Pays de Loire
Chinon - Vincent de Roses
En bas, à droite, étalée sur le val,
la Loire coulait, frissonnante de saulaies enfantées par
les sables roses.
Dérober la vue du fleuve, pour révéler
tout coup, c'est un des charmes de ces turcie de Loire,
puissantes levées de terre dressées par les riverains contre
la ruée des crues subites. Aux points des plus sauvages
poussées, là ù où le fleuve furieux fait brèche et inonde
des lieux de pays, leur épaulement devient énorme. La route
alors, escalade cette épaule, prend place sur le chemin
de crêtes et suis les méandres du fleuve Si habitué soit-il,
la surprise de passant reste vive à l'instant où il touche
au faite. Et délicieuse. Avec les yeux, il semble que tous
ses sens soient atteints, et s'émeuvent ensemble. L'alacrité
soudaine de la bris, l'odeur de l'herbe et des grèves mouillées
l'atteignent au visage, en même temps que la lumière. Le
soleil, sur le front, sur les mains, la coulée de l'air
dans la gorge et les fraîche saveurs qu'il apporte, il y
a là comme ne imprégnation dont tout l'être se sent dilaté.
Maurice Genevoix
Texte extrait de la «La Loire,
Agnès et les garçons».