Le département des Deux-Sèvres est formé du ci-devant
bas Poitou, et tire son nom des deux rivières de Sèvres qui y prennent
leurs sources, et l'arrosent, l'une au sud de l'est à l'ouest, la Sèvre
Niortaise, l'autre à l'ouest du sud au nord, la Sèvre Nantaise. Ses
bornes sont : au nord, le département de Maine-et-Loire; à l'est, celui
de la Vienne; au sud, celui de la Charente ; au sud-ouest, celui de
la Charente-Inférieure ; à l'ouest, celui de la Vendée.
Le sol de
ce département est extrêmement varié dans la forme de sa surface et
dans la nature des différentes sortes de terrains dont il se compose.
Il présente des plaines vastes et uniformes, c'est ce qu'on nomme la
Plaine; ailleurs il offre un pays montueux, hérissé de rochers, coupé
de vallées profondes et couvert de bocages, que l'on désigne sous le
nom de Gâtine. On y remarque une chaîne principale de collines assez
élevées qui se rattachent aux Cévennes, et qui traverse à peu près toute
l'étendue du département, du sud-est au nord-ouest. Cette chaîne forme
deux bassins principaux ; l'un incliné au sud-ouest, dont les eaux s'écoulent
immédiatement dans l'Océan par la Sèvre Niortaise, et l'autre, incliné
au nord-est, dont les eaux se portent dans la Loire par le Thouet. Elle
se dirige assez uniformément et sans interruption, jusque vers le milieu,
jetant seulement des branches latérales qui se sous-divisent à leur
tour, et des vallées où coulent des rivières et des ruisseaux; s'étend
ensuite en largeur, et forme, dans la partie septentrionale qu'elle
occupe presque entièrement, un vaste plateau traversé par un nombre
prodigieux de coteaux et de ravins, dont les eaux vont se décharger
dans la Loire, tant par la Sèvre Nantaise que par l’Argenton, qui va
lui-même se joindre au Thouet.
En quelques endroits, cette chaîne offre des collines médiocrement élevées; sur quelques points elle présente des monts assez notables, qui s'élèvent de 125 à 13o mètres au-dessus du niveau de la mer. De ces différentes hauteurs partent une multitude de rivières et de petits ruisseaux, au nombre de plus de trois cents, qui ont tous leur lit dans une vallée plus ou moins profonde, plus ou moins allongée. Celles de ces vallées qui traversent les bassins, sont généralement larges et formées par de doubles branches d'une assez grande élévation, qui se rattachent à la colline principale ; celles que l'on voit sur le plateau, et qui sont beaucoup plus nombreuses, sont, au contraire, étroites et fort profondes; la double rangée de rochers, qui les forment, a dans toute son étendue une élévation considérable, et ces rochers, presque partout nus, entassés et comme suspendus les uns au-dessus des autres, offrent des scènes très pittoresques. Le département ne renferme point de lacs, mais on rencontre dans la partie septentrionale un grand nombre d'étangs. La partie méridionale présente des marais sur les bords de la Sèvre et sur ceux du Mignon, dont la superficie est évaluée à 10 034 hectares.
Note : ce site officiel
du ministère de la culture vous donne toutes
les informations relatives à tous les lieux
et objets inscrits au patrimoine de chaque commune
d'un département.
Superficie :599
900 ha
Population: 369 270 hab.(2009)
Dénsité :62 hab./km²
Nb de communes : 303
Des trois départements qui ont été formés avec l'ancien
Poitou, celui des Deux-Sèvres occupe la région centrale
confinant à l'est à la Vienne, et à la Vendée à l'ouest,
il fait vers le sud-ouest une pointe dans la Saintonge,
à laquelle il a emprunté 25,921 hectares de son territoire.
Cette position explique l'absence d'une histoire particulière
pour cette contrée, après les notices que nous avons
données sur le haut et le bas Poitou, dans les parties
de cet ouvrage qui s'y rapportaient plus directement.
De la conquête romaine à l'établissement de la féodalité,
nous n'avons pas à citer un seul fait qui ne rentre
ou dans l'histoire générale de la province, ou dans
les annales particulières des localités dont nous nous
occuperons plus loin. Comme le reste du Poitou, ce pays
était habité par les Pictonnes, quand les Romains l'envahirent.
Après avoir pris part à la lutte nationale, qui se termina
par la chute d'Alésia et la défaite de Vercingétorix,
ils se soumirent à César, et firent partie de l'Aquitaine,
dont ils suivirent la fortune, tour à tour conquis par
les Wisigoths et par les Francs.
