Histoire de la Corse


Note importante : La Corse est une ile, et si pour des raisons purement administratives, elle a été divisé en deux département : Haute Corse et Corse du Sud; elle n'en demeure pas moins une entité et les Corses seront, je le pense, d'accord avec moi, pour ne pas la scinder dans ces pages.
L'histoire de la Corse remonte à la plus haute antiquité. On ne sait pas au juste quels furent ses premiers peuples les uns ont prétendu que ce furent les Phéniciens; d'autres, et avec raison selon nous, ont pensé que les premières colonies vinrent des côtes de la Toscane. Quoi qu'il en soit, l'arrivée des Phéniciens en Corse parait être mise hors de doute. On pense même que la ville d'Aléria, ville très ancienne et dont Hérodote parle, dut être fondée ou agrandie par eux. Plus tard, les Phocéens, accueillis par Harpagus, un des lieutenants de Cyrus, allèrent établir leur domination dans l'ile. Mais, au bout de quelques années, ils en furent chassés par les Étrusques qui bâtirent en Corse une ville appelée Nicéa et qui existait encore du temps de Diodore de Sicile. En 494 de la fondation de Rome, après la conquête de la Sicile, les Romains essayèrent une descente en Corse, ayant à leur tête Cornélius Scipion. Ils s'emparèrent de la ville d'Aléria, mais ils en furent expulsés quelque temps après. Depuis cette époque, les insulaires purent jouir pendant une vingtaine d'années de leur indépendance.

Vers la fin de la seconde décade du VIème siècle de Rome, sous le consulat de C. Licinius Varus et P. Cornélius Lentulus Claudinus, une guerre nouvelle fut résolue contre la Corse. Marius Claudius, lieutenant de Licinius, partit et ne tarda pas à prendre terre dans l'ile. Là, se voyant à la tête d'une armée respectable, il se croit en état de soumettre les insulaires avec lesquels il ne tarda pas à engager le combat. La victoire ne demeura pas longtemps incertaine, et les troupes de Claudinus, assaillies de toutes parts, étaient au moment d'être taillées en pièces, lorsque la présence de Licinius vint mettre la victoire du côté des Romains. Plus tard, Rome se vit obligée d'entreprendre de nouvelles expéditions contre cette ile. Prévoyant que les Corses parviendraient tôt ou tard à secouer le joug de l'étranger et lui feraient toujours subir des pertes considérables, le sénat ordonna, en 590, l'envoi d'une armée consulaire pour les réduire à jamais. Le consul, M. Tarentius Talno, fut placé à la tête de l'expédition. La victoire resta aux Romains, et Talno mérita les honneurs du triomphe. A la suite de cette longue et pénible lutte, la paix fut enfin conclue, et la Corse cessa d'être indépendante. Marius et Sylla y fondèrent des colonies, et le premier fit bâtir, à l'embouchure du Golo, une ville qui fut appelée Mariana du nom de son fondateur.

La période comprise entre 660 et 673
apparait comme une des plus brillantes de l'histoire de la Corse.
La Corse, bien que soumise, jouit d'une certaine liberté tant
que Rome fut libre mais, depuis la dictature de Jules César,
elle perdit, comme le reste du monde, le droit de s'administrer
elle-même. Elle reçut aussi un préteur ou préside qui représentait
le despote de la métropole. Sous l'empire, elle partagea le
sort commun. Pendant la domination de Claude, Sénèque le philosophe,
exilé en Corse, fut confiné sur la pointe du Cap-Corse, où il
parait avoir habité une tour qui a conservé son nom.
Lors
de l'affaiblissement de l'empire et de la résolution de Dioclétien
de le partager avec Maximien, l'île de Corse resta sous le gouvernement
du premier (202). Elle servit ensuite d'asile, avec la Sicile
etla Sardaigne, aux Romains qui fuyaient devant les Goths conduits
par Radagaise, et tomba en 457sous la puissance redoutable de
Genséric. Les Vandales exercèrent dans cette ile toutes sortes
d'atrocités. Ils en furent chassés après une domination de soixante-dix-sept
ans. Les Grecs leur succédèrent, mais ceux-ci furent contraints
d'abandonner à leur tour le pays à Totila.
