux et les lieux forts étaient
le seul refuge contre eux mais, à cette première époque de leurs
irruptions, il y en avait peu, et les murs mêmes des anciennes
villes romaines tombaient en ruine. Pendant que les riches seigneurs
de terres flanquaient leurs manoirs de tours crènelées et les
entouraient de fossés profonds, les habitants, du plat pays
émigraient en masse de leurs villages, et allaient à la forêt
voisine camper sous des huttes défendues par des abatis et des
palissades. Mal protégés par les rois, les ducs et les comtes
du pays, qui souvent traitaient avec l'ennemi pour eux seuls
et aux dépens des pauvres, les paysans s'animaient quelquefois
d'une bravoure désespérée, et, avec de simples bâtons, ils affrontaient
les haches des Normands. D'autres fois, voyant toute résistance
inutile, abattus et démoralisés, ils renonçaient à leur baptême
pour détourner la fureur des païens, et, en signe de leur initiation
au culte des dieux du Nord, ils mangeaient de la chair d'un
cheval immolé en sacrifice. Cette apostasie ne fut point rare
dans les lieux les plus exposés au débarquement des pirates
; leurs bandes mêmes se recrutèrent de gens qui avaient tout
perdu par leurs ravages ; et d'anciens historiens assurent que
le fameux roi de mer Hastings était fils d'un laboureur des
environs de Troyes. Brulée une première fois, en 841, par ces
pirates, qui remontaient le cours de la Seine, pillant et ravageant
tous les riverains, Rouen les voit s'établir dans ses murs en
845, puis se retirer.

Mais, après ces courses rapides, vint
la grande invasion, celle de 896. Roll ou Rollon, banni de la
Norvège ; sa patrie, réunit autour de lui de hardis compagnons
résolus à suivre tous les hasards de sa fortune. Avec une flotte
nombreuse, il entre dans la Seine, qu'il remonte jusqu'à Jumièges,
à cinq lieues de Rouen. Aucune armée ne se présente pour leur
disputer l'entrée du pays. Le prince qui régnait alors était
Charles le Simple faible d'esprit et de cœur. Au milieu de l'épouvante
générale, seul l'archevêque de Rouen ose ne pas désespérer du
salut de la : ville il se rend au camp des Normands et offre
à Rollon l'entrée de Rouen à la condition qu'il ne sera fait
aucun mal aux habitants. Rollon accepte ; Rouen devient sa place
d'armes, le centre de ses entreprises. Après en avoir pris possession,
il remonte la Seine jusqu'à l'embouchure de l'Eure, et là, établis
dans un camp fortifié, les Normands attendent l'arrivée de l'armée
que Charles réunissait enfin contre eux. Dans cette armée se
trouvait un païen converti le Norvégien Hastings ; connaissant
l'énergie sauvage de ses anciens compatriotes, il donne le conseil
de ne point tenter de forcer leurs retranchements « Voilà un
conseil de traitre, » s'écrie un seigneur français. Hastings,
indigné, quitte aussitôt le camp. La bataille s'engage ; les
Normands sont vainqueurs, et le duc de France, chef de l'armée
française Regnauld, périt de la main d'un pêcheur de Rouen,
qui avait suivi l'armée des envahisseurs. Rollon poursuit sa
marche victorieuse jusqu'à Paris, qu'il assiège inutilement.
Forcé de reculer, il se rabat sur Bayeux, dont le comte est
tué ; la beauté de la fille du comte, Popa, touche le cœur du
chef normand, qui l'épouse. Après avoir pris Évreux, Rollon
échoue devant Chartres. Néanmoins, la terreur que les Normands
inspirent est si grande, que le cri général impose à Charles
le Simple la nécessité de traiter avec ces pirates. La paix
est conclue à Saint-Clair-sur-Epte, en 912. Rollon et ses principaux
compagnons consentent à embrasser la foi chrétienne, à condition
qu'on leur cèdera les contrées maritimes, avec Rouen et ses
dépendances. On raconte qu'après la cérémonie, où Rollon jura
foi et hommage au roi de France, on voulut exiger de lui qu'il
s'agenouillât, selon l'usage, devant le roi et lui baisât le
pied. « Jamais je ne m'agenouillerai devant un homme, » dit
Rollon ; puis, les seigneurs français insistant, le Normand
fit signe à un de ses gens de venir baiser à sa place le pied
du roi. Le soldat se baisse, saisit le pied, puis, le relevant
vivement comme s'il eût voulu le porter à sa bouche, jeta le
roi à la renversé, aux grands éclats de rire de tous ses compagnons.