Au commencement
du VIème siècle, saint Agapit et saint Maixent
prêchèrent dans le pays la foi nouvelle, et y fondèrent
une abbaye. Vers 732, les Sarrasins y parurent, mais
pour être bientôt dispersés par Charles-Martel. Sous
les Carlovingiens, quand le pouvoir des grands vassaux
se substitua, dans la France entière, à l'autorité royale,
quand les puissants comtes de Poitiers, créés par Charlemagne,
eurent affermi leur domination sur les vastes territoires
devenus leurs fiefs héréditaires, on vit se reproduire
en petit, dans leur province, ce qui s'était passé dans
le royaume. Les barons, qu'ils avaient préposés à l'administration
des diverses parties de leurs domaines, affectèrent
vis-à-vis d'eux la même indépendance que les comtes
affectaient eux-mêmes envers le roi de France, et de
même que l'État n'était plus que l'assemblage fictif
de provinces à peu près indépendantes, le Poitou ne
fut plus que la réunion de seigneuries obéissant à des
maîtres différents, soumises chacune à des lois et à
des usages particuliers et trop souvent en guerre les
unes contre les autres. C'est alors que prirent naissance
ces désignations de Niortais, de Bressuirois, de Mellois,
souvenir rajeuni des subdivisions gauloises, qui donnaient
à chaque canton ou pagus ses frontières, son administration
et sa petite capitale. Ce fractionnement était un obstacle
à toute influence sérieuse des populations dans les
grandes affaires du pays. Il fallait qu'un danger commun
ou qu'un principe nouveau brisât les vieilles barrières,
ralliât toutes ces forces disséminées et refit un corps
de ces membres épars. Ce résultat, que l'ancien ordre
de choses ne permettait pas d'espérer de la paix, on
l'obtint d'abord de la lutte contre les Anglais, et
plus tard, quelque contradictoire que paraisse cette
assertion des guerres civiles et religieuses qui bouleversèrent
la province. L'émotion répandue par ces alternatives
de succès et de revers finit par pénétrer jusqu'au fond
des contrées les plus insouciantes ou les plus étrangères
aux grands intérêts qui étaient en jeu ; les sympathies
des populations devenant un appoint important dans les
opérations de la guerre, on se préoccupa de part et
d'autre de se concilier leur intérêt, dont jusque-là
on avait fait si bon marché.
C'est ainsi que nous
voyons en quelque sorte mis aux enchères le concours
de la bourgeoisie des villes, et cette précieuse alliance
achetée au prix de chartes communales, de privilèges
commerciaux, qui initiaient les habitants à la vie publique.
Cette révélation de droits nouveaux, rayonnant des cités
dans les campagnes, y éveilla des sentiments de solidarité
dans lesquels était en germe le nationalisme français.
Après une si longue ignorance, et cet isolement séculaire
de tous les intérêts généraux, il dut y avoir beaucoup
d'hésitation et de grandes incertitudes.
Les princes
anglais, ducs héréditaires de Guyenne, comtes de Poitou,
étaient-ils bien des étrangers ? Et le roi de Paris,
qui était si loin et qu'on ne voyait jamais, était-il
bien le monarque légitime. Il fallut de longues années
et de rudes épreuves pour que la vérité se dégageât
des événements. Les trois siècles qui séparent le règne
de Louis le Jeune de celui de Charles VII y suffirent
à peine ; mais, au XVème siècle, le résultat
était cependant en grande partie obtenu ; le Poitou
était province française et avait le sentiment de sa
nationalité. Un autre progrès s'était encore accompli,
le pouvoir s'était centralisé, et le roi, vainqueur
de l'étranger, rattachait plus directement à son autorité
souveraine les provinces dont il était le libérateur.
Les habitants du territoire des Deux-Sèvres commencent
donc sortir de la passiveté où le régime féodal les
avait tenus jusqu'alors, et entrent dans la sphère d'action
au milieu de laquelle s'agitent les siècles suivants.
Pendant la période anglaise, quoique le pays fût souvent
le théâtre de la lutte et se trouvât presque toujours
atteint par ses résultats, les habitants n'eurent encore
qu'un rôle relativement passif, et furent, pour ainsi
dire, moins acteurs que spectateurs c'est seulement
dans la période suivante que leur initiative commence
à se dessiner. Il semble que la population tout entière
prît à cœur de se venger de la longue insignifiance
de son passé par l'ardeur avec laquelle elle se jeta
dans le grand drame religieux du XVIème siècle.
Il n'y eut pas une ville, pas une bourgade qui ne se
mêlât alors aux révoltes des protestants, comme plus
tard aux agitations de la Ligue.
Ce fut à Châtillon
en 1568 que les chefs du parti réformé se rassemblèrent
pour la première fois après s'être assurés des places
voisines, telles que Thouars, Parthenay, Oyron, etc.
Dandelot, frère de l'amiral Coligny, fit capituler Niort
et passa au fil de l'épée la garnison de la tour Magné.
Saint-Maixent se rendit à lui dans le même temps.
Les armées des ducs de Montpensier et d'Anjou se rencontrèrent
près de Pamproux, où la campagne se termina par une
escarmouche. Les chefs protestants et la reine de Navarre
passèrent l'hiver à Niort, où ils s'occupèrent à réunir
des forces, à pourvoir aux finances de leur parti par
la vente des biens ecclésiastiques, et à se ménager
les secours de l'Angleterre. Après la journée de Moncontour,
si fatale aux protestants, les villes de Châtillon,
de Thouars et d'Oyron furent évacuées ; l'amiral Coligny
recueillit les débris de l'armée à Niort, et, après
y avoir laissé garnison, se retira à La Rochelle. Niort
capitula à l'arrivée du duc d'Anjou, et tout le Poitou
se soumit. Une tranquillité, du moins apparente, régna
jusqu'en 1588. A cette époque, les protestants, menacés
dans La Rochelle, se remirent en campagne. D'Aubigné
s'empara de Niort et de Saint-Maixent. Thouars et les
places environnantes se rendirent aux protestants un
an après. L'avènement de Henri IV au trône ramena la
paix. La guerre ne recommença qu'en 1621, sous Louis
XIII, lorsque le projet d'établir une république protestante
surgit dans le conseil des chefs protestants. La Bretagne
et le Poitou devaient être un des huit cercles de cette
république. L'énergie déployée en cette circonstance
par le cardinal de Richelieu et la présence du roi en
Poitou déterminèrent la soumission de Niort et de Saint-Maixent
; la prise de La Rochelle, en 1628, mit le sceau à la
paix définitive. Cent cinquante ans de paix succédèrent
à ces longues agitations mais le souvenir des rivalités
locales, le réveil des haines mal éteintes donnèrent,
en 1792, à l'explosion contre-révolutionnaire un caractère
particulier d'obstination. Quatre-vingt-sept communes
du département se soulevèrent et prirent une part active
à la lutte.