Les exploits de
Narsès, qui détruisit la puissance des Goths, firent rentrer
la Corse sous la domination impériale. Les habitants furent
très malheureux à cette époque. Il y eut un moment où la tyrannie
des agents impériaux n'eut plus de bornes. Les insulaires ne
pouvaient et ne savaient plus se soustraire aux vexations auxquelles
ils étaient en butte qu'en fuyant sur une terre étrangère. Saint
Grégoire nous apprend que les Corses, abandonnant en foule leur
pays natal, cherchaient un asile sur le continent et demandaient
aide et appui aux ducs lombards. Les charges que leur imposaient
les Grecs étaient si énormes qu'ils étaient obligés de vendre
leurs enfants pour y satisfaire. Les Sarrasins eurent leur tour
en Corse; mais leur empire ne fut que de courte durée, et c'est
ainsi que l'île se trouva comprise dans les stipulations que
Pépin fit à l'autorité papale en 754. Dans la suite, les successeurs
de Charlemagne firent donation de l'île à la famille de Boniface,
baron de Toscane.

A la mort de l'empereur, Hugues, devenu
marquis de Toscane par la mort de Lambert, dernier rejeton de
la famille illustre de Boniface (928), tous les petits barons
ou seigneurs des provinces de l'ile devinrent autant de souverains
en Corse. Chaque seigneur féodal eut son gouvernement. Le peuple
applaudit d'abord à cette mutation dans le pouvoir. Ses illusions
et ses espérances le rendirent complice d'une foule d'usurpations
qui allaient se commettre en son nom. En effet, les comtes du
pays ne tardèrent pas à s'attaquer réciproquement, chacun nourrissant
l'espoir de joindre à son État les possessions de son voisin.
Le pays entier fut bientôt en combustion. Tous les liens sociaux
se trouvèrent brisés la loi n'était plus qu'un vain mot. En
cet état de choses, le comte de Cinarca, le plus puissant des
seigneurs insulaires, entra en campagne à la tète d'une armée
considérable. Il avait conçu le projet d'assujettir tous les
barons et de se rendre unique souverain du pays. Au milieu de
ces circonstances désastreuses, le peuple fatigué de souffrir
prit les armes pour son compte. II mit à sa tête un homme de
génie, Sambacuccio, qui le réunit dans la vallée de Morosaglia,
où il fut investi d'une espèce de dictature (en 1005). Le résultat
de cette grande et solennelle assemblée du peuple fut immense.
Le chef de la nation corse fit rentrer tout le monde dans l'ordre,
proclama l'indépendance des communes et anéantit la féodalité.
Sous l'influence de cette révolution, une organisation remarquable
se développa dans l'ile. Chaque commune ou paroisse nommait
un certain nombre de conseillers qui, sous le nom de Pères de
commune, étaient chargés de l'administration de la justice sous
la direction d'un podestat qui en était comme le président.
Les podestats des communes de chacun des États ou districts
affranchis élisaient un membre du suprême conseil chargé de
faire les lois et règlements. Ce fut le conseil appelé des Douze,
du nombre des districts qui concouraient à sa nomination. Enfin,
dans chaque État ou district, les pères de commune élisaient
un magistrat qui, sous le nom de Caporale, avait mission de
défendre les intérêts des pauvres et des faibles et de leur
faire rendre justice contre les puissants et les riches. Cependant
cette organisation puissante et libérale ne put préserver les
insulaires du joug de l'étranger. Sambacuccio étant mort vers
l'année 1012, la discorde divisa de nouveau le pays et répandit
partout la perturbation.
Le comte de Cinarca profita de
ces circonstances pour recommencer ses armements contre les
États voisins. Le peuple, en présence d'éventualités aussi terribles,
se mit sous la protection d'un prince ou seigneur étranger capable
de le défendre contre les ennemis. Son choix se porta sur Guillaume,
marquis de Massa et de Lunigiana. Guillaume accueillit avec
faveur l'offre du peuple Corse et, sans perdre de temps, il
s'embarqua pour l'ile, où il réduisit le comte de Cinarca.