Dès lors, l'histoire des envahisseurs devint l'histoire même
du pays auquel ils ont donné leur nom. Ils se partagèrent le
pays, les anciens propriétaires furent dépossédés ou contraints
de tenir leurs domaines à ferme ou en vasselage ; mais le calme
dont jouit enfin le pays, sous la domination ferme et intelligente
de Rollon, le dédommagea un peu des malheurs de sa condition
nouvelle ; en quelques années, les terres furent défrichées
; les villes, les églises, les monastères et les châteaux sortirent
de leurs ruines. Longtemps après la mort de Rollon, le nom de
ce chef de pirates resta célèbre en Normandie, comme celui de
l'ennemi le plus acharné des larrons et du plus grand justicier
de son siècle. Guillaume 1er, fils de Rollon, recula
les limites de son duché, vainquit une armée de rebelles normands,
aux portes mêmes de Rouen, dans une prairie qui a conservé depuis
le nom de pré de la Bataille, et mourut assassiné par trahison,
dans une conférence où l'avait attiré Arnould, comte de Flandre.
Ce duc, ainsi que ses successeurs, Richard 1er et
Richard II, se distingua par une vive piétée et par sa libéralité
envers l'Église ; les moines normands, seuls historiens de cette
époque, en ont récompensé ces princes par les éloges les plus
magnifiques.

Sous Richard Il, les paysans, écrasés
d'impôts, tourmentés par les nouveaux dominateurs, formèrent
un vaste complot pour secouer le joug de leurs tyrans. Ils choisirent
des délégués qui se réunissaient en une assemblée générale et
communiquaient ensuite à chaque village le résultat des délibérations.
Raoul, oncle de Richard II encore enfant, fut informé de ces
assemblées secrètes et du lieu où elles se tenaient ; il fond
avec ses chevaliers sur ces paysans sans armes et les supplices
les plus atroces furent infligés à ces malheureux, ainsi qu'à
tous ceux qui avaient comme eux nourri l'espoir de reconquérir
leur liberté.
Sous Richard III et son frère Robert le Diable,
l'histoire intérieure de la Normandie ne présente rien de remarquable
mais c'est à cette époque que des aventuriers normands, sous
la conduite des fils de Tancrède de Hauteville, étonnèrent le
midi de l'Europe par l'éclat de leurs faits d'armes, et conquirent
Naples et la Sicile. Les habitudes et le caractère des Normands,
à cette époque héroïque de leur histoire, ont été dépeints par
Michelet dans son Histoire de France, avec la vivacité pittoresque
qu'on lui connait. Les historiens de la conquête d'Angleterre
et de Sicile se sont plu à représenter leurs Normands sous les
formes et la taille colossale des héros de chevalerie.
En
Italie, un d'eux tue d'un coup de poing le cheval de l'envoyé
grec. En Sicile, Roger, combattant cinquante mille fantassins
avec cent trente chevaliers, est renversé sous son cheval, mais
se dégage seul, et rapporte encore la selle. Les ennemis des
Normands, sans nier leur valeur, ne leur attribuent point ces
forces surnaturelles.
Les Allemands, qui les combattirent
en Italie, se moquaient de leur petite taille. Dans leur guerre
contre les Grecs et les Vénitiens, ces descendants de Rollon
et d'Hastings se montrent peu marins et fort effrayés des tempêtes
de l'Adriatique. Mélange d'audace et de ruse, conquérants et
chicaneurs comme les anciens Romains, scribes et chevaliers,
rasés comme les prêtres et bons amis des prêtres (au moins pour
commencer) ; ils firent leur fortune par l'Église et malgré
l'Église. La lance y fit, mais aussi la lance de Judas, comme
parle Dante. Le héros de cette race, c'est Robert l'Avisé. La
Normandie était petite, et la police y était trop bonne pour
qu'ils pussent butiner grand-chose les uns sur les autres. Il
leur fallut donc aller, comme ils disaient, gagner par l'Europe.