Les arrondissements de Bressuire et
de Parthenay fournirent aux rebelles leurs principaux
chefs, La Rochejacquelein entre autres.
Pendant que
Niort devenait le quartier général de l'armée républicaine,
Châtillon était le siège du conseil supérieur de l'armée
royale. Thouars fut la première ville importante dont
les Vendéens s'emparèrent ; Parthenay, Bressuire et
un grand nombred e villes de la Gâtine et du Bocage
furent tour à tour prises ; reprises, incendiées, démantelées,
détruites même pendant cette déplorable guerre civile.
Nulle part ne fut plus manifeste et plus tranchée la
ligne qui séparait alors l'opinion des villes de celle
des campagnes. Autant la naïve ignorance, le culte du
passé, les pieuses traditions de famille firent des
uns les aveugles instruments des agents royalistes,
autant l'intelligence des autres fut prompte à comprendre
le problème posé par la Révolution, autant cette conscience
de l'avenir les rattacha étroitement à sa cause.
C'est cette foi également ardente et sincère des deux
côtés qui donna à la lutte ses proportions gigantesques
; l'héroïsme des uns n'eut de comparable que le dévouement
des autres, et aux fabuleux exploits des intrépides
paysans il n'y a à opposer que les glorieuses et stoïques
expéditions de ces gardes nationaux des villes, eux
aussi soldats improvisés, quittant, eux aussi, leur
foyer, leur famille, et sachant aussi mourir pour la
cause qu'ils avaient embrassée. Depuis la pacification,
nous ne trouvons dans l'histoire du département qu'un
seul fait important à noter, c'est la fameuse conspiration
de Berton, en 1822. Si la guerre civile a trop longtemps
désolé le département des Deux-Sèvres il n'a pas eu,
en compensation, à souffrir de la guerre étrangère.
Situé loin de la frontière, il a dû à sa position de
n'avoir subi ni les hontes ni les malheurs des invasions.
Ce qui ne l'empêcha point de payer largement sa dette
à la patrie, en envoyant ses enfants aux armées qui,
en 1814 et 1815 d'abord, puis en 1870 et 1871, luttèrent
si vaillamment, mais hélas si inutilement, pour repousser
l'étranger.
Quoique, depuis cinquante ans, les mœurs
se soient bien modifiées dans la contrée qui nous occupe
quoique, là comme ailleurs, s'accomplisse chaque jour
l'œuvre de progrès et d'assimilation, le département
des Deux-Sèvres est encore un de ceux qui a gardé, dans
certaines parties, le plus de son ancienne originalité
nous en emprunterons quelques traits à un de ses plus
habiles administrateurs, M. Dupin, qui y fut préfet
dès les premières années de l'Empire :
« Le département
des Deux-Sèvres, composé de trois parties bien distinctes,
savoir le Bocage, qui comprend tout le nord-ouest, c'est-à-dire
la presque totalité des premier et deuxième arrondissements
et une partie du troisième ; le Marais, qui occupe une
portion sud-ouest du troisième arrondissement, et, enfin,
la Plaine, offre les mêmes différences dans la constitution
physique et morale de ses habitants. »
L'homme du
Bocage a une taille médiocre, mais assez bien prise
; tête grosse et ronde, teint pâle, cheveux noirs, yeux
petits, mais expressifs son tempérament est bilieux
et mélancolique son esprit est lent, mais non sans profondeur
son cœur est généreux, mais irascible sa conception
peu facile, mais sûre. Il a conservé toute la simplicité
des mœurs anciennes, quoique la guerre en ait un peu
altéré la pureté. Il est bon ; hospitalier, juste et
d'une fidélité inviolable à ses engagements ; mais taciturne
à l'excès, méfiant pour tout ce qui vient de l'autorité,
fortement attaché au sol qui l'a vu naître, plus attaché
encore à la religion de ses pères, et capable des actions
les plus héroïques pour la défense de sa foi. Dans tous
les temps, on l'a vu prendre part aux guerres religieuses.
Son humeur mélancolique et les préjugés superstitieux
qui le gouvernent tiennent essentiellement au pays qu'il
habite. Il vit isolé dans sa chaumière, ne voyant autour
de lui aucune autre habitation. S'il sort pour cultiver
son champ, il y est encore seul ; de larges fossés,
des haies impénétrables lui interdisent la vue de son
semblable. Il n'a d'autre société que celle de ses bœufs,
à qui il parle sans cesse, et pour qui même il fait
des chansons. S'il veut vendre quelques bestiaux à une
foire, la foire est rarement à plus d'une lieue ; souvent
même les marchands viennent le trouver dans son enclos.