Au marquis Guillaume succéda le marquis Hugues, son fils, vers l'année1020. Rome qui, depuis Pépin et Charlemagne, avait obtenu la cession de l'ile, ne l'avait cependant jamais possédée. A la fin, le Saint-Siège songea à faire valoir ses droits. On envoya en conséquence un évêque de Pise, nommé Landolphe. C'était sous le pontificat de Grégoire III. Du temps d'Urbain II, l’Église céda à la métropole de Pise, moyennant une redevance annuelle, la souveraineté de la Corse. De cette manière les Pisans devinrent les maitres. Cette nouvelle domination ne dura pas longtemps, grâce à la haine des Génois pour le gouvernement de Pise. Après bien des embarras et des tracas suscités par Gênes à la république toscane, l'établissement des Génois en Corse eut lieu d'une manière définitive. Cette défaite éveilla chez les Pisans la plus grande animosité contre les Liguriens. Ils parvinrent à mettre dans leurs intérêts Giudice de Cinarca, qui rétablit leur puissance pour de longues années, mais qui ne put la maintenir contre la trahison. Gênes ayant gagné un des lieutenants de Giudice, devenu aveugle, le malheureux vieillard fut impitoyablement livré à ses ennemis, et Pise perdit en lui le plus grand défenseur de son autorité en Corse. La souveraineté de l'île revint donc à Gênes en 1347. La possession de la république ligurienne fut inquiétée par deux enfants naturels du comte de Cinarca, André, celui que nous venons de voir mourir aveugle. Guillaume de La Rocca, esprit entreprenant et audacieux, ne manqua pas d'obtenir quelques succès. Cependant, malgré mille vicissitudes diverses, les Génois ne perdirent pas un instant de vue la Corse. Lorsque le gouvernement de la république fut impuissant à contenir les insulaires, des compagnies songèrent à conquérir l'ile pour leur propre compte. C'est ainsi que se succédèrent les deux sociétés de la Maona et de Saint-Georges. Mais les empiètements despotiques des gouverneurs envoyés par ces sociétés, et principalement par celle de Saint-Georges, épuisèrent le pays sous tous les rapports. La cruauté des agents de cette société alla si loin, que les particuliers ne pouvaient plus obtenir réparation d'aucune espèce. La justice se vendait au poids de l'or. De là, l'exercice de cette justice privée qu'on doit souvent excuser, sinon justifier par l'absence de toute justice générale. La terrible vendetta (vengeance) se naturalisa dans l'ile et fut considérée par les familles comme l'unique moyen de leur conservation. Une révolution se fit alors dans les mœurs. Toutes ces iniquités excitèrent dans l'âme noble et élevée de Sampiero, au service de la France sous Henri II, une haine implacable contre Gênes. Aussi Sampiero profita des faveurs dont il fut l'objet à la cour de ce roi, à la suite de ses glorieux exploits, pour pousser la France à entreprendre la conquête de l’ile. Henri II y consentit; et, en 1547, après les efforts du général de Thermes et de l'héroïque Sampiero, la Corse était reconnue comme possession française.

Mais le 7 novembre 1559, François II
retira de l'île les forces de la France, malgré les preuves
d'attachement qu'avaient données les Corses à leurs nouveaux
maitres. Sampiero ne perdit pas de vue la cause de sa malheureuse
patrie. Ayant foi en sa valeur et en celle de ses compatriotes,
il reprit la lutte contre la société de Saint-Georges. Gênes
ne tarda pas à ressentir les effets de la présence de Sampiero
dans l'île. Étienne Doria fut défait, et les troupes espagnoles
venues au secours de la république ne ralentirent en aucune
manière les exploits du héros. Et déjà le grand citoyen touchait
au terme de sa glorieuse entreprise, lorsque la balle d'un traitre
vint enlever à la Corse un défenseur illustre et un père bienaimé
La peste et la famine suivirent de près ce désastre, et les
soldats de Sampiero, privés de leur général, se virent contraints
d'aller demander l'hospitalité à la cour de France, à la cour
de Rome et à la cour d'Espagne. Partout ils trouvèrent bon accueil.
Henri IV, principalement, ayant été bien servi par quelques-uns
d'entre eux, leur accorda le titre et les droits de citoyen
ainsi qu'à tous les Corses qui seraient forcés de chercher un
refuge en France. Pendant ce temps, Gênes n'arrêtait pas ses
rigueurs. Au contraire, les défaites qu'elle avait éprouvées
en combattant contre les Corses, au lieu de ramener le sénat
à des sentiments plus doux, à une politique conciliante, avaient
si bien exaspéré la république, que les insulaires se voyaient
tyrannisés de plus en plus. Dans cette terrible situation, réduite
à l'impuissance par l'épuisement de toutes leurs forces, les
habitants de l'île cherchèrent leur salut. dans un aventurier
Théodore-Antoine, baron de Newkoff, du comtat de La Marck en
Westphalie, ayant promis des secours, les Corses consentirent
à l'avoir pour roi, sous le nom de Théodore Ier.