Mais l'Europe féodale, hérissée de châteaux, n'était pas au
XIème siècle facile à parcourir. Ce n'était plus
le temps où les petits chevaux des Hongrois galopaient jusqu'au
Tibre, jusqu'à la Provence. Chaque passe des fleuves, chaque
poste dominant avait sa tour ; à chaque défilé on voyait descendre
de la montagne quelque homme d'armes avec ses varlets et ses
dogues, qui demandait péage ou bataille ; il visitait le petit
bagage du voyageur, prenait part, quelquefois prenait tout,
et l'homme par-dessus. Il n'y avait donc pas beaucoup à gagner
en voyageant ainsi. Nos Normands s'y prenaient mieux. Ils se
mettaient plusieurs ensembles bien montés, bien armés, mais
de plus affublés en pèlerins de bourdons et de coquilles ils
prenaient même volontiers quelque moine avec eux. Alors, à qui
eût voulu les arrêter ils auraient répondu doucement, avec leur
accent trainant et nasillard, qu'ils étaient de pauvres pèlerins,
qu'ils s'en allaient au Mont- Cassin, au saint sépulcre, à Saint-Jacques
de Compostelle on respectait d'ordinaire une dévotion si bien
armée.

Le fait est qu'ils aimaient ces lointains
pèlerinages il n'y avait pas d'autre moyen d'échapper à l'ennui
du manoir. Et puis c'étaient des routes fréquentées ; il y avait
de bons coups à faire sur le chemin, et l'absolution au bout
du voyage. Tout au moins, comme ces pèlerinages étaient aussi
des foires, on pouvait faire un peu de commerce, et gagner plus
de cent pour cent en faisant son salut. Le meilleur négoce était
celui des reliques on rapportait une dent de saint Georges,
un cheveu de la Vierge. On trouvait à s'en défaire à grand profit
; il y avait toujours quelque évêque qui voulait achalander
son église, quelque prince prudent qui n'était pas fâché à tout
évènement d'avoir en bataille quelque relique sous sa cuirasse.
»
Le successeur de Robert le Diable, son bâtard Guillaume,
allait illustrer le nom normand par la conquête de l'Angleterre.
Il appuyait ses prétentions au trône de la Grande-Bretagne sur
un testament que le feu roi des Anglo-Saxons, Édouard, aurait
fait en sa faveur sur le don que le pape Alexandre II faisait
de ce royaume aux Normands, fils si dévoués de l'Église ; enfin,
sur une nombreuse armée, composée d'aventuriers de toutes nations,
qu'attirait l'espoir du pillage et des conquêtes. La victoire
d'Hastings en 1066 leur livra l'Angleterre. Le roi des Anglo-Saxons,
l'intrépide Harold, y fut tué.
Guillaume le Conquérant imposa
les lois et la langue normandes à son nouveau royaume, qu'il
partagea en fiefs au profit de ses compagnons. Guillaume, depuis
cette conquête, séjourna alternativement en Normandie, où il
eut à réprimer la rébellion de son fils Robert, appuyée par
de nombreux mécontents, et en Angleterre, où l'appelaient des
révoltes continuelles, excitées par la tyrannie sanguinaire
des nouveaux conquérants. Ces atrocités contribuèrent à enrichir
le clergé de Normandie. Les seigneurs de Normandie se sentaient
parfois des remords en songeant aux crimes de toute sorte qu'ils
avaient commis en Angleterre ; les évêques décidèrent qu'ils
devaient s'en délivrer par la pénitence ou par des aumônes faites
aux églises les conquérants, enrichis par le pillage et les
massacres, préférèrent en général ce dernier genre d'absolution.
C'est de cette époque que date la construction des plus riches
églises de Normandie. Les États de Guillaume le Conquérant furent,
à sa mort, partagés entre ses trois fils Robert Courte-Heuse
eut la Normandie; Guillaume le Roux, l'Angleterre, et Henri
le comté de Mortain. C'est ici que finit l'époque héroïque de
la Normandie.
Robert Courte-Heuse, prince faible et débauché,
vit son pouvoir souvent menacé par la révolte de ses vassaux.