Il n'y a dans ces contrées aucune ville qui répande
la civilisation aucune route qui y conduise les étrangers,
qui favorise la circulation, qui permette aux habitants
de se fréquenter, et aux passions humaines de s'adoucir
et de s'user par un frottement journalier. »
La
Plaine est traversé par plusieurs grandes routes, et
ses habitants sont plus civilisés que ceux du Bocage
; ils ont un caractère moins prononcé et plus confiant
; ils aiment le repos, la danse, le vin, sans toutefois
en faire excès leur taille est plus élevée, leur physionomie
plus ouverte, leur carnation plus vive. Ils sont aussi
braves, mais moins industrieux et plus processifs ce
qui provient sans doute de ce que leurs propriétés n'ont
pas des limites aussi immuables. Quoique leur esprit,
plus flexible, se soit plus facilement détaché des prêtres,
il n'est pas moins ouvert à tous les préjugés de l'ignorance.
Il existe pourtant, dans la Plaine, une différence assez
notable entre les catholiques et les protestants ceux-ci
sont, en général, plus laborieux et plus instruits.
» L'habitant du Marais est encore plus grand que celui
de la Plaine il a plus d'embonpoint, ses membres sont
plus massifs, mais il manque de santé et d'agilité ;
il est grossier, apathique et ne pousse pas loin sa
carrière. Une cabane de roseaux, un petit pré, quelques
vaches, un bateau qui sort à la pêche, et souvent à
voler du fourrage le long de la rivière, un fusil pour
tuer les oiseaux d'eau, voilà toute sa fortune et tous
ses moyens d'industrie. » Les usages, sauf les cérémonies
des noces, qui offrent quelques traits particuliers,
n'ont rien de remarquable. Les fêtes et divertissements
tiennent aux travaux champêtres et à la croyance religieuse.
C'est ainsi que la récolte des châtaignes, dans certaines
contrées, et, dans d'autres, la toute des brebis, le
fanage, la moisson sont accompagnés de jeux et de danses
; que le jour de tel saint il faut se régaler de crêpes
pour empêcher le blé de se carier, etc. Pendant l'été,
il y a beaucoup de ballades ou fêtes champêtres. C'est
là que les hommes boivent et que les jeunes gens dansent
au son de la musette, ou plus souvent à la voix d'une
vieille femme qui chante gravement un air monotone et
sans paroles ; c'est là que se forment les inclinations,
que s'arrangent les mariages. Une jeune fille qui paraît
à la ballade sans un garçon qui lui tire les doigts
est méprisée de ses compagnes. C'est aussi aux ballades
qu'on choisit les domestiques ils y viennent parés d'épis,
s'ils se destinent aux travaux de la moisson ; de fleurs,
s'ils veulent servir aux travaux du ménage. Les fêtes
de l'été ont donné naissance aux inclinations, les mariages
se concluent en automne. Le fiancé, accompagné d'un
de ses parents et d'un parent de sa prétendue, va faire
les invitations. Il a grand soin de régler l'ordre de
ses visites sur les différents degrés de parenté ; c'est
une étiquette à laquelle on tient strictement. Il attache
dans chaque maison, au lit du maître, un petit bouquet
de laurier, orné de rubans, et fait son invitation par
un compliment très long, qui est le même pour tous et
de temps immémorial. Ces visites sont accompagnées de
fréquentes libations. Le jour des noces est suivi d'un
lendemain plus joyeux et plus bruyant encore ; l'épisode
le plus caractéristique de la cérémonie est le bouquet
symbolique offert à la mariée par les jeunes filles,
ses compagnes, accompagnant leur offrande d'une chanson
qui n'a pas varié depuis trois cents ans, et qui retrace
toutes les peines réservées à la jeune femme dans son
ménage. Cette naïve complainte a été citée trop souvent
et est aujourd'hui trop connue pour que nous lui donnions
place ici. Nous ne dirons rien non plus des naissances
et des funérailles, qui ne présentent aucun détail de
remarquable originalité.
L'origine du nom de cette ville, qui paraît celtique, ou peut-être provenir de deux mots danois-Anglos-Saxons, New-York, que l'on traduit par nouvel ouvrage, ville nouvelle, d'où la corruption des siècles avait fait Niort, se perd dans la nuit des temps. Elle était déjà considérable sous les rois de la seconde race ; car elle donnait le nom de Pagus niortensis, à une division territoriale de la province du Poitou. Besly, dans son Histoire des comtes de Poitou, cite un acte passé au IXème siècle, par-devant un notaire de Niort. Le château et le fort Foucault paraissent aussi avoir été primitivement construits vers cette époque, pour arrêter les incursions des Normands, qui alors remontaient la Sèvre, presque jusqu'à sa source, pour piller, voler et enlever les habitants des deux rives. Le même Besly parle d'un comte du Poitou, Guillaume IX, qui, en 1086, fonda à Niort un monastère d'un genre fort singulier, dans lequel on ne recevait que les femmes les plus débauchées, et les mieux disposées à rendre service au public. On croit que c'est dans ce même local que fut établi dans la suite le couvent des frères capucins. (Les couvents du genre du celui de Guillaume IX se sont depuis singulièrement multipliés à Niort, et dans ce moment on en compté jusqu'à cinq.) En 1104, le château et le fort Foucault, placé vis-à-vis, furent brûlés ; mais en 1158, l'un et l'autre furent reconstruits, ainsi que le moulin du château, pour le service de la place, par les soins de Henri II, roi d'Angleterre, qui, en 1252, avait épousé Aliénor ou Éléonore, duchesse d'Aquitaine et comtesse de Poitou, que venait de répudier le trop susceptible Louis VII, roi de France. En 1223, la duchesse Aliénor y établit sa résidence.