Ce personnage, un peu romanesque, ne doit pourtant pas être
calomnié. Il avait de l'instruction et appartenait à une famille
distinguée dont les membres ont tenu rang dans diverses cours,
il était en outre courageux, entreprenant, ambitieux, et par
là capable de se rendre utile dans la lutte qui se poursuivait
entre les Corses et les Génois. Théodore établit le siège de
son modeste gouvernement à Corte. Il fut aimé de son peuple
et secondé par lui. Mais il eut bientôt à combattre la jalousie
des nobles et à lutter contre Gênes, toujours acharnée contre
sa proie. Théodore avait fait des promesses il en put tenir
quelques-unes, et les autres exigeaient du temps, entrainaient
des lenteurs. Cependant le temps pressait Gênes tourmentait
de plus en plus les populations avides de sécurité et de repos.
Cette situation provoqua, de la part de Théodore, un voyage
sur le continent. Afin de mieux garantir les libertés et l’indépendance
de son peuple, il alla demander à toutes les puissances et entre
autres à la Hollande, les munitions de guerre nécessaires pour
délivrer la Corse de la souveraineté de Gênes. Cette absence
un peu trop prolongée éveilla bien des craintes dans l'ile et
les plus chauds partisans de Théodore finirent par porter les
vœux de leurs compatriotes un peu partout. Sur ces entrefaites,
Gênes venait d'obtenir du cabinet de Versailles une espèce de
médiation armée confiée aux soins du comte de Boissieux. La
présence de l'envoyé de France fut agréable aux insulaires,
persuadés, en général, que le roi leur serait conservé, ou du
moins, que les armes françaises n'avaient point pour but de
les assujettir de nouveau à la république génoise. Mais les
choses changèrent de face, le jour où le comte de Boissieux
prit ouvertement parti pour Gênes. La lutte s'engagea presque
aussitôt entre les Corses et les Français, et nous devons à
la vérité de dire que ceux-ci furent mis par les braves montagnards
dans une complète déroute.

La nouvelle de ce désastre inattendu irrita Louis XV. Le comte de Boissieux étant mort, le marquis de Maillebois y fut envoyé pour le remplacer, et on mit sous ses ordres une force armée assez considérable. Maillebois fut plus heureux que son prédécesseur secondé par un certain nombre de chefs corses et surtout par Hyacinthe Paoli, dont le courage ne fut pas toujours à la hauteur du talent, il soumit enfin l'île. Quoique cette nouvelle domination eût été imposée par la victoire à des patriotes malheureux et épuisés, le gouvernement français aurait été aimé par la très grande majorité des insulaires; mais la cour de Versailles ne jugea pas à propos de profiter et de jouir de son triomphe. Soit faiblesse, soit complication des affaires extérieures, à la suite de la mort de l'empereur Charles VI, l'ordre fut donné à Mlaillebois d'évacuer immédiatement l'île et de l'abandonner aux Génois en l741. Il en résulta une nouvelle prise de possession de la part de Gênes, représentée par Spinola, et une nouvelle insurrection de la part des Corses. Alors un grand homme venait d'arriver en Corse, c'était Pascal Paoli, fils d'Hyacinthe. Simple officier au service du roi de Naples, il résolut d'aller délivrer sa patrie de la tyrannie.
A
Arrivé en Corse, on le proclama général
de toutes les forces de la nation. A ce titre, il réunit dans
les premiers jours de juillet 1755 une consulte générale, il
organisa le gouvernement de l'île et se prépara à la défense.
Paoli se montra dès ses premiers actes à la hauteur des circonstances
son génie politique pacifia l'île en quelques années, anéantit
la vendetta, unit les chefs des anciens États et éloigna pour
toujours du centre de la Corse la maudite domination génoise.