En 1096, il partit pour la croisade. L'un de ses frères, Guillaume
le Roux étant mort, le troisième fils du Conquérant, Henri Beau-Clerc,
profita de l'absence de son frère ainé pour s'emparer de la
couronne d'Angleterre et du duché de Normandie Robert Courte-Heuse,
à son retour, ayant tenté de reconquérir par les armes ce que
l'usurpation lui avait enlevé, fut fait prisonnier par son frère,
qui l'enferma dans un château du pays de Galles, après lui avoir
crevé les-yeux. Robert languit pendant trente ans dans cette
prison, se consolant de sa captivité en composant des poésies,
dont quelques-unes nous ont été conservées. Henri Beau-Clerc
réprima énergiquement l'insolence de ses vassaux. Ceux-ci lui
suscitèrent un compétiteur dans la personne du jeune fils de
Robert Courte-Heuse, Guillaume Clyton, et appelèrent à leur
aide le roi de France, Louis le Gros. Mais Henri vainquit ces
confédérés à Brenneville, ou plutôt Brémule en 1119), bataille
peu sanglante d'ailleurs, s'il est vrai qu'il n'y périt que
trois hommes.
Après avoir imposé au roi de France un traité
désavantageux, Henri mourut ; laissant une fille, Mathilde,
mariée à Geoffroy Plantagenet, comte d'Anjou. La discorde et
la guerre continuèrent de désoler la Normandie.

Cependant les premières communes de Normandie
datent de cette époque au milieu de ces dissensions rivales,
les divers compétiteurs cherchaient à s'attacher par des concessions
et des franchises les bourgeois, qui commençaient à s'enrichir
par le commerce et l'industrie Geoffroy et Henri Plantagenet,
qui lui succéda, abolirent en Normandie les charges les plus
onéreuses, fruits amers de la conquête, et accordèrent des privilèges
importants aux bourgeois de Rouen et de la ville d'Eu.
Cette
époque est celle de la plus grande puissance des Normands et
l'origine des longues guerres de l'Angleterre et de la France.
Éléonore de Guyenne, fille du comte de Poitiers et d'Aquitaine,
avait épousé le roi de France, Louis VII ; un divorce les sépara
en 1150, et, la même année, Éléonore épousait Henri Plantagenet,
duc d'Anjou et de Normandie, bientôt roi d'Angleterre sous le
nom de Henri II ; elle lui apportait en dot toute la France
occidentale, de Nantes aux Pyrénées. Maitre en France d'un territoire
beaucoup plus étendu que celui du roi, possédant une étendue
de pays qui correspondait à quarante-sept de nos départements
actuels, tandis que Louis VII n'en possédait pas vingt, Henri
II vit bientôt sa puissance ébranlée par sa lutte avec l'archevêque
de Cantorbéry, Thomas Becket, qu'il fit assassiner, et par la
révolte de ses fils appuyés par le roi de France.
Il mourut,
laissant sa couronne à son fils Richard Cœur de Lion celui-ci
avait eu, dans le roi de France Philippe-Auguste, un ami dévoué
et fidèle. Pendant la croisade qu'ils entreprirent ensemble,
ils ne tardèrent pas à se brouiller. Laissant le chevaleresque
roi d'Angleterre étonner la Palestine par ses exploits et révolter
par son orgueil les princes ses compagnons, Philippe, revenu
en France, excita Jean sans Terre, frère de Richard, à s'emparer
du trône d'Angleterre. Richard, longtemps captif en Autriche,
ne put revenir qu'après avoir payé une rançon énorme. Il réduisit
aisément ses vassaux révoltés ; mais il mourut bientôt, atteint
d'une flèche au siège de Châlus, petit château du Limousin en
1199. Son frère et successeur, Jean sans Terre, fait prisonnier
à Mirebeau, Arthur de Bretagne, fils de son frère aîné, Geoffroy,
qui faisait valoir ses droits à la couronne anglo-normande.
Il l'enferme dans le château de Rouen, puis le fait assassiner
et jeter dans la Seine. Philippe profite avidement du crime
de Jean sans Terre et de l'horreur que ses perfidies et ses
cruautés inspiraient aux Normands. Il le fait citer devant le
tribunal des pairs, pour répondre du meurtre d'Arthur et, sur
son refus de comparaitre, fait confisquer les provinces que
Jean possédait en France. La Normandie fut ainsi réunie à la
couronne de France en 1201.
A dater de cette époque, l'histoire
de cette province se confond avec celle de la France. Philippe-
Auguste assure son autorité en Normandie, en achetant la plupart
des fiefs importants et en confirmant les privilèges des communes.
Sous l'avide Philippe le Bel, des impôts excessifs provoquèrent
une révolte, bientôt étouffée. Louis le Hutin octroie à la province
la charte dite Charte aux Normands, qui assurait aux Normands
le droit de n'être jamais cités devant une autre juridiction
que celle de leur province. Cette charte, longtemps respectée,
ne fut abolie réellement- que sous Louis XIV, et, s'il arrivait
qu'une ordonnance royale en violât quelque disposition, on y
ajoutait cette réserve expresse, qui rappelait l'existence du
droit, alors même qu'il était violé Nonobstant clameur de
haro et charte normande.

La Normandie fut constituée
en duché apanager en faveur du fils ainé de Philippe de Valois;
ce fut Louis XI qui la réunit définitivement au domaine royal.
Pendant la guerre de Cent ans, dont elle fut souvent le théâtre,
la Normandie fut dévastée par les Anglais, et l'épidémie célèbre
connue sous le nom de peste noire réduisit de moitié le nombre
de ses habitants.
Depuis Louis XI, elle jouit pendant près
d'un siècle d'une paix dont elle profita pour tourner son activité
vers le commerce et les expéditions maritimes.
François
1er encouragea l'esprit de découverte qui animait,
au XVIème siècle, les marins normands, en fondant
à l'embouchure de la Seine le port du Havre. Mais la province
vit bientôt cette prospérité s'évanouir pendant les guerres
de religion. Les protestants se rendirent maitres de Rouen qui,
reprise par les catholiques, fut livrée au pillage ; le resta
deux ans au pouvoir des Anglais, et les supplices infligés aux
huguenots, les massacres qui suivirent la Saint- Barthélemy
portèrent la désolation et la ruine dans ce beau pays. Un statisticien
du XVIIème siècle calculait que la guerre civile
avait enlevé à la Normandie plus de cent cinquante mille habitants.
La Normandie fut le théâtre de la lutte entre Henri IV et la
Ligue, dont les combats d'Arques et d'Ivry sont les épisodes
les plus importants. Henri, maitre du royaume, releva le commerce
et la marine normande, qui prospéra de nouveau jusqu'à l'époque
de nos désastres, à la fin du règne de Louis XIV. Sous ce prince,
les états de Normandie, qui s'étaient longtemps maintenus, disparurent
enfin ; mais si la province perdit quelques-uns de ses privilèges,
la prospérité matérielle y gagna. Au XVIIIème siècle,
la lutte du vieil esprit provincial contre l'unité française
semble parfois se ranimer, sous Louis XV, au sein du parlement
de Normandie et, dans les premiers temps de la Révolution, ce
fut à Caen que s'organisa, en 1793, l'insurrection dirigée par
les Girondins unis aux royalistes; mais l'armée insurrectionnelle,
conduite par Wimpfen et le marquis de Puisaye, fut vaincue à
Vernon, et la Normandie fut soumise à l'autorité de la Convention.
Dès lors, malgré le voisinage de la Bretagne révoltée, elle
resta tranquille, et ce fut à peine si la chouannerie réussit
à troubler un moment quelques cantons de la basse Normandie.
Sous Napoléon 1er, le génie commercial de la Normandie
prit un nouvel essor. Jamais l'industrie et les productions
n'y furent plus actives ni plus prospères mais, si elle n'eut
pas à souffrir des invasions en 1814 et en 1815, elle paya son
tribut à la guerre de 1870-1871. Dès le 1er novembre,
un corps formé de 7 bataillons de mobiles, de 8 compagnies de
francs-tireurs, de 2 escadrons de hussards, avec une batterie
d'artillerie et quelques gardes Nationaux mobilisés, fut chargé
de couvrir, sur la rive droite de la Seine, Rouen et Le Havre,
et ces troupes se déployèrent en avant de Rouen jusqu'à Gournay,
Écouen et Les Andelys (Eure). En décembre, les mobiles furent
repoussés, à Buchy, par le huitième corps allemand qui venait
de Metz, ils rentrèrent à Rouen vers cinq heures du soir et
y causèrent une violente émotion.
La ville était ouverte,
sans fortifications et dominée par de hautes collines qui rendaient,
dans les conditions présentes, toute défense impossible. Le
conseil municipal assemblé à la hâte délibéra, et il fut décidé
que la ville ne serait pas défendue. Le 5 décembre, le général
Briand, qui avait été antérieurement chargé de la défense de
la place, voyant que l'on ne convoquait pas la garde nationale
à l'approche de l'ennemi et que les autorités étaient décidées
à ne pas défendre la ville, se retira sur Le venait d'être fortifié
par les soins du capitaine de vaisseau Mouchez, et Le Havre
se trouva défendu par un corps d'environ 20 000 hommes.
Après l'occupation de Rouen, les Allemands avaient établi leurs
postes avancés sur toute la ligne qui s'étend entre les deux
rives de la Seine, d'Elbeuf à La Bouille. Un corps de 1500 Français
entreprit de forcer les postes avancés de l'ennemi. L'action
s'engagea près de Moulincaux, à 15 kilomètres au sud-ouest de
Rouen; l'ennemi en fut chassé et poursuivi jusqu'au Grand-Couronne.
Il voulut le lendemain reprendre ses positions, mais fut chaudement
reçu et définitivement repoussé. Les francs-tireurs du Calvados
et les mobiles de l'Ardèche et des Landes eurent principalement
l'honneur de ces deux journées.
Le 1eret le 2
janvier, les Allemands se contentèrent de mettre quelques canons
en batterie sur la route du Grand-Couronne à Elbeuf, et vers
deux heures ils tirèrent plusieurs coups de feu sur Moulincaux;
mais, le 3 au soir, d'épaisses colonnes de Prussiens partirent
de Rouen et se dirigèrent vers le Grand-Couronne, où ils firent
halte et passèrent une partie de la nuit. Ils étaient 20 000
à 25 000 avec trente-six canons. Le lendemain, avant six heures
du matin, une formidable fusillade éclata. C'étaient toutes
les forces ennemies qui se ruaient sur la faible avant-garde
française.
Les Prussiens étaient à quinze contre un ; de
plus, un brouillard extrêmement épais permit d'avancer sans
être vu. Tout d'abord un détachement de quatre-vingts mobiles,
qui n'avaient pris aucune mesure pour éviter une surprise, fut
enveloppé et fait prisonnier.
Les lourdes masses allemandes
gravirent à grand peine les flancs escarpés du Château-Robert.
Sur la plate-forme du vieux donjon, une poignée d'hommes, soutenue
de deux canons, foudroyait à bout portant les troupes allemandes
qui montaient toujours et par un feu plongeant ouvrait de vastes
trouées dans leurs rangs épais. Mais quand ces braves gens eurent
perdu douze des leurs et virent l'ennemi déborder de toutes
parts sur le plateau, ils durent opérer leur retraite. Elle
fut lente et protégée par une fusillade des mieux nourries.
A dix heures, les Français manœuvraient au-dessus de La Bouille,
à Saint--Ouen-de-Thiberville (Eure). Nos tirailleurs s'adossèrent
à l'église et firent sur l'ennemi un feu terrible.
Notre
dernier canon ne fut pris qu'après la mort des quatre artilleurs
qui le servaient; vers deux heures et demie, la canonnade cessa
de gronder, tout était à peu près terminé. Les Français avaient
perdu environ 600 hommes et les Allemands 3 000
Cependant
l'ennemi avançait toujours Rouen, Dieppe, Fécamp, Bolbec tombèrent
en son pouvoir. Il allait marcher sur Le Havre lorsque ses troupes
furent rappelées au nord-est par suite de l'heureuse diversion
de l'armée du Nord commandée par le général Faidherbe. Dieppe
et plusieurs autres villes furent alors évacuées par les Allemands
mais ils ne cessèrent d'occuper Rouen, qui fut largement mis
à contribution et resta entre leurs mains comme centre d'opérations
futures.
Après plus de sept mois d'occupation, le pays se
vit enfin délivré ; mais épuisé par les réquisitions des envahisseurs.
Depuis entrée dans le mouvement qui semble porter la France
vers les arts de la paix, la Normandie a marqué sa place au
premier rang par les développements qu'elle a donnés à son industrie
agricole et manufacturière.
Rouen



Rouen devint le siège d'un archevêché
et l'abbaye de Saint Ouen y fut fondée en 535. Chilpéric Ier,
roi mérovingien de Neustrie, y épousa Galswinthe. Son frère
Sigebert Ier, roi d'Austrasie, y épousa Brunehaut,
sœur de Galswinthe, toutes deux filles du roi wisigoth Athanagilde.
Cela provoqua un meurtre dans la cathédrale : l'évêque Prétextat
qui avait célébré la seconde union fut égorgé au pied de l'autel
par un sicaire envoyé par Frédégonde rivale vindicative et ne
supportant pas de voir l'élu de son cœur marié avec une autre.
Les Vikings s'installèrent à Rouen avec Rollon au traité
de Saint Clair sur Epte en 911. Philippe-Auguste rattacha la
Normandie à la Couronne en 1204. Le roi d'Angleterre Henri V
prit la ville en 1419 et Jeanne d'Arc y fut brulée sur la place
du Vieux Marché le 30 mai 1431. Rouen jouit d'une grande prospérité
comme en témoignent ses armes, datant de 1266, qui ont repris
l'emblème de la puissante corporation des drapiers. Le chef
est la marque des "bonnes villes du Royaume".
Dieppe

Dieppe tire son nom de l’anglo-saxon deep signifiant « profond », donné par les Normands aux VIIème et VIIIème siècles car le lit creusé par l’Arques dans le plateau crayeux du pays de Caux permettait d’accueillir des navires de haute mer. En 1195, Philippe Auguste repousse Richard Cœur de Lion et détruit la ville. Le duché de Normandie annexé, en 1204, la ville devient française jusqu’à François Ier. Les rois de France se concilient les habitants de ce site stratégique en leur accordant de nombreux privilèges. Dieppe devient alors une ville aux aventuriers multiples.
Le Havre


Guillaume Gouffier de Bonnivet, amiral
de France, choisit le site d’implantation du nouveau port. Il
confie le projet à Guyon le Roy, seigneur du Chillou, capitaine
du port de Honfleur. L’avancée des travaux est retardée par
l’instabilité du sol et les tempêtes. Mais dès octobre 1518,
le port est utilisable et accueille ses premiers navires. Le
8 octobre 1518, François Ier signe la charte de fondation
de la ville. La « grosse tour » en défend l’entrée
Le site
est entouré de marais, et il n’est pas question à l’origine
de créer une ville dans ce milieu insalubre. Pourtant, sur l’initiative
de Du Chillou, François Ier donne exemption de taille
et de franc-salé aux futurs habitants du Havre. Les armes de
la villes sont celles de François Ier : une salamandre.
Le roi se déplace lui-même en août 1520 et rend les privilèges
du Havre (essentiellement le quartier Notre-Dame) perpétuels,
essentiellement des exonérations d'impôts. En 1525, la « mâle
marée » détruit les premières constructions, fait une centaine
de victimes sur une population de 600 âmes.
Extrait du décret
royal du 7 février 1517 : « avons fait chercher en la coste
de Normandie et pays de Caux lieu sûr et convenable, et nous
ayant été rapporté par vous et notables personnages, en ce exprimés
et entendus, que le lieu de grâce soit le plus propre et le
plus aise de ladicte coste et pays de Caux à faire havre auquel
lesdics vaisseaux naviguant sur la Mer Océane (Océan Atlantique)
puissent aisément arriver et seurement séjourner, et faire ledit
havre en la forme qu’il appartient...

Le havre fut également un port pour le
trafic du « bois d'ébène». Pendant la Seconde Guerre mondiale,
Le Havre subit 132 bombardements planifiés par les Alliés ;
les nazis ont également détruit les infrastructures portuaires
et coulé des navires avant de quitter la ville. Mais les destructions
les plus importantes surviennent les 5 et 6 septembre 1944 «
opération Astonia » lorsque les Alliés bombardent le centre-ville
et le port pour affaiblir l'occupation nazie.
L'objectif
était de faciliter le ravitaillement et la progression des troupes
alliées débarquées trois mois plus tôt en Basse-Normandie. Le
bilan des bombardements est lourd : 5 000 morts, 80 000 sans-abris,
150 hectares rasés, 12 500 immeubles détruits. Le centre-ville
est réduit en gravats. Le port n'avait plus que quelques sections
de quais intactes. 350 épaves gisaient au fond de l'eau ; la
rade ainsi que l'estuaire étaient minés.

Ne connaissant de cette région que la plage de Rouen, par gros temps, et les falaises d’Étretat, et mes grimoires étant antérieurs à deux guerres qui, hélas, en ont profondément bouleversé le paysage, et notamment la seconde où ce département a subit, bien malgré lui, une avalanche de bombes de tous calibres, je ne me hasarderais pas à vous parler de ce territoire que je ne connais pas.
Eu

L'origine de cette ville se perd dans
la nuit des siècles. Elle est antérieure aux premiers temps
de la monarchie française. Deux monuments, attribués aux Romains
et conservés jusqu'à nos jours, Prouvent incontestablement que
c'était une place importante Le premier est un chemin militaire
qui conduit d'Amiens jusqu'à cette ville; l'autre est une ancienne
porte de ville, accompagnée de deux grosses tours, à laquelle
on a toujours donné le nom de porte d'Empire. Ces anciens monuments,
et particulièrement le chemin militaire, démontrent que du temps
des Romains la ville d'Eu et celle du Tréport, qui en est peu
éloignée, étaient les lieux les plus considérables et le port
de mer le plus fameux qu'il y eût alors sur toute la côte depuis
Boulogne jusqu'à l'embouchure de laSeine, St-Valery n'étant
qu'un désert au VII siècle, et le port de Dieppe n'ayant commencé
à se former qu'en1080. Vers 956, Richard I donna cette ville
avec le titre de comté à Guillaume son fils naturel. En 1475,
Louis XI, sur un bruit que le roi d'Angleterre devait faire
une descente en Normandie, s'emparer de la ville d'Eu, et y
passer l'hiver, donna l'ordre de la réduire en cendres ainsi
que la forteresse, ordre qui fut exécuté le 18 juillet de la
même année le château et la ville entière furent complètement
réduits en cendres, à l'exception des églises. Cette ville n'a
jamais pu se relever de ses ruines ; fugitifs de leur terre
natale, ses infortunés habitants cherchèrent un asile dans les
places voisines les immunités qui lui furent accordées depuis
n'ont rien opéré pour lui rendre son premier état. Plusieurs
villes des environs, telles que Dieppe, St-Valery et Abbeville
profilèrent de ce désastre pour augmenter leur commerce, et
rien ne s'y opposa. Le duc de Mayenne s'empara de cette ville
en 1589.
La commune d'Eu fut établie par deux chartes de
1149 et 1151, octroyées par le comte Jean, à l'instar de la
charte de St-Quentin. Le comté d'Eu, érigé en 996, devint à
cette époque le partage de Geoffroy, fils naturel de Richard
Ier, duc de Normandie, dont la postérité le posséda jusqu'en
1227, en y joignant les seigneuries d'Arqués, de Driencourt
(appelé depuis de Neufchâtel et de Mortemer, que Philippe Auguste
acquit en 1219. La maison De Brienne le tint ensuite jusqu'au
supplice de Raoul de Brienne, connétable de France, décapité
à Paris en 1350. A cette époque, il fut donné à la maison d'Artois,
et fut érigé par Charles VII en comté-pairie en 1458. Il passa
ensuite par héritage dans la maison de Clèves, et fut érigé
en duché en 1539. En 1570, Catherine de Clèves le porta à son
mari Henri de Guise, qui fut assassiné aux états de Blois. Charles
de Lorraine en prit possession à la mort de sa mère, en 1633.
Henri de Lorraine, son fils, le vendit en 1660 pour la somme
de 2,500,000 à Marie-Louise d'Orléans, connue Sous le nom de
mademoiselle de Montpensier, qui en fit don en 1682 au duc du
Maine, fils adultérin de Louis XIV, pour obtenir la liberté
de Lauzun. Douze ans plus tard, Louis XIV rendit en faveur du
duc du Maine le titre de pairie au comté d'Eu. A la mort des
enfants du duc du Maine, leur héritage échut au duc de Penthièvre
dont la fille et unique héritière porta le comté dans la famille
d'Orléans. La situation du château d'Eu est admirable du côté
des jardins, il domine une vallée riante arrosée par la Bresle
; à gauche on voit des allées magnifiques des hêtres séculaires
devant la façade s'étend un parterre orné de statues et de fleurs.
Du haut de la terrasse on aperçoit la mer, qui se termine à
l'horizon. Ce château occupe l'emplacement d'une forteresse
construite par Rollon, qui y entretenait une nombreuse garnison.
Au commencement du XI siècle, Guillaume d'Exmes ajouta à cette
Forteresse des constructions considérable à fin de pouvoir l'habiter
avec sa famille, et fit élever dans l'enceinte du château l'église
originairement collégiale d'Eu et l'abbaye du même nom. Guillaume
le Conquérant prit ce château d'assaut en 1049, et le livra
au pillage. Robert Guiscard, comte d'Eu, en étant devenu propriétaire
l'agrandi et l'embellit tellement qu'il devint une habitation
royale de premier rang, où fut célébré le mariage de Guillaume
le Bâtard avec Mathilde de Flandre.
Charles Nungesser et François Coli

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