Niort a été assiégé onze fois
: en 1223 , en 1230, en 1345, eu 1355 , en 1371, en
1373, en 1558, en 1559, en 1576 , en 1588, et en 1689.
C'est au siège de Niort, en 1558, que la comtesse du
Lude, présente au dernier assaut, accablait des reproches
les plus amers les capitaines qui reculaient, et promettait
au contraire aux plus braves, pour prix de la victoire,
les plus jolies filles de Niort, qui, à cette époque,
comme a présent y étaient en assez grand nombre.
En 1285, sous Philippe le Hardi, le port de Niort fut
déclaré franc. Niort tomba en 1360, sous le roi Jean
II, dans la puissance des Anglais, en exécution du traité
de Brétigny ; mais il fut repris, en 1371, par le connétable
du Guesclin, aidé de la bravoure des Niortais. En 1377,
on creusa un nouveau port ; c'est le canal actuel de
navigation. Eu 1383 , construction d'un hôtel de ville.
En 1455, établissement des trois foires franches de
Niort. En 1461, lettres patentes délivrées par Louis
XI, qui accorda les privilèges de la noblesse au maire,
aux douze échevins, et aux douze conseillers qui faisaient
partie du corps de ville, pour en jouir à perpétuité
eux et leurs descendants. En 1484,1498, i548 , etc.,
confirmation de ces mêmes privilèges par Charles VIII,
Louis XII, Henri II, et plusieurs de leurs successeurs.
En 1565, lettres patentes délivrées par Charles IX,
pour l'établissement d'une cour ou juridiction consulaire.
En 1602, maladie contagieuse, qui fait périr une partie
des habitants de Niort. En 1461, concession par le pape,
aux maire, échevins, conseillers, pairs et bourgeois
de Niort, du singulier privilège d'être ensevelis dans
l'habit et ceints du cordon des frères cordeliers. Le
28 novembre 1635, naissance de Françoise d'Aubigné,
plus connue sous le nom de marquise de Maintenon, dans
la prison de Niort, dite la Conciergerie, où son père
était détenu pour crime de fausse monnaie. Cette prison,
qui n'était pas alors celle qui existe maintenant, avait
une sortie sur la halle et l'autre dans la rue du Soleil
; elle est actuellement habitée par divers particuliers,
et connue sous le nom de Passage de Candie, ancienne
dénomination d'une auberge qui avait succédé à la prison.
Cette ville est la cinquième de France qui eut primitivement
une municipalité. Ses chartes sont de 1222. Elle était
protégée par un château formé de deux grosses tours
hautes de trente- cinq mètres et demi, et réunies par
un massif. Ce château ou donjon subsiste encore, et
sert de maison d'arrêt ; mais l'enceinte du château
et les murs très-élevés qui entouraient la ville ont
été détruits, ainsi que les fossés très profonds dont
elle était ceinte; ils ont été remplacés depuis la révolution
par des rues bien alignées, et par des maisons bâties
avec goût et élégance.
La ville de Niort est située
sur le penchant de deux collines au pied desquelles
coule la Sèvre Niortaise, et possède d'agréables promenades.
On y arrive par de belles roules plantées d'arbres magnifiques
; les environs offrent des sites charmants, notamment
les rives du ruisseau de Lambon, dont les eaux viennent
se perdre dans la Sèvre. Cette ville, autrefois mal
bâtie, est devenue, par les divers travaux qu'on y a
exécutés depuis plusieurs années, une des cités les
plus agréables du Poitou. On y voit deux églises paroissiales,
dont l'une, qui passe pour être un ouvrage des Anglais,
est d'une très-belle architecture golfique: la flèche
a 88 pieds d'élévation ; l'hôtel de ville était l'ancien
palais d'Éléonore d'Aquitaine; il y avait une école
d'horticulture, vaste et bien entretenue, réunie au
jardin de botanique, mais elle n'existe plus.
Quelques écrivains pensent que
Bressuire est l'ancienne Segora mentionnée dans l'Itinéraire
d'Antonin. Guyard de Berville, dans son Histoire de
du Guesclin, dit qu'en 1371, époque où les Anglais en
étaient maîtres, cette ville était considérable par
le nombre et la richesse de ses habitants, par la bonté
de ses fortifications, et surtout par son château :
elle avait un gouverneur, une garnison, et du Guesclin
fut obligé d'en faire le siège dans toutes les formes
; il la prit d'assaut et passa la garnison au fil de
l'épée; le château capitula; la ville fut pillée par
le soldat, qui y fit un riche butin.
Avant la révolution,
les guerres de religion, des causes générales de dépopulation,
et plusieurs banqueroutes éprouvées par ses principaux
fabricants, avaient déjà réduit cette ville à un grand
étal de décadence. L'enceinte de ses murs, qui ne servait
plus qu'à assurer la perception de l'octroi, attestait
bien encore son ancienne importance ; mais sur plusieurs
points, des jardins, des prés, des champs avaient remplacé
les habitations. La guerre de la Vendée a consommé sa
ruine; elle fut alors entièrement réduite en cendres,
à l'exception d'une seule maison et de l'église. On
pense que l'établissement des routes stratégiques lui
sera très-profitable.
Cette ville, située dans une
contrée agreste, est bâtie sur une colline au bas de
laquelle serpente la petite rivière de l'Argenton. On
y remarque une fort belle église entièrement construite
en granit, et surmontée d'une belle tour de 170 pieds
d'élévation, en forme de clocher.
Parthenay est une ville ancienne
dont l'origine est inconnue : on sait seulement qu'elle
était autrefois très-forte, qu'elle était entourée de
doubles fossés et de triples murailles, et qu'elle a
soutenu glorieusement plusieurs sièges, notamment en
1486, époque où elle se rendit à Charles VIII, qui en
fit détruire les fortifications. C'était anciennement
la capitale de la Gatine Parthenay souffrit considérablement
dans la guerre de la Vendée. Le 20 juin 1793, Westermann,
qui dans la Belgique s'était distingué par son audace,
fut envoyé au mois de juin avec sa légion dans la Vendée.
Un corps des royalistes, fort de six mille hommes, se
rassembla à Parthenay, sous les ordres de Lescure: Westermann
s'y porte le 20 juin, par une marche forcée. A deux
heures du matin il égorge les avant postes à la tête
de douze cents hommes ; il pénètre avec son infanterie
dans cette petite ville, dont il a enfoncé les portes
à coups de canon; ses soldais y entrent au pas de charge
et exterminent tout ce qui ose leur résister. Un prêtre
vendéen allait mettre le feu à un canon, il est abattu
par le sabre d'un républicain. Lescure surpris résiste
faiblement ; abandonné de ses soldats, il ne doit son
salut qu'à l'obscurité qui le dérobe aux coups des vainqueurs.
Westermann, n'osant pas s'engager dans ce pays insurgé,
reprend la route de Saint-Maixent. Lescure rentre à
Parthenay, et préserve cette ville des flammes auxquelles
voulaient la livrer les soldats, pour punir les habitants
d'avoir favorisé Westermann. Ce général, dont la troupe
s'était grossie des renforts qu'il avait trouves à Saint-Maixent,
se présente de nouveau devant Parthenay, d'où Lescure
fuit à son approche. Westermann, qui avait fait observer
la plus exacte discipline à ses soldats, écrit au gouvernement
: «Ma légion ne sera pas accusée d'avoir enlevé une
obole aux habitants de Parthenay. »
Parthenay est
située près du Thouet, dans une contrée entrecoupée
de montagnes et de forêts, sur une colline qui la divise
en haute et basse ville. C'est une ville en général
fort mal bâtie, où l'on remarque les restes d'un ancien
château, entouré de fossés et de contrescarpes, et flanqué
de cinq tours ; la porte Saint-Jacques, construction
ogivale du XIIe siècle, surmontée de créneaux et flanquée
de deux tours elliptiques de vingt mètres de hauteur
; l'église Saint- Jean , bâtie dans le IXe siècle ;
d'anciennes prisons très-fortes, élevées de 70 pieds
audessus du Thouet, et dont font partie les tours de
l'horloge.
Thouars a été le théâtre d'un combat sanglant dans les guerres de la Vendée. Le 5 mai 1793, Quétineau, général républicain, ayant six mille hommes sous son commandement, reçut l'ordre d'occuper Thouars. Le gué de la Vrine fût gardé par quatre cents volontaires de la Vienne. Les troupes de Quétineau présentaient déjà leur front de bataille à une portée de canon des murs de Thouars, lorsque vers les six heures du matin, les Vendéens firent une première attaque sur trois divers points ; Bonchamp, à la tête de sa cavalerrie, passa le gué à la nage, et sabra le petit nombre de républicains qui gardaient ce point. Le passage du gué au pouvoir de Bonchamp, ce dernier se porta en forces sur Thouars, tandis que Larochejacquelin, tout en attaquant le Pont-Neuf, tenait l'armée des républicains en échec; le Pont-Neuf n'ayant pas été coupé, fut forcé. Quétineau, faisant ses dispositions pour combattre, s'avance. Le feu commence d'abord avec vivacité ; la fortune parut pendant quelques instants fort indécise; mais les Vendéens élargissent leur front, déploient leurs ailes, et, se formant en demi-cercle, débordent les républicains qui s'ébranlent de toutes parts, et commencent leur retraite. Quétineau, au lieu d'ordonner la retraile sous Loudun et Poitiers, entreprend de défendre la ville. Les Marseillais, outrés de la conduite de ce général, ne voulurent point partager sa défaite, et firent serment de se défendre jusqu'à la dernière goutte de leur sang; en même temps, ils se forment en bataillon carré, et se précipitent dans les rangs des Vendéens, la baïonnette en avant. Trois fois le drapeau blanc allait être arboré sur les remparts de Thouars, trois fois ces braves républicains du midi de la France l'arrachent, et le foulent aux pieds; mais l'avantage du nombre fit obtenir aux Vendéens une victoire complète. Tous les Marseillais périrent dans cette action mémorable, et y périrent glorieusement. Les Vendéens, sentant de quelle importance il était de s'emparer immédiatement de Thouars , montent à l'assaut, escaladent les murs, et y arborent leur drapeau. Quétineau se rendit à discrétion. En 1823, le général Berton se rendit maître de cette ville avec treize hommes déterminés, y rallia ses partisans, et se dirigea de là sur Saumur, où l'on sait qu'échouèrent ses projets.
L'origine de cette ville se perd
dans la nuit des siècles. Antérieurement à la conquête
des Gaules par Jules César, dans le temps que les Pictones
étaient gouvernés par des rois de leur nation, Thouars
était une place extrêmement forte, connue alors sous
le nom de Childoac. Sous le règne de Tibère, cette ville
prit le nom latin de la rivière qui l'arrose, Tuedae
arx, dont on a fait par corruption Thouars. Depuis la
conquête des Gaules par les Francs, il n'en est fait
mention dans les chroniques qu'en 759, où cette ville
fut emportée d'assaut, saccagée, brûlée et rasée par
Pépin le Bref. Il paraît que ce n'était pas alors une
ville très considérable, puisque Éginard, auteur contemporain,
la nomme dans ses annales Castellum Thoarcis. Quoi qu'il
en soit, elle ne tarda pas à sortir de ses ruines, et
à réparer ses pertes. Charles le Chauve, la donna avec
le titre de duc à un célèbre capitaine nommé Èble, dont
un fils du nom de Arnoul, s'établit à Thouars en 885,
et fit fortifier la ville. Au XIIIe siècle, les rois
d'Angleterre, dont les vicomtes de Thouars étaient les
vassaux, y bâtirent un palais et deux tours : l'une,
appelée tour au Prévôt, pour le logement de leurs gardes
et la sûreté de leurs personnes ; l'autre, nommée tour
du prince de Galles (aujourd'hui tour Grénetière), pour
être occupée par leurs enfants et les principaux officiers
de leur maison. En 1372, le connétable du Guesclin,
après s'être emparé de Saint-Maixent, de Melle, etc.,
vint mettre le siège devant Thouars avec une armée de
plus de quarante mille hommes. Le siège dura plusieurs
mois On fut longtemps à combler les fossés de la place,
dont les moindres avaient plus de cent pieds de. largeur,
et plus de trente de profondeur. Deux assauts n'ayant
produit aucun résultat, le connétable fil venir de Poitiers
six pièces de canon pour foudroyer les remparts ; mais
celte artillerie servit moins qu'une machine de guerre,
que l'on appelait Truie, au moyen de laquelle on faisait
jouer des balistes qui lançaient des pierres énormes
sur les remparts, et qui protégeait des hommes armés
de pics et de leviers avec lesquels ils sapaient les
murailles sans avoir rien à craindre des assiégés. Avant
de donner un dernier assaut, le connétable fit faire
au gouverneur une dernière sommation, et celui-ci, après
avoir consulté son conseil, se décida à capituler aux
conditions suivantes; qu'il y aurait une suspension
d'armes jusqu'à la Saint-Michel; 2° que si ce jour-là,
le roi d'Angleterre en personne ou l'un des princes
ses fils ne se présentaient avec des forces suffisantes
pour en faire lever le siège, le gouverneur livrerait
la place au connétable. La ville n'ayant point été secourue,
du Guesclin se présenta sous ses murs la veille de la
Saint-Michel de l'année 1372 ; le lendemain, les portes
de Thouars lui furent ouvertes, et il y fit une entrée
triomphale. La ville de Thouars fut érigée en duché
en 1563, et en duché-pairie en 1585. Quelques années
avant, les protestants s'étaient beaucoup multipliés
dans celle ville, où ils bravaient, à couvert de la
protection du duc, les édits rigoureux dont ils étaient
frappés ailleurs; la duchesse, excitée par de fougueux
prédicants, persécuta tous les monastères d'hommes et
de filles, chassa de Thouars les dominicains, et brûla
une partie du couvent des cordeliers, sous le prétexte
que ces moines l'avaient indiscrètement lorgnée de leurs
cellules, au moment où elle allait se mettre au bain;
plusieurs églises furent aussi brûlées ou démolies par
ses ordres. Thouars était autrefois une ville trois
fois plus peuplée qu'elle ne l'est aujourd'hui: le décroissement
de sa population eut pour cause la révocation de l'édit
de Nantes, en r685. Cette ville avait alors des fabriques
considérables de serges et d'étainines, auxquelles étaient
occupées beaucoup de familles protestantes, qui furent
porter dans les pays étrangers leur industrie et leurs
capitaux. Depuis cette émigration, les fabriques ont
considérablement décliné.
La ville de Thouars
est située sur le penchant d'une colline dont le sommet
est de niveau avec la plaine, et dont l'extrémité touche
au rocher qui couvrait l'ancienne Childoac et le dominait,
ce qui donne à cette ville la forme d'un amphithéâtre.
Le Thouet, en se courbant en arc vers le sud et l'ouest,
l'entoure dans plus de la moitié de son étendue, et
lui sert ainsi de fortification naturelle. Tout ce qui
n'est pas entouré par la rivière est fortifié de murs
bâtis dans le XIII e siècle, flanqués de grosses tours
à la distance de 15 mètres les unes des autres. Presque
partout les murs ont 9 mètres de hauteur et 2 de largeur;
ils sont bâtis de moellons choisis et piqués ; quelques
tours même sont construites en pierre de taille : quatre
cents ans de vétusté et les sièges que ces murailles
ont éprouvées, leur ont à peine fait éprouver quelques
dégradations. Thouars était autrefois entouré d'un double
fossé coupé en talus, au milieu duquel était une fausse
braie, que l'on a comblée avant 1789. La ville avait
six portes : la plus remarquable était la porte au Prévôt
ou de Poitiers; elle est composée de deux tours adossées
l'une à l'autre, et ayant chacune 120 pieds de hauteur
et 24 de diamètre. Si l'on ajoute à ces fortifications
un château presque inabordable, revêtu de tout ce que
l'art pouvait alors ajouter à l'avantage de la situation,
on concevra facilement qu'avant l'usage du canon, Thouars
devait être la plus forte place du Poitou. Des nombreux
édifices que possédait cette ville, il ne reste plus
que le château et quelques débris de l'abbaye de Saint-Jean.
Le château de Thouar est situé sur un rocher de granit, élevé de plus de 100 pieds au-dessus du niveau des eaux de la rivière du Thouet. Il fut bâti en 1635, par Marie de la Tour d'Auvergne, épouse de Henri de la Trémouille, duc de Thouars, sur le plan que Philibert de Lorme avait donné à Marie de Médicis, pour bâtir le palais des Tuileries. Ce château est composé d'un grand corps de logis surmonté d'un dôme, et de quatre pavillons formant une seule ligne de 120 mètres de longueur sur 27 de largeur. Le Thouet l'environne à l'est, au sud et à l'ouest. Quatre terrasses, formant autant de jardins en amphithéâtre placés au-dessus les uns des autres, offrent un aspect pittoresque : sur la plus élevée se trouve le parterre, composé de terres rapportées sur un roc originairement aigu et escarpé. Chacune de ces terrasses est revêtue d'un mur en talus el pourvue d'un escalier. La façade du château est à l'ouest : elle est précédée d'une cour carrée à portiques voûtés, surmontés d'une terrasse bordée de balustrades. L'escalier qui conduit aux appartements du premier étage, est couvert d'un donjon bordé de balustrades, qui forme aussi une coupole intérieure; les appuis et les rampes sont de marbre jaspé. Cet escalier est très-bien éclairé ; il avait beaucoup de rapport avec celui du palais des Tuileries avant les restaurations qu'on y a faites récemment. Les appartements sont très-vastes et bien distribués. Les offices, placées sous le rez-de-chaussée et taillées dans le roc, sont vastes, bien éclairées; on y voit deux puits intarissables creusés dans le rocher.
Au nord du château est une grande et belle chapelle, qui offre la rare singularité de quatre chapelles superposées les unes au-dessus des autres. La plus basse est taillée dans le granit et servait de sépulture aux ducs de Thouars; la seconde formait l'église paroissiale de Notre-Dame du Château ; la troisième portait le nom de chapelle de la Vraie Croix ; la quatrième, la plus vaste et la plus belle, est la chapelle ducale qui avait été érigée en chapitre: elle est bâtie dans le genre gothique, très-régulière et bien éclairée ; la principale porte, d'une sculpture hardie et délicate, était autrefois ornée de figures en relief d'assez bon goût, qui ont été mutilées. Le château de Thouars, regardé à juste titre comme un des plus beaux de l'Europe, a coûté à Marie de la Tour, d'après les comptes et mémoires qui sont restés aux archives, douze cent mille livres de l'époque, non compris les remblais, les transports et une partie de la main-d’œuvre, qui ont été faits par des corvées gratuites : on estime qu'une somme de douze millions ne suffirait pas aujourd'hui pour faire faire de pareils travaux. M. Drouyneau de Brie, dans ses mémoires historiques manuscrits, prétend qu'une jalousie de Marie de la Tour contre le cardinal de Richelieu, donna lieu à la construction du château de Thouars. Voici comment l'auteur s'exprime à ce sujet : « Le cardinal de Richelieu, qui n'était pas encore premier ministre, mais qui n'était guère moins puissant que s'il eût été revêtu de cette dignité, eut envie d'avoir une terre titrée, et visait celle de Thouars, se flattant de pouvoir l'acheter; toutefois il ne s'était encore ouvert à personne, parce qu'ayant de grandes idées d'embellissement, il était bien aise de savoir si le lieu y était propre. Ayant envoyé des gens pour l'examiner et lui en apporter le plan, ils furent pris sur le fait et menés à la duchesse. Marie de la Tour, femme d'esprit, mais de la dernière hauteur, ayant appris le sujet de leur voyage, fut vivement piquée contre le cardinal, et, pour s'en venger, fit jeter les fondements du château dans l'endroit même qui avait été marqué par les émissaires de Richelieu. Elle n'en fit d'abord achever qu'un pavillon ; depuis elle le fit reprendre et perfectionner autant qu'elle le put de son vivant. » Ce beau château a conservé jusqu'à ce jour ses nobles proportions ; mais il a perdu son éclat et une partie de sa beauté. La serre, où l'on conservait deux cents pieds de grands orangers, qui ont été sacrifiés pendant les temps orageux de la première révolution, n'offre plus que des ruines; des fortifications, élevées en 1815, pour défendre la ville contre les Vendéens, ont puissamment contribué à la dégradation de cet immense édifice, qui appartient aujourd'hui à la commune de Thouars, à laquelle il a été aliéné par les héritiers du duc de la Trémouille, à la charge de voter annuellement une somme suffisante pour l'entretien des bâtiments
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