Chose remarquable! Le philosophe de Ferney, qui n'a pas
toujours été juste pour les Corses, a parlé de Paoli avec admiration
« L'Europe, a-t-il dit, le regardait comme le législateur
et le vengeur de sa patrie. Les Corses, ajoute-t-il sur le même
sujet, étaient saisis d'un violent enthousiasme pour la liberté,
et leur, général avait redoublé cette passion si naturelle devenue
en eux une espèce de fureur. » Nous manquerions à la mémoire
de Paoli, si nous ne citions de lui les paroles suivantes
« Il faut que notre administration ressemble à une maison de
cristal où chacun puisse voir ce qui s'y passe. Toute obscurité
mystérieuse favorise l'arbitraire du pouvoir et entretient la
méfiance du peuple. Avec le système que nous suivons, il faudra
bien que le mérite se fasse jour, car il est presque impossible
que l'intrigue résiste à l'action épurative de nos sélections
multiples, générales, fréquentes.»

Ces belles paroles montrent bien quel
était l'homme qui présidait aux destinées de la Corse vers l'année1767.
Nous devons signaler à cette époque un fait sans importance
par rapport à l'histoire générale de la Corse, mais qui mérite
d'être remarqué, parce qu'il ne contribua pas peu à la fortune
de la famille Bonaparte. En 1767, Charles Bonaparte était secrétaire
de Paoli; il épousa Lætitia Ramolinoqui donna le jour deux années
après à Napoléon, dont Paoli fut le parrain. Mais revenons à
Paoli. A l'époque dont nous parlons, l'Europe entière admirait
les prodiges de son génie. Le grand Frederik lui envoya une
épée d'honneur dont la lame portait pour inscription Patria,
Libertas!
J.-J. Rousseau écrivait sur l'avenir de cette
île célèbre la plus noble prophétie que jamais peupleait vu
réaliser son profit. Le monde entier avait les yeux sur ce berceau
de héros et de grands hommes. Mais que faisait Gênes en ce temps-là
? Expulsée tout à fait de la Corse, menacée presque dans ses
murs, grâce aux efforts prodigieux de Paoli, qui non seulement
voulut améliorer le pays, mais qui songea à lui créer des forces
maritimes, elle supplia la cour de Versailles de venir son secours;
mais trompée dans son espoir de ce côté, puis humiliée des mille
défaites qu'elle avait subies coup sur coup, elle céda enfin
à la France ses droits sur une contrée qu'elle ne pouvait plus
asservir. L'offre de Gênes fut acceptée en le 15 mai 1768, et
le comte de Marbeuf parut avec une armée sur les côtes d'Ajaccio,
pour soumettre tout le pays. La soumission eut lieu, mais non
pas sans beaucoup de sang répandu de part et d'autre. Paoli,
quoique réduit à des forces très peu considérables et à l'occupation
de quelques petits forts sans importance, sut résister au marquis
de Chauvelin, qui avait remplacé M. de Marbeuf.
M. de Vaux
succéda au marquis de Chauvelin une action générale fut engagée
près de Ponte-Nuovo, et Paoli, poursuivi de près, écrasé par
le nombre, ne dut son salut qu'à la vitesse de son cheval. Il
se réfugia en Angleterre, royaume auquel il avait voulu soumettre
sa patrie. La Corse reconnut, dès lors, la souveraineté de la
France. Paoli parvint, il est vrai, sous la Terreur, à délivrer
l'île d'une domination qu'il jugeait nuisible aux intérêts de
ses compatriotes, et à la soumettre aux Anglais. Mais ceux-ci
furent chassés de l'île, lors de l'invasion de l'Italie par
les armées de la République. Telle est, en résumé l'histoire
de la Corse, peuplée encore aujourd'hui par une race d'hommes
braves, courageux, intelligents et qui conservent à un très
haut degré l'amour de la patrie.
Corse du Sud (2A)
Ajaccio
Il est établi qu'à partir du VIIIème siècle la ville, à l'instar de la plupart des autres communautés côtières corses, déclina fortement et disparut presque complètement. Néanmoins, on sait qu'un château et une cathédrale étaient toujours en place en 1492 et que cette dernière ne fut démolie qu'en 1748. À la fin du XVème siècle, les Génois désireux d'affirmer leur domination sur le sud de l'île décidèrent de rebâtir la ville d'Ajaccio. Plusieurs sites furent alors considérés : la Pointe de la Parata (non retenue car trop exposée aux vents), l'ancienne ville (considéré finalement comme insalubre à cause de la proximité de l'étang des Salines), enfin la Punta della Lechia sur laquelle le choix a été arrêté. Les travaux débutèrent le 21 avril 1492. La ville se développa rapidement et devint la capitale administrative de la province de l'Au Delà Des Monts (plus ou moins l'actuelle Corse-du-Sud)

Bastia demeurant la capitale de l'ile
entière. Tour génoise. D'abord une colonie peuplée exclusivement
de Génois, la ville s'ouvre lentement aux Corses, même si pratiquement
jusqu'à la conquête française, les Ajacciens légalement citoyens
de Gênes, se distingueront très volontiers des paesani insulaires,
ces derniers habitant principalement le Borgu, faubourg à l'extérieur
des remparts de la cité (l'actuelle rue Fesch en était l'artère
principale).
Ajaccio fut occupée par les Français de 1553
à 1559, puis passa définitivement à la France en 1769 : après
avoir vaincu l'armée royale à Borgo en octobre 1768, les patriotes
de Pascal Paoli sont écrasés en mai 1769 à Ponte-Novu. La ville
fut faite par Napoléon Ier, qui en était originaire,
la capitale de l'unique département de l'ile au détriment de
Bastia. C'est au cours des XIXème et XXème
siècles qu'Ajaccio rattrapa son retard sur cette dernière et
devint la ville la plus peuplée de l'ile. Au XIXème
siècle, Ajaccio est une station d'hivernage très prisée de la
haute société de l'époque, particulièrement anglaise, à l'instar
de Monaco, Cannes, Nice. Une église anglicane fut même bâtie.
Le premier bagne pour enfants de France fut construit à Ajaccio
en 1855 : la colonie horticole de Saint Antoine. C'était une
colonie correctionnelle pour jeunes délinquants, (de 8 à 20
ans) établie en vertu de l'article 10 de la loi du 5 aout 1850.
Près de 1200 enfants venus de toute la France y séjournèrent
jusqu'en 1866, date de sa fermeture. Cent soixante d'entre eux
y périrent, victimes des conditions sanitaires déplorables,
et de la malaria qui infestait les zones insalubres, qu'ils
étaient chargés d'assainir
Le 9 septembre 1943, Ajaccio
se soulève massivement contre l'occupant nazi et devient ainsi
la première ville française libérée de la domination allemande.
Le général de Gaulle se rend à Ajaccio le 8 octobre 1943, et
déclare : "Nous devons sur le champ tirer la leçon de la page
d'histoire que vient d'écrire la Corse française. La Corse a
la fortune et l'honneur d'être le premier morceau libéré de
la France; Ce qu'elle a fait éclater de ses sentiments et de
sa volonté, à la lumière de sa libération, démontre que ce sont
les sentiments et la volonté de la Nation tout entière".
Sartène

Malgré son aspect de vieille ville, Sartène n’est pas si âgée que ça. Sartène, d'abord pieve pisane, fut fondée par les Génois en 1507, après l'élimination de Rinuccio della Rocca. Son nom proviendrait d'un lieu-dit local et aurait la même origine lointaine (peut-être étrusque) que "Sardaigne". Les Génois l’édifièrent sur un promontoire rocheux difficile d’accès afin de garantir la sécurité des habitants : le premier noyau de peuplement fut le quartier d'u Pitraghju. Dans les années 1550-1552, Gênes fit construire des remparts. À cette époque, l'entrée de la ville se faisait sous la loggia, ce qui a donné son nom à la place Porta. Malgré la victoire de Lépante (1571), les raids barbaresques connaissent une recrudescence. Le réseau des tours littorales chargées d'alerter les populations de l'intérieur est loin d'être achevé. C’est le Turc Dragut qui, à la suite de ses assauts, « incita » les Génois à construire une cité fortifiée où pourraient se réunir tous les habitants des hameaux environnants. Malheureusement, les fortifications ne suffirent pas pour arrêter Hassan Vénéziano, roi d’Alger, qui en 1583 prit la ville et emmena 400 Sartenais en esclavage et en tua plus d’un. La ville fut repeuplée par les paysans des villages environnants. Sartène fut autrefois, de toutes les agglomérations corses, la plus rétrograde. À partir de 1630, un nouveau bourg ("u Borgu") fut construit hors des murailles pour loger les journaliers qui travaillaient dans les grandes propriétés foncières. Giafferi conquit la ville en 1732 après avoir battu le corps expéditionnaire autrichien. À l'époque de Pascal Paoli, les notables interdirent la région au généralissime (Consulte d'Istria - 1758), avant d'accepter finalement son autorité en 1763. L'histoire de Sartène fut toujours agitée : luttes des paysans de la montagne contre les gros propriétaires terriens, luttes au XIXème siècle entre les habitants des quartiers du Borgu (taravais d'origine) et ceux de Sant'Anna (Sartenais de souche), vendetta entre les Rocca-Serra et les familles Ortoli et Pietri
Haute Corse (2B)
Bastia
Les Génois ont vite senti le besoin de se mettre à l'abri des invasions qui venaient de la mer et ont commencé à construire, du temps du gouverneur Léonello Lomellini, une bastiglia (une bastille), c’est-à-dire une place forte, une citadelle. Avec le temps, la Bastiglia (Bastia) s'est développée, est devenue prospère et est devenue plus importante que Cardo. Toute son histoire est comprise dans sa « bastiglia », la citadelle des origines qui constitue la ville close. Ce sont ici la mer et la montagne qui décident de l’implantation des lieux habités, comme l’exige le relief de l’ile. Aussi, Bastia fut capitale au temps de la domination génoise. Elle s’est accrochée aux pentes pour s’étaler plus tard, en gagnant sur l’eau sa place Saint-Nicolas. De la modeste marine qu’elle était au port de commerce qu’elle est devenue, son histoire a été jalonnée des gloires et des vicissitudes que connaissait toute ville fortifiée. Élue par le patricien génois Léonello Lomellini, en 1353, pour assurer la liaison avec Gênes, elle naquit pour ainsi dire de son rocher sur lequel fut élevé un donjon (bastiglia, d’où son nom) et que, quelque cent ans plus tard, on ceintura de remparts.
Calvi
Au cours de la deuxième moitié du XIIIème
siècle, une guerre entre seigneurs amena l'édification de la
Haute ville. En 1278, Calvi se confédère avec Gênes. Sa fidélité
sera constante. En 1284, par une victoire navale devant l'îlot
de la Meloria, les Génois mettent fin à la puissance navale
et politique des Pisans. Les uns après les autres, les seigneurs
corses rendent foi et hommage à la République de Gênes mais,
en 1297, Boniface VIII met un terme à cet assujettissement en
accordant l'investiture de l'île au roi d'Aragon. Après un bref
passage sous la domination du roi Alphonse V d'Aragon, Calvi
passe en 1453 sous le contrôle de l'Office de Saint Georges
qui l'entoure de solides murailles d'une citadelle, notamment
pour se protéger d'éventuelles attaques de Pise.
Calvi, l’une
des principales places de Corse au début du XVIème
siècle, a été la résidence du gouverneur génois de 1544 à 1548.
Au XVIème siècle, après la mort de Rinuccio Della
Rocca, dernier seigneur souverain de la Rocca, toute l'île passe
sous le pouvoir direct de Gênes et son administration. La justice
est rendue par le gouverneur et par d'autres fonctionnaires,
au nombre variable suivant les époques, portant le titre de
commissaire ou de lieutenant. Dans une certaine mesure, les
Calvais pouvaient concourir à l'administration de la justice
: « le commissaire que la République envoyait à Calvi était
assisté, en matière civile, de trois « consuls » tirés au sort
périodiquement (tous les six mois, puis tous les trois mois)
dans une liste — un bussolo — de trente-six membres élus par
les Calvais eux-mêmes. Le tribunal n'était composé de la sorte
que pour les procès entre Calvais, et même les consuls jugeaient
seuls et sans l'assistance du commissaire les procès champêtres
; pour les causes dans lesquelles intervenaient des gens étrangers
à Calvi, le commissaire jugeait seul » - Colonna De Cesari-Rocca.
Jusqu'au XVIIIème siècle la ville reste fidèle aux
Génois d'où la devise « Civitas Calvi Semper Fidelis ». Le 21
mai 1730, au début de la Grande Révolte des Corses contre Gênes
qui dura de 1729 à 1769 et dont la cause majeure était l'augmentation
constante des impositions au gré des officiers et fonctionnaires
génois successifs, le gouverneur Felice Pinelli dans sa première
année de son mandat, visite Calvi. En 1731, Mgr Giustiniani,
évêque de Sagone se réfugie à Calvi. Début juin 1731, Calvi
est assiégée par des forces corses conduites le piuvanu Paganelli.
Janvier 1732, le colonel de Vins, à la tête de nouvelles troupes
allemandes venues remplacer celles commandées par le baron de
Wachtendonck, débarque à Calvi venant de Bastia avec 600 soldats
d'élite. De Vins, qui tente d'occuper Calenzana, village voisin,
y subit une lourde défaite le 14 janvier. Le 7 avril 1732, à
la suite d'un accord entre Vienne et Gênes pour l'envoi de nouvelles
troupes en Corse, le prince de Wurtemberg arrive à Calvi. Les
forces allemandes dans l'île, en tout 11 000 hommes, seront
placées sous son commandement, assisté du prince de Kulmbach,
général de bataille, et du comte de Schmettau, général d'artillerie.
Le 17 avril, il publiera un édit à Calvi, accordant cinq jours
aux Corses pour rentrer dans l'obéissance de la République.
En octobre 1737, Calvi, Lumio, Calenzana et Algajola sont aux
mains des Génois, le reste de la Balagne aux Nationaux. Calvi
servira de camp de base aux troupes françaises envoyées aider
Gênes et rétablir une situation préoccupante, avec promesse
de laisser six bataillons en Corse, à conditions qu'ils soient
installés dans une place sûre comme Calvi ou Ajaccio. Gênes
n'accepta pas de confier des places fortes aux Français.
Le 6 septembre 1741 les dernières troupes françaises quittent
Calvi pour Antibes. En 1756 est construit le Fort Maillebois
que Calvi rebaptisera Fort Mozzelo après le départ des Français.
Laurent Giubega, parrain de Napoléon, se réfugia ainsi à Calvi,
alors que la ville s'était faite fidèle aux Français, pendant
deux mois de mai à juin 1793 car il avait été chassé d'Ajaccio
par les Paolistes. Calvi résista à un siège de deux mois contre
Pascal Paoli et ses alliés les Anglais en 1794. L'amiral anglais
Nelson y perdit un œil lors de ce siège de la citadelle de Calvi
par sa flotte. Après avoir résisté aux Anglais, Calvi passa
quand même sous tutelle britannique pendant deux ans. Redevenue
française, Calvi restera une forteresse militaire de 1938 à
la libération
Corte

Corte était l'ancienne capitale de la
Corse, quand celle-ci était indépendante. Siège du Palazzu Naziunale
sous Pascal Paoli, elle abritait également une université, encore
en activité aujourd'hui. Durant la seconde guerre mondiale et
l'occupation italienne, les premiers membres de la mission secrète
Pearl Harbour (Toussaint et Pierre Griffi, Laurent Preziosi
et Roger de Saule) sont venus coordonner le 2ème réseau de résistance
après avoir créé le 1er dans la région de Piana/Cargése. Ils
étaient arrivés clandestinement par le sous-marin Casabianca
dans la baie de Topiti le 14 décembre 1942.
Rouverte en 1981,
l'Université de Corse accueillait en 2007 4 900 étudiants, ce
qui en fait la plus petite ville de France siège d'une université.
Des administrations régionales sont également implantées dans
la ville, qui bénéficie outre son passé historique d'une position
centrale au sein de l'ile.
La Corse
Cette ile recèle bien des trésors, tant
pas ses paysages grandioses, par son histoire très tourmentée,
par la richesse de son patrimoine et par la chaleur de son peuple.
Ce n'est pas pour rien que cette région est appelé l'Ile de
Beauté. Je n'ai pas encore eu la chance de la découvrir, mais
un séjour est au programme.
D'ailleurs une légende corse
raconte que lorsque Dieu créa le monde, lorsqu'il eut fini son
œuvre il eut une idée: «puisque je maitrise la technique
pour concevoir les arbres, les montagnes, que je détiens les
éléments, il faudrait que je crée un chef d'œuvre pour parfaire
le monde, un joyaux que je déposerais au milieu des flots comme
un diamant dans son écrin» Et Dieu en une journée créa la
Corse, mais la nuit suivante il ne pu trouver le sommeil: "cette
ile est trop belle, elle va susciter jalousie et convoitise"
Et toute la nuit Dieu chercha une solution. Au matin Dieu se
réveilla le cœur empli de joie, il avait trouvé une solution,
il créa un peuple capable de protéger cette petite ile: «je
vais créer un peuple de farouches gardiens, des ardents défenseurs
pour ce sanctuaire, des hommes et des femmes qui se battent
sans cesse et sans jamais s'essouffler pour protéger mon œuvre
courage, solidarité, amour de cette terre et capacité de résistance
seront inscris dans leurs cœurs